L’AIE a récemment indiqué que les émissions mondiales de gaz à effet de serre liées à l’énergie devraient encore augmenter en 2018. (©Pixabay)
La Commission européenne a publié le 28 novembre une communication intitulée « Une planète propre pour tous »(1) qui présente une stratégie climatique pour atteindre la neutralité carbone au sein de l'UE à l’horizon 2050. Présentation.
7 axes stratégiques en vue de la neutralité carbone
La stratégie présentée par la Commission européenne ne vise pas à lancer de nouvelles politiques ou à réviser les objectifs fixés à l’horizon 2030 (baisse de 40% des émissions par rapport à 1990) mais à « définir un cap pour la politique climatique et énergétique de l’UE » en vue de respecter les objectifs de l’Accord de Paris.
Pour atteindre la neutralité carbone (c’est-à-dire un équilibre entre les émissions et les puits de gaz à effet de serre) à l’horizon 2050, la Commission présente 7 axes stratégiques majeurs :
augmenter les gains d’efficacité énergétique en divisant par deux la consommation énergétique européenne d’ici à 2050 (par rapport à 2005), avec un effort particulier dans les bâtiments (rénovation, développement des énergies renouvelables via « l’électricité, le chauffage urbain, le gaz renouvelable ou le solaire thermique ») qui comptent aujourd’hui pour 40% de la consommation européenne d’énergie ;
développer les énergies renouvelables et l’électrification (décarbonée) au détriment des énergies fossiles. La Commission européenne estime que la part du vecteur électrique dans la consommation finale d’énergie en Europe pourrait au moins doubler d’ici à 2050 et atteindre alors 53%. À cet horizon, la production électrique européenne pourrait reposer à plus de 80% sur des sources renouvelables (et à environ 15% sur le nucléaire). Ce développement de la production électrique d’origine renouvelable pourrait contribuer à décarboner d’autres usages – transports, chaleur, industrie – grâce au « Power to X » (notamment Power to gas) ;
adopter une mobilité « propre, sûre et connectée », les transports étant responsables de près d’un quart des émissions européennes de gaz à effet de serre. La Commission européenne souligne que la mobilité électrique ne constituera pas la seule solution, pointant entre autres du doigt la faible densité énergétique des batteries, et appelle à suivre la compétitivité d’autres alternatives (hydrogène, gaz naturel liquéfié, biocarburants, etc.). Les espaces urbains, où vivent 75% des Européens, doivent se digitaliser afin de faire émerger un « smart traffic » ;
poursuivre les progrès de l’industrie européenne et de l’économie circulaire, en réduisant notamment les besoins d’énergie et les émissions associées à la fabrication de produits comme le verre, l’acier ou les plastiques. La digitalisation et l’automatisation sont présentées à court terme comme des moyens efficaces de réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur ;
développer un réseau d’infrastructures « intelligentes » et d’interconnexions, en particulier pour le transport d’électricité ;
utiliser le potentiel de la « bioéconomie » et créer des puits de carbone, dans un contexte de forte croissance démographique au niveau mondial (+ 30% d’ici à 2050 selon l’hypothèse retenue par la Commission européenne). La biomasse « durable » jouera un rôle central en vue d’atteindre des émissions nettes nulles, tant au niveau des consommations énergétiques qu'à des fins d’absorption de CO2 (notamment via la reforestation). Une transition basée sur la biomasse étant « limitée par la disponibilité des terres », il est fait mention de la contribution potentielle à la bioéconomie de ressources marines (algues notamment) ;
lutter contre les émissions résiduelles de CO2 grâce aux technologies de capture et de stockage, dont le déploiement est « toujours nécessaire » (en particulier au sein des industries intensives en énergie) et doit faire l’objet d’une action coordonnée au sein des États membres pour développer des démonstrateurs et des installations commerciales.
La Commission européenne a examiné 8 scénarios dont les plus ambitieux visent la neutralité carbone à l’horizon 2050. En voici une synthèse. (©Connaissance des Énergies, d'après Commission européenne)
Une stratégie qui sera discutée lors du Conseil européen de mai 2019
La communication de la Commission européenne intervient quelques jours avant l’ouverture de la COP24 (3-14 décembre 2018) à Katowice en Pologne. De nombreux rapports émanant de l’AIE, du GIEC, des Nations Unies et d’ONG ont alerté récemment sur la reprise de la hausse des émissions de gaz à effet de serre qui rend de plus en plus incertaine l’atteinte des objectifs de l’Accord de Paris fixés fin 2015 (lors de la COP21).
Pour rappel, la consommation mondiale d’énergie primaire a augmenté de près de 2% en 2017 et les émissions de CO2 liées à l’énergie sont reparties à la hausse après 3 années de stabilisation. Alors qu’il est de plus en plus fait référence à la « transition énergétique », rappelons que les énergies fossiles ont encore satisfait près de 81% de la demande énergétique mondiale l’an dernier, « un niveau qui est resté stable depuis plus de trois décennies malgré la forte croissance des énergies renouvelables » selon l’AIE.
La stratégie de la Commission européenne doit être examinée par les différentes institutions communautaires et sera discutée par les chefs d’États et de gouvernement lors du Conseil européen du 9 mai 2019 à Sibiu (Roumanie).
Les pays asiatiques sont à l’origine de deux tiers de la hausse des émissions mondiales de CO2 relatives à l’énergie en 2017. (©Connaissance des Énergies, d’après AIE)