Le « One Planet Summit » organisé le 12 décembre a accueilli 4 000 acteurs engagés dans la lutte contre le réchauffement climatique. (©Pixabay)
Deux ans après l’Accord de Paris, le « One Planet Summit(1) » a été le théâtre hier de nombreux engagements de « la finance publique et privée au service de l’action climat ». Il a été rappelé lors de cet événement l’urgence à agir alors que les efforts réalisés depuis fin 2015 restent largement insuffisants pour tendre vers l’objectif des « 2°C ».
Deux annonces suscitant une attention particulière
A la tribune du « One Planet Summit », le président de la Banque mondiale Jim Yong Kim a annoncé que son institution cesserait ses financements dans l’amont pétrolier et gazier (exploration et exploitation) après 2019(2). Il est toutefois précisé que, « dans des circonstances exceptionnelles », des projets gaziers pourraient encore être financés dans les pays les plus pauvres s’ils font progresser l’accès à l’énergie, tout en respectant les engagements des pays concernés dans le cadre de l’Accord de Paris.
La Banque mondiale a par ailleurs indiqué être en bonne voie pour atteindre son objectif de porter à 28% la part de ses financements liés l’action climatique en 2020 (29 milliards de dollars par an devraient être consacrés à des « projets climatiques » à cet horizon)(3). Elle s’est engagée à présenter un bilan de son action dans la lutte contre le changement climatique ainsi que de nouveaux engagements post-2020 lors de la COP24 en Pologne.
L’assureur AXA a pour sa part annoncé qu’il n’assurerait plus les projets de construction de centrales à charbon et les entreprises exploitant des sables bitumineux ou des pipelines associés. Concrètement, cela implique un désinvestissement de l’industrie du charbon s’élevant à 2,4 milliards d’euros selon le groupe (et de 700 millions d’euros pour les sables bitumineux)(4).
Des investisseurs engagés
Placé sous le signe de la finance, le « One Planet Summit » a entre autres été marqué par l’initiative « Climate Action 100+ »(5) : 225 grands investisseurs (gérant plus de 26 300 milliards de dollars d’actifs) s’engagent à suivre pendant 5 ans les grandes entreprises émettant le plus de gaz à effet de serre afin d’inciter ces dernières à améliorer leur gouvernance et leurs actions en matière de lutte contre le changement climatique (la liste des entreprises sera actualisée en fonction des progrès réalisés).
De nombreux autres fonds et initiatives visant à accélérer la lutte contre le réchauffement climatique ont été salués ce 12 décembre : Alliance pour la décarbonation des transports, fonds de lutte contre la dégradation des terres(6), plateforme de financement de 100 projets « eau et climat » pour l’Afrique, initiatives relatives à une tarification du carbone, Alliance solaire internationale(7), « Climate Smart Zone » dans les Caraïbes, « Service solidarité européen pour le climat », Observatoire spatial du climat, etc.
En matière d’énergie, la coalition « Powering past coal » lancée lors de la COP23 par le Royaume-Uni et le Canada appelle à accélérer l’élimination de centrales à charbon « traditionnelles » en fixant un moratoire sur toute nouvelle centrale non équipée d’un dispositif de capture et de stockage du CO2. Pour rappel, la France s’est pour sa part engagée à cesser toute production électrique à partir de charbon d’ici à 2022 (cette énergie comptait pour 1,4% du mix électrique français en 2016)(8).
Un « écran de fumée » face aux 2°C ?
Malgré les engagements de nombreux acteurs (banques de développement et investisseurs, entreprises, villes, etc.), l’objectif de contenir à 2°C le réchauffement climatique d’ici à 2100(9) s’avère hors de portée à l’heure actuelle, faute d’engagements suffisants des États (au regard des « INDC » déposées lors de la COP21(10)). « On ne va pas assez vite et c’est ça le drame », a confirmé Emmanuel Macron dans son discours introductif(11).
Côté ONG, Réseau Action Climat a entre autres déploré le fait que les annonces d’acteurs non-étatiques lors du « One Planet Summit » constituent « un écran de fumée face aux maigres annonces des pays ». Le nouvel engagement français en matière de financements pour l’adaptation au dérèglement climatique dans les pays en développement (1,5 milliard d’euros par an en 2020) est notamment jugé insuffisant par les ONG.
En clôture du « One Planet Summit », Emmanuel Macron a exprimé son souhait de voir cette « réunion de chantier » être renouvelée chaque année (à l’image des COP), en France ou ailleurs, pour suivre et rehausser les engagements de lutte contre le réchauffement climatique.