Un vote solennel sur le projet de loi mettant fin à la recherche et à l’exploitation des hydrocarbures en France est prévu à l'Assemblée nationale le 10 octobre à 15h. (©Assemblée nationale)
L’Assemblée nationale a achevé cette nuit l’examen du projet de loi visant entre autres à mettre fin à la recherche et à l’exploitation d’hydrocarbures en France d’ici 2040. Le point sur ce texte dont le vote à l’Assemblée est prévu le 10 octobre.
Une interdiction et des dérogations
C’était l’un des axes principaux du Plan Climat présenté en juillet dernier par le ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot : « en finir avec les énergies fossiles », ou plus précisément avec leur production sur le territoire français à l’horizon 2040. Il ne pourra par ailleurs plus être délivré de nouveau permis d’exploration d’hydrocarbures liquides ou gazeux après la publication de la loi.
Le projet de loi relatif à cette interdiction a été discuté les 3 et 4 octobre à l’Assemblée nationale, faisant l’objet de près de 200 amendements(1). L’article 1er du texte issu de ces délibérations confirme l’intention de mettre « fin progressivement à la recherche et à l’exploitation du charbon et de tous les hydrocarbures liquides ou gazeux, quelle que soit la technique employée ».
Des dérogations(2) ont toutefois été apportées à cette interdiction :
- l’exploitation du « gaz de mine » sera toujours autorisée sous réserve qu’elle s’effectue à des fins de sécurité, à savoir « maintenir en dépression les vides miniers contenant ce gaz » dans les veines de charbon exploitées dans le passé ;
- l’exploitation des hydrocarbures pourra également être maintenue si elle est « reconnue être le préalable indispensable à la valorisation des substances sur lesquelles porte la concession ou qu’elle résulte d’impératifs liés à la maîtrise des risques ». Dans ce cas, il est précisé que la valorisation des hydrocarbures en question doit être limitée à un usage local, sans injection dans un réseau de transport. Cette dérogation permet la poursuite de l’exploitation de soufre du bassin de Lacq en Pyrénées-Atlantiques.
Les titulaires actuel d’un permis de recherche pourront par ailleurs continuer à obtenir des concessions en cas de découverte (« droit de suite ») mais aucune prolongation de ces concessions ne pourra être accordée pour une durée dont l’échéance excède le 1er janvier 2040… sauf lorsque le titulaire du permis « démontre qu’une telle limitation ne permet pas de couvrir ses coûts de recherche et d’exploitation en vue d’atteindre l’équilibre économique ».
Cette dérogation fait suite à un amendement présenté par Nicolas Hulot pour éviter les recours d’industriels attaquant le texte au Conseil constitutionnel (en demandant des compensations pour leurs droits acquis). « Une fois que la rentabilité est atteinte, le titulaire du permis est contraint de laisser les hydrocarbures restants dans le gisement », a conclu le ministre.
Pour rappel, la loi n°2011-835 du 13 juillet 2011 avait déjà interdit l’exploration et l’exploitation d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique. Ce texte sera modifié afin d’y inclure toutes les autres méthodes non conventionnelles (alternatives à la fracturation hydraulique).
Différents rapports à venir après la promulgation de la loi
Le projet de loi prévoit différentes initiatives du gouvernement après l’adoption du texte :
- dans un délai d’un mois à compter de la promulgation de la loi : la mise à disposition du public sous forme électronique d’une carte présentant l’ensemble des titres d’exploration et d’exploitation d’hydrocarbures en cours de validité et des demandes en cours d’instruction ;
- dans un délai d’un an après la promulgation de la loi : un rapport sur l’accompagnement des entreprises et personnels impactés par l’interdiction de l’exploration et de l’exploitation des hydrocarbures(3) ;
- avant le 31 décembre 2018 : un rapport sur l’origine des importations de pétrole brut et de gaz naturel en France. Ce rapport devrait comporter des informations sur l’impact environnemental lié à l’extraction de ces différents hydrocarbures.
De leur côté, les exploitants seront tenus, cinq ans avant la fin de leurs concessions, de remettre à l’administration un dossier indiquant le potentiel de reconversion des sites exploités. L'exploitation de la géothermie et l’implantation d’énergies renouvelables sont citées comme exemples de nouvelles activités à l’article 2 bis du projet de loi.
Quid de la consommation et des importations d’hydrocarbures ?
Les députés socialistes et de la France insoumise avaient souhaité inscrire dans ce projet de loi un objectif de réduction de la consommation des énergies fossiles mais celui-ci fera l’objet d’un débat ultérieur lors de la révision de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).
Pour rappel, la France a produit près de 840 000 tonnes de pétrole et 164 millions de m3 de gaz en 2015. Cela permet au pays de couvrir seulement près de 1% de sa consommation annuelle d’hydrocarbures. Les importations de brut et de produits pétroliers comptent ainsi à elles seules pour près des trois quarts de la facture énergétique française (32,4 milliards d’euros en 2016).
Précisons que le projet de loi comporte d’autres dispositions relatives à l’énergie : stockage de gaz, relations entre gestionnaires de réseaux et fournisseurs, contrôle des biocarburants, réduction des émissions de certains polluants atmosphériques, etc. Son adoption définitive par le Parlement est prévue d’ici fin 2017(3).