Qu'est-ce que l'éco-anxiété ?

Statue Chattanooga éco-anxiété

Statue située dans le Parc Montague de Chattanooga aux États-Unis.

L'éco-anxiété est « une détresse psychologique (mal-être) découlant des inquiétudes face à la crise environnementale », rappelle l'Ademe qui note que ce phénomène « semble prendre une ampleur qui s’accentue ». L'agence y a consacré une étude, publiée en avril 2025, pour faire « un état des lieux de façon objectivée » sur le sujet (étude accessible en fin d'article).

Définition de l'éco-anxiété

L'éco-anxiété désigne « un état psychologique de détresse mentale et émotionnelle qu’un individu peut ressentir en réponse à la menace du changement climatique et aux problèmes environnementaux mondiaux », selon la définition de Teagan Hogg (auteur d'une étude de référence en 2021(1)). Cette éco-anxiété peut notamment être provoquée par une expérience directe comme une catastrophe climatique ou indirecte comme la lecture d'un article scientifique.

Renvoyant à des préoccupations légitimes, l'éco-anxiété n'est pas une maladie, mais elle « peut conduire à des psychopathologies connues (par ex. dépression ou troubles anxieux) dans les cas d’intensité les plus extrêmes, sans pour autant révéler une situation systématiquement pré-pathologique », indique l'Ademe.

Parmi les symptômes de l'éco-anxiété, sont souvent citées une inquiétude liée à ses actions et à son impact personnel sur l'environnement, une détresse émotionnelle provoquée par la crise écologique ou encore des manifestations anxieuses et/ou dépressives. 

L'Ademe souligne toutefois que l'éco-anxiété peut « tout autant évoluer favorablement, dès lors qu’elle est envisagée comme un processus adaptatif face à la crise environnementale, à condition qu’une régulation émotionnelle (diminuant les inquiétudes) et un passage à l’éco-action adapté aux ressources de l’individu (accroissant son pouvoir-d’agir) soient trouvés ».

Apparition du mot « éco-anxiété »

La première occurrence du mot « ecoanxiety » dans la sphère publique remonte à août 1990(2), avec l'emploi de ce terme par la journaliste américaine Lisa Leff dans un article de presse. 

Le concept d'éco-anxiété est théorisé en 1996 par Véronique Lapaige, médecin chercheur en santé publique, comme suit(3) : « phénomène hybride, mal-être identitaire associé à une responsabilisation nécessaire des hommes, des femmes, des sociétés dans un contexte de grands changements environnementaux ».

Limites de ce terme

L'emploi des termes « éco-anxiété » ou « éco-anxieux » se heurte à de nombreuses limites : le périmètre désigné ne fait en particulier pas consensus et certains observateurs considèrent « que cela décentre l’attention d’apporter des solutions structurelles à la crise écologique ». 

Par ailleurs, le terme est souvent employé de façon réductrice alors que l'éco-anxiété constitue « un continuum avec des scores et des symptômes progressifs » : « au même titre qu’une fièvre à 38°C est a priori moins grave qu’une fièvre à 41°C, il conviendrait donc, à chaque fois que l’on parle d’éco-anxiété (ou d’éco-anxieux), de la (les) qualifier avec un adjectif exprimant son (leur) intensité ». 

Continuum des états de l'éco-anxiétéContinuum de 3 grands états en santé mentale de l'éco-anxiété. (source : Ademe)

Le terme « éco-anxiété » est enfin parfois utilisé pour décrédibiliser les personnes concernées, avec une dimension pathologisante. Des personnes préfèrent à cet usage des termes plus positifs comme « éco-lucidité » et « éco-clairvoyance ».

Mesure de l'éco-anxiété : l'échelle « HEAS »

Parmi les outils mis en place pour mesurer l'éco-anxiété, Teagan Hogg a mis en place une échelle dite « HEAS » (Hogg eco-anxiety scale), susceptible d’aider les praticiens à un diagnostic, en calculant un score à partir des réponses individuelles.

Un score d’éco-anxiété plus ou moins important sur l’échelle HEAS est censé permettre de déterminer le niveau de détresse psychologique d’un individu. Mais l'Ademe souligne que cette échelle est « pertinente pour évaluer la détresse psychologique individuelle » mais ne permet pas « de comprendre l’ampleur de l’éco-anxiété comme phénomène de société ».

Combien de Français sont éco-anxieux ?

Dans son étude d'avril 2025, l'Ademe a retenu, en s'appuyant sur l'échelle « HEAS », sept catégories d’intensité de l’éco-anxiété, allant de « Pas du tout éco-anxieux » à « Très fortement éco-anxieux ». Ces sept catégories sont elles-mêmes réparties entre 3 grandes « classes » :

  • 75% des Français(4) seraient ainsipas, très peu ou peu inquiets (pas de menaces à la santé mentale, cas de 31,5 millions de personnes de 15 à 64 ans retenues dans l'échantillon de l'Ademe) ;
     
  • environ 15% seraient moyennement éco-anxieux, avec de premiers symptômes qu’il convient de ne pas laisser s’aggraver (6,3 millions de personnes concernées dans l'échantillon de l'Ademe)  ; 
     
  • plus de 10% seraient fortement et très fortement éco-anxieux ou en « risque psychopathologique » (2,1 millions devant bénéficier d’un suivi psychologique, avec « un risque pour 420 000 d’entre eux de basculer vers une psychopathologie tierce connue » : dépression réactionnelle ou trouble anxieux).
L'éco-anxiété en France

Qui est éco-anxieux ?

Aucune catégorie sociodémographique n’est épargnée par l’éco-anxiété, mais « à des degrés différents », souligne l'Ademe. 

Si, l'éco-anxiété ne touche « pas seulement les jeunes », c'est la classe d'âge des 25-34 ans qui est la plus éco-anxieuse dans l'étude de l'Ademe, tandis que les individus les plus âgés sont moins sujets à des formes d’éco-anxiété sévères.

Carine Sebi et Anne-Lorène Vernay, professeures associées à la Chaire Energy for Society au sein de Grenoble École de Management (GEM), confirment que cette préoccupation est centrale pour les jeunes : « depuis quatre ans, nous demandons à nos étudiants – français et internationaux – d’imaginer une société neutre en carbone en 2050(5) et l’éco-anxiété ressort dans plusieurs récits, souvent sous forme d’analyses à tonalité dystopique. Certains étudiants décrivent une véritable tension entre inquiétude, frustration et un profond sentiment d’impuissance face à l’inaction politique – ce qui fait écho à certains résultats de l’étude de l’Ademe ».

Le genre est par ailleurs un facteur déterminant du niveau d'éco-anxiété : les femmes sont en moyenne plus éco-anxieuses que les hommes. 

Les personnes de l'échantillon de l'Ademe les moins diplômées sont moins éco-anxieuses, tout comme les participants sans enfants (« la parentalité n’est pour autant pas un facteur prédictif du niveau d’éco-anxiété », nuance toutefois l'Ademe).

Personas d'éco-anxiété

L'Ademe a déterminé 7 « personas » d'éco-anxiété, c'est-à-dire des profils-type d’individus qui présentent une symptomatologie spécifique.

Personas d'éco-anxiété

Quel traitement pour l'éco-anxiété ?

Teagan Hogg décrit 4 familles de manifestations éco-anxieuses : les symptômes affectifs (inquiétudes, manifestations anxieuses), cognitifs (ruminations de pensées négatives relatives à l’environnement), comportementaux (troubles du sommeil, perte d’énergie au travail ou dans la vie personnelle, isolement social) et conatifs (anxiété de ne pas en faire assez pour l’environnement).

Si des recommandations sont émises pour préserver la santé mentale des éco-anxieux(6) (se concentrer sur ce que l'on peut maîtriser, nouer des liens avec des personnes partageant ses préoccupations, etc.), « l’éco-anxiété est une réaction naturelle et légitime à la crise écologique. Ce n’est pas une nouvelle forme de dépression et elle n’appelle pas de traitement médical : l’éco-anxiété appelle une réponse sociale », selon Laelia Benoit, chercheuse à l’Inserm(7).

Parmi d'autres, le média Bon Pote souligne(8) également qu'il faut « reconnaître l’éco-anxiété comme un problème collectif, qui nécessite en tant que tel un traitement collectif. Plutôt que de minimiser l’éco-anxiété ou de laisser à chacun(e) le soin de la gérer, il semblerait plutôt pertinent de s’en servir comme un appui pour l’action collective ». 

Consulter le rapport de l'Ademe sur l'éco-anxiété en France : état des lieux, seuils de préoccupation clinique, variables déterminantes (avril 2025)

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