En 1961, le « Jour du dépassement écologique » de la France intervenait le 30 septembre. (©Pixabay)
La France consommerait 1,8 fois plus de ressources naturelles que ce que les écosystèmes de son territoire « sont en mesure de lui fournir », alerte le WWF dans un rapport publié le 4 mai(1). Explications.
Rappels sur le « Jour du dépassement écologique »
« Le constat est clair : si la planète était une entreprise, elle serait en faillite ». Une situation dénoncée par le WWF (World Wide Fund for Nature), aux côtés de l’ONG américaine Global Footprint Network qui calcule depuis 1986 le « Jour du dépassement écologique ». Cette date de l’année correspond au jour « à partir duquel l’humanité a consommé l’ensemble du budget annuel mondial disponible en ressources naturelles » (au regard de « la capacité régénératrice » de la Terre).
L’empreinte écologique calculée par Global Footprint Context « mesure le flux de ressources et services fournis par les écosystèmes (biocapacité) et la demande humaine sur ces flux », à travers 6 grandes catégories (cultures, pâturage, zones de pêches, produits forestiers, espaces bâtis, carbone). Elle se focalise sur les surfaces terrestres et maritimes nécessaires aux consommations humaines mais ne prend pas en compte toute les conséquences de ces dernières, notamment en matière de pollution.
Au niveau mondial, le Jour du dépassement écologique était évalué au 2 août en 2017, contre fin septembre en 1997. Le WWF met ainsi chaque année en exergue l’érosion du « capital naturel » et ses conséquences : diminution des stocks de poissons, sécheresses, perte de biodiversité, etc.
L’empreinte écologique de la France s’est dégradée depuis 2015
Pour la première fois, le WWF communique cette année séparément sur le Jour du dépassement écologique de la France pour sensibiliser les pouvoirs publics, alors que la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et la stratégie nationale bas carbone (SNBC) doivent être révisées d’ici à fin 2018.
En 2018, le Jour du dépassement interviendrait dès le 5 mai pour la France(2), soit 5 jours plus tôt qu’en 2014. Le « déficit écologique » de la France s’est « aggravé », contrairement au déficit financier, alerte Pascal Canfin, directeur général du WWF France. Son organisation souligne le « paradoxe spectaculaire » d’une détérioration depuis 2015, alors même que Paris avait accueilli la COP21 cette année-là. La dette écologique de la France s’élèverait aujourd’hui à l’équivalent de « 33 années de dette écologique accumulée depuis 1961 ».
L’humanité aurait « exploité l’équivalent des capacités de régénération de 2,9 Terre » en 2018 si le mode de consommation des Français était généralisé à l’ensemble du monde, précise le WWF (le monde exploiterait actuellement les ressources naturelles d’environ 1,7 Terre selon les estimations de l’organisation). Signalons que la France figure pourtant dans « le peloton de tête » des pays développés : le WWF estime notamment que le Jour du dépassement écologique intervient le 1er mai en Allemagne et dès le mois de mars aux États-Unis, au Canada et en Australie.
La consommation énergétique mondiale a augmenté de 40% depuis 2000
Le WWF impute principalement la dégradation de l’empreinte écologique de la France à « la baisse du prix du pétrole qui dope la consommation de carburants ». Le prix moyen du baril de Brent en avril 2018 (72,06 $) était encore inférieur d’environ 27% au cours moyen de 2014 (99,02 $)(3). L’empreinte carbone de la France liée à la combustion d’énergies fossiles et à la production de ciment compterait au total pour 56% de l’empreinte écologique française calculée par Global Footprint Context.
Le WWF appelle ainsi entre autres à réduire les émissions de gaz à effet de serre des transports et des bâtiments (en accélérant le rythme des rénovations lourdes). Il promeut notamment l’usage du vélo comme « mode de transport de masse » et la mise en place de davantage de zones à circulation restreinte (limitées aux véhicules à basses émissions).
Pour rappel, la consommation mondiale d’énergie primaire en 2017 a augmenté de 2,1% et était supérieure de 40% au niveau de 2000. Les émissions mondiales de CO2 liées à l’énergie ont pour leur part augmenté de 1,4% en 2017, atteignant un niveau record de 32,5 Gt. Cette hausse intervient après 3 années de stabilisation des émissions et « contraste avec la forte réduction nécessaire pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris sur le changement climatique », rappelait encore l’Agence internationale de l’énergie en mars 2018.
Émissions de gaz de serre et « budgets carbone » de la France (©Connaissance des Énergies, d'après ministère de la transition écologique et solidaire)