Centrale de Kita, de 50 MW de puissance installée, au Mali. (©Akuo Energy)
Les filières solaire et éolienne pourraient toujours compter pour moins de 10% de la production africaine d’électricité en 2030 selon un article de chercheurs de l’Université d’Oxford paru le 11 janvier dans la revue « Nature Energy »(1). Un scénario qui tranche avec les visions d’un futur électrique bas carbone pour le continent africain.
Près de 80% d’électricité d’origine fossile
À l’heure actuelle, près de 80% de la production africaine d’électricité provient encore des énergies fossiles, tandis que les filières éolienne et solaire ne comptent que pour un peu plus de 4% du mix électrique du continent (plus de 15% pour l’hydroélectricité).
Les nouveaux grands projets solaires et éoliens sont censées témoigner de la trajectoire bas carbone que pourrait « directement » emprunter le continent africain pour développer sa production électrique. Les auteurs de l’article paru dans « Nature Energy » constatent ainsi que les analystes prévoient 315 GW à 620 GW de nouvelles capacités électriques en Afrique d’ici à 2030, avec, dans certains scénarios, « une multiplication par 7 à 12 » de la part des énergies renouvelables hors hydroélectricité durant cette période.
Ces analyses très optimistes reposent toutefois sur de nombreuses hypothèses (offre, demande, politiques mises en œuvre, etc.) et sont « sujettes à un degré considérable d’incertitude », affirment les chercheurs de l’Université d’Oxford. Ces derniers rappellent que « l’existence d’un projet de centrale électrique n’implique pas nécessairement sa mise en service ».
Dans leur article, ils s'appuient sur un modèle de « machine learning » (utilisant de nombreuses données historiques, des indicateurs socio-économiques, etc.) pour analyser les chances de mise en service de plus de 2 500 projets de centrales électriques en Afrique, en fonction de nombreux critères (notamment la taille des centrales et le combustible utilisé). Ils estiment entre autres que les projets renouvelables ont « moins de chances de réussite » que ceux de centrales à gaz dans les prochaines années.
Un choc de décarbonation nécessaire d’ici à 2030
Alors que la production annuelle d’électricité de l’Afrique pourrait doubler d’ici à 2030, les chercheurs de l’Université d’Oxford estiment, dans leur scénario tendanciel, que « moins de 10% de la production pourrait venir de l’éolien et du solaire » à la fin de la décennie. Les énergies fossiles pourraient quant à elles toujours compter pour deux tiers du mix électrique du continent en 2030 (18% pour l’hydroélectricité).
Dans ce scénario marqué par la mise en service de nombreuses centrales à combustibles fossiles, l’Afrique pourrait être « bloquée » dans une trajectoire « haut carbone » pour des décennies, alertent les chercheurs(3). Ce scénario n’est toutefois pas inéluctable : un « choc de décarbonation » rapide – sous l’impulsion des gouvernements africains avec une redirection des financements internationaux – pourrait conduire « à l'annulation à grande échelle des centrales à combustibles fossiles actuellement en cours de construction ».
L'article de « Nature Energy » souligne par ailleurs les écarts importants entre les différents pays africains en matière de déploiement des énergies renouvelables. L’Afrique du Sud pourrait notamment à elle seule compter pour presque 40% des nouvelles capacités solaires installées sur le continent africain d’ici à 2030.