Pipeline de gaz naturel

Pipeline de gaz naturel (©photo)

Définition et catégories

Le transport du gaz consiste à l’acheminer depuis la zone d’extraction jusqu’à la zone de consommation afin d’alimenter les réseaux de distribution. Le réseau de transport du gaz est souvent comparé à une autoroute car il est constitué de grands axes alors que les réseaux de distribution sont composés d'axes plus courts acheminant le gaz directement chez le consommateur.

A l'échelle nationale ou internationale, le transport du gaz relie les gisements aux réseaux de distribution de manière efficace, généralement invisible et en toute sécurité. Les réserves de gaz étant inégalement réparties dans le monde, les moyens de transport du gaz doivent parfois couvrir de longues distances et traverser plusieurs frontières afin de relier les pays producteurs aux pays consommateurs.

Il existe deux moyens complémentaires pour transporter le gaz efficacement :

  • les gazoducs : ce sont des canalisations capables de transporter sur de longues distances du gaz sous pression. Ils peuvent être terrestres ou sous-marins. Le réseau de gazoducs est aujourd’hui dense : il permet d’acheminer rapidement et efficacement le gaz vers les zones de forte demande ;
  • la transformation en gaz naturel liquéfié (GNL) : il s’agit d’une méthode utilisée pour transporter du gaz sur de très grandes distances. Lorsque le transport par gazoduc est trop coûteux ou impossible (ex : traverser l’océan Atlantique), le gaz est liquéfié puis acheminé par navire méthanier vers les zones de consommation.

Fonctionnement technique ou scientifique

Les méthodes de transport du gaz par gazoducs ou sous forme liquide reposent sur des techniques différentes.

Les gazoducs

Ils sont le moyen de transport du gaz le plus utilisé car ils sont fiables et rentables. Des tubes d’acier sont soudés pour former une canalisation pouvant atteindre plus de 3 000 kilomètres de long. Le diamètre de ces tubes varie entre 50 centimètres et un mètre.

Lorsque le gaz est sous pression, il occupe moins de volume et circule plus vite : il peut atteindre une vitesse de 40 km/h dans les gazoducs. Pour garantir une vitesse optimum et éviter les déperditions énergétiques, des stations de compressions sont installées à intervalles réguliers le long du gazoduc (tous les 100 à 200 km). La pression est fixée entre 16 et 100 bars.

Des systèmes de surveillance et des compteurs sont installés le long du réseau pour contrôler en permanence le débit de gaz. Ils donnent des informations sur le niveau de la demande et, en cas de fuite ou d’accident, préviennent en temps réel les équipes de maintenance. Le gazoduc est protégé contre la corrosion. Des postes de livraison sont également répartis le long du gazoduc afin de distribuer le gaz aux différents réseaux de distribution.

Pour des raisons de sécurité et d’environnement, les gazoducs sont le plus souvent enterrés. Cependant, dans les régions désertiques ou lorsque le sol est gelé (ex : pergélisol), le gazoduc est installé à même le sol. Les gazoducs sous-marins sont posés au fond de l’océan.

Le gaz naturel liquéfié (GNL)

Considéré comme une alternative aux gazoducs lorsque ceux-ci sont trop coûteux ou pratiquement inconstructibles, la liquéfaction du gaz sous forme de GNL permet de l’acheminer sur de longues distances et de le stocker. A pression atmosphérique et à une température d'environ -161°C, le gaz se condense (sous forme liquide) et le volume du gaz est réduit 600 fois (contre, par exemple, seulement 100 fois dans le cas d’un transport par gazoduc à une pression de 100 bars). Cela permet de transporter de plus grandes quantités plus facilement. Le gaz liquéfié est quasiment du méthane pur car l’oxygène, le dioxyde de carbone et les éléments sulfurés sont extraits dans les usines de liquéfaction.

Le GNL est transporté à bord de navires géants spécialement conçus pour cet usage, appelés méthaniers. Les navires dits « Q-Max » sont les plus gros méthaniers en activité : ils mesurent 345 mètres de long, 54 mètres de largeur et ont une capacité de 266 000 m3 de GNL. Ces bateaux doivent être isolés thermiquement pour maintenir le gaz à l’état liquide en évitant les déperditions énergétiques.

Une fois à destination, ces navires ne peuvent pas être amarrés sur les côtes. Ils déchargent leur cargaison sur un terminal méthanier qui est une installation de réception du GNL. Ce dernier est regazéifié avant d’être acheminé par conduites depuis le terminal jusqu’aux réseaux de distribution.

Enjeux par rapport à l'énergie

Nécessaire à l’essor de l’industrie et au commerce du gaz, le transport du gaz doit faire face aux enjeux suivants.

La dimension géostratégique

Les réserves en gaz sont inégalement réparties et de nombreux pays sont obligés d’importer du gaz. Ainsi certains pays d’Europe manifestent une dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie : par exemple, la Hongrie dépend à près de 82% du gaz russe(1). Les gazoducs entretiennent cette dépendance car, étant des installations de long terme, ils figent la relation d’échange entre le pays producteur et le pays consommateur. Les pays de transit sont également une composante importante du transport du gaz.

Entre 2006 et 2009, plusieurs conflits opposent la Russie à l’Ukraine suite à des désaccords sur les prix du gaz et sur les dettes liées. En 2006, l’Ukraine ponctionne notamment une partie du gaz acheminé vers l’Europe des gazoducs traversant son territoire. A partir de fin 2013 et durant toute l'année 2014, une crise politique plus sérieuse affecte l'Ukraine, avec la question du prix du gaz russe en toile de fond (celui-ci passant de 268 à 465 dollars par millier de mètre cube en mars). 

L’approvisionnement en gaz de l’Europe dépend donc indirectement des pays de transit. Des problèmes de sécurité se posent lorsque des zones à risques sont empruntées par les gazoducs. A l’inverse, le GNL offre une plus grande flexibilité car en traversant les océans, les zones présentant un risque sont plus facilement évitées. Grâce au GNL, les pays peuvent diversifier leurs sources d’approvisionnement en faisant appel à des producteurs plus éloignés.

Des investissements lourds

Les infrastructures de transport coûtent cher et nécessitent plusieurs années pour être construites. Un méthanier transportant 100 000 tonnes de GNL coûte en moyenne 200 millions d’euros. Le coût moyen de construction d’un gazoduc de plus de 1 000 km s’élève à plusieurs milliards d’euros. A potentiel énergétique identique, le transport du gaz coûte 5 fois plus cher que celui du pétrole.

Acteurs majeurs

Le géant russe Gazprom est la plus grande compagnie de production et de gestion de réseau au monde, avec le plus grand réseau de transport. En Europe, de nombreux opérateurs tels que le groupe italien ENI ou GRTgaz (filiale de GDF Suez) acheminent le gaz et participent au développement du réseau de transport. GDF Suez possède un large réseau de gazoducs et de nombreux terminaux méthaniers. Sous l’égide de l’Union européenne, les opérateurs européens développent l’interconnexion de leurs réseaux.

Lors d’un projet de construction de gazoduc, un consortium réunissant plusieurs industriels est créé afin d’apporter les fonds nécessaires pour gérer les étapes de la construction. Pour l'ancien projet South Stream qui visait à relier la Russie à l’Europe en passant sous la mer Noire (et en évitant un transit via l'Ukraine), le consortium était par exemple mené par Gazprom, associé à ENI et GDF Suez (projet abandonné par Gazprom en décembre 2014).

Généralement, la majorité des contrats entre un opérateur (ex : GDF Suez) et un producteur (ex : Gazprom) s’inscrivent dans le long terme. Cela permet de garantir la rentabilité d’un gazoduc tout en établissant une relation de confiance entre le producteur et la zone de réception du gaz.

Unités de mesure et chiffres clés

La quantité de gaz transporté se mesure généralement en mètres cubes ou en pieds cubes aux États-Unis (« cubic feet », cf), sachant qu'un mètre cube est égal à près de 35,3 pieds cubes. En 2013, les flux mondiaux de gaz atteignent un volume de 1 036 milliards de m3, dont 31,4% en GNL(2).

Le réseau de gazoducs est extrêmement dense. En France, GRTgaz gère plus de 32 000 km de gazoducs avec 26 stations de compression. Dans le monde, le gaz circule dans plus d’un million de kilomètres de gazoducs, ce qui correspond à 25 fois la circonférence de la terre.

Zone de présence ou d'application

La Russie, le Qatar, la Norvège et le Canada assurent à eux quatre plus de la moitié des exportations de gaz dans le monde(3). Des milliers de kilomètres de gazoducs relient le Canada aux États-Unis et la Russie à l’Europe. Pour livrer du gaz russe en Europe, de nombreux pays d’Europe centrale sont traversés : ils forment une zone de transit. 

L’Algérie et la Norvège acheminent le gaz vers l’Europe également grâce à des méthaniers. Pour le Japon, le gaz naturel liquéfié en provenance du Moyen-Orient ou du Sud-Est asiatique (ex : Brunei) est la seule solution pour garantir son approvisionnement en gaz. Il existe de nombreux terminaux méthaniers dans le monde. En Europe, les principaux terminaux se trouvent en Espagne, en France, en Italie et au Royaume-Uni.

Passé et présent

Longtemps considéré comme un coproduit dangereux et mal valorisable des gisements de pétrole, le gaz naturel est peu à peu devenu une matière première offrant de nombreuses possibilités d’utilisation. Cet attrait pour le gaz a été rendu possible grâce à son effet de serre réduit et à l’amélioration des techniques de transport.

Malgré la construction du premier gazoduc en 1891 aux États-Unis, il faut attendre les années 1960 pour que les techniques de métallurgie permettent de construire des gazoducs performants. Dès 1970, des milliers de kilomètres de gazoducs sont construits.

Ces dernières années, l’amélioration des techniques de liquéfaction et l’innovation de la construction navale ont permis l’essor du gaz naturel liquéfié. Le transport du gaz sur de longues distances est désormais possible et économiquement viable.

Futur

Le développement du transport du gaz est intrinsèquement lié à l’internationalisation des échanges et à la croissance de la demande en gaz, plus forte que celle du pétrole.

Assurer la sécurité des approvisionnements est un élément clé du transport du gaz. L’amélioration des infrastructures garantit un transport plus sûr et plus efficace.

La compagnie russe Gazprom a construit le gazoduc sous-marin Nord Stream sous la mer Baltique pour acheminer le gaz en Europe. Son projet South Stream (sous la mer Noire) a en revanche été abandonné fin 2014. Il constituait, avec une partie sous-marine de 900 km de long, le plus grand projet de gazoduc sous-marin au monde. Ces deux gazoducs diversifient les routes empruntées et réduisent les zones de transit, le but étant de répondre en toute sécurité à une demande croissante en gaz.

L’Union européenne affirme, quant à elle, sa volonté de sécuriser et de diversifier les sources d’approvisionnement pour ne plus être dépendante, entre autres, du fournisseur russe. Un projet de gazoduc reliant la Turquie à l’Europe en passant par la Bulgarie, la Roumanie, le Hongrie et l’Autriche est en projet depuis la signature d'un accord intergouvernemental entre ces pays en juillet 2009. Appelé Nabucco, ce projet se positionnait comme le concurrent direct du gazoduc South Stream (abandonné fin 2014). Il permettrait d’acheminer du gaz en provenance du Kazakhstan et d’autres pays de la zone Caspienne.

L’essor du GNL est primordial pour diversifier les sources d’approvisionnements et éviter les relations de dépendance vis-à-vis d’un pays producteur. La diversification met en concurrence les producteurs de gaz, évitant ainsi les situations de monopole.

Tandis que les gazoducs acheminent le gaz à l’échelle régionale, le GNL permet une véritable internationalisation des échanges. Le développement du GNL permet l’émergence d’un véritable marché du gaz à l’échelle mondiale.

Le saviez-vous ?

  • Les gazoducs mal entretenus (ex : ex-URSS) se voient parfois imputer une forte contribution à l’effet de serre, avec des déperditions pouvant atteindre jusqu’à 10% de la production (ex : Sibérie) et amplifiées par le fort coefficient d’effet de serre du méthane.
  • Afin de garantir leur fonctionnement, les gazoducs sont régulièrement inspectés et nettoyés. On place alors dans les gazoducs des robots intelligents capables de les nettoyer en raclant les éventuelles impuretés. On les appelle des « smart pigs » (cochons intelligents) à cause des couinements qu’émettaient les premiers robots en se déplaçant dans les gazoducs.

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