La plupart des pays d'Afrique de l'Ouest sont devenus indépendants lors du mouvement de décolonisation entre la fin des années 1950 et le milieu des années 1970. (©photo)
À RETENIR
- La biomasse et les déchets constituent la principale source d'approvisionnement énergétique pour 70% à 90% de la population d’Afrique de l’Ouest selon les pays.
- La population de l'Afrique de l'Ouest augmente de près de 10 millions de personnes par an et les besoins en énergie augmentent à un rythme rapide.
- Il existe de fortes disparités entre le Nigéria, premier producteur de pétrole africain, et les autres pays d'Afrique de l'Ouest.
- L'Afrique de l'Ouest est confrontée à un problème de précarité énergétique et d'accès à l'énergie : plus de 250 millions de personnes n'ont pas accès à l'électricité.
Enjeux
L'Afrique de l'Ouest est confrontée à un problème de précarité énergétique et d'accès à l'énergie : plus de 250 millions de personnes comptent sur la biomasse pour cuire leurs aliments et préparer à manger car elles n'ont pas accès à l'électricité. De grands programmes d'électrification rurale ont été lancés dans plusieurs pays et coordonnés par des agences nationales telles que l'ASER (Agence Sénégalaise de l’Electrification Rurale) ou l'AMADER au Mali.
L'utilisation massive du bois comme combustible principal pèse par ailleurs sur la durabilité des ressources. La GACC (Global Alliance for Clean Cookstoves), soutenue par la Fondation des Nations Unies, souhaite développer près de 100 millions de « foyers améliorés » d’ici à 2020. Ces foyers permettent de réduire jusqu’à 2/3 de la consommation de combustible par rapport aux méthodes traditionnelles. Des programmes pour structurer la mise en place de filières biogaz ont par ailleurs été lancés, en particulier au Burkina Faso et au Mali où la sédentarisation des élevages bovins permet d’envisager un développement à grande échelle.
12 des 15 pays d’Afrique de l’Ouest sont aujourd’hui listés par l’ONU comme Pays les Moins Avancés.
Les besoins en énergie sont en forte croissance et nécessitent des solutions innovantes qui sont encore freinées par le manque de financements : 12 des 15 pays d’Afrique de l’Ouest sont aujourd’hui listés par l’ONU comme Pays les Moins Avancés (seuls la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Nigéria n’en font pas partie) et ont un Indice de Développement Humain parmi les plus bas du globe. Les financements nécessaires au développement de l’accès à l’énergie dans ces pays sont donc la plupart du temps apportés par des bailleurs de fonds étrangers.
L’Afrique de l’Ouest est constituée d’un ensemble de 15 pays indépendants : le Bénin, le Burkina Faso, le Cap-Vert, la Côte d'Ivoire, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée-Bissau, le Liberia, le Mali, le Niger, le Nigéria, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo(1). Ses 340 millions d’habitants en 2014, dont plus de la moitié vivent au Nigéria, constituent plus d’un tiers de la population totale africaine.
En matière de superficie, les pays d’Afrique de l’Ouest s’étendent sur près de 20% du continent. La croissance démographique y est très forte (près de 10 millions de personnes supplémentaires par an) et les besoins en énergie augmentent à un rythme rapide. L’Afrique de l’Ouest dispose d’importantes ressources énergétiques, notamment de pétrole, et d'un bon potentiel dans le domaine des énergies hydraulique et solaire. Dans ces zones aux fortes disparités, l’accès à l’énergie reste toutefois l’un des défis majeurs à l’heure actuelle.
La CEDEAO (Communauté Économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) regroupe les 15 pays d’Afrique de l’Ouest. La Mauritanie, située au nord du Sénégal, en a fait partie jusqu’en 2000. (©Connaissance des Énergies)
Composition du mix énergétique
Énergie
La biomasse (bois, résidus agricole, charbon de bois, fumier, etc.) et les déchets constituent la principale source d'approvisionnement énergétique pour 70% à 90% de la population d’Afrique de l’Ouest selon les pays concernés. Il y a de fait une fracture importante entre les populations rurales et citadines, ces dernières ayant accès à des réseaux électriques.
Il existe par ailleurs de fortes disparités entre les pays d’Afrique de l’Ouest : le Nigéria est le 1er producteur de pétrole africain (12e au monde avec 2,7% de la production mondiale en 2013) tandis que d’autres pays ont une production énergétique très limitée dépendant presque exclusivement de la biomasse comme le Togo.
Pétrole
Avec 37,1 milliards de barils de réserves prouvées de pétrole à fin 2013, le Nigéria possède les 11e réserves au monde(2).
L’Afrique de l’Ouest compte au total 4 pays producteurs de pétrole :
- le Nigéria qui a produit près de 2,3 millions de barils par jour en 2013 ;
- le Ghana avec une production de 99 000 barils par jour ;
- la Côte d’Ivoire avec une production de 38 600 barils par jour ;
- le Niger avec une production de 20 000 barils par jour.
Le Bénin devrait s’ajouter à cette liste des producteurs d’Afrique de l’Ouest en 2015 grâce à l’exploitation du champ de Sémè(3).
Le Nigéria est le 1er producteur de pétrole d'Afrique et dispose des plus importantes réserves de gaz naturel du continent.
Le Nigéria compte 4 raffineries ayant une capacité totale de raffinage de 45,3 millions de tonnes par an(4). La Côte d’Ivoire, le Ghana, le Niger et le Sénégal possèdent également une raffinerie chacun, ayant une capacité allant de 1 à 3,8 millions de tonnes par an.
Gaz naturel
Le Nigéria dispose également des plus importantes réserves de gaz naturel en Afrique (2,7% des réserves prouvées dans le monde à fin 2013) devant l’Algérie. Le Nigéria a produit près de 36,1 milliards de m3 en 2013, soit près de 1,1% de la production gazière mondiale.
Au large du Ghana, le champ pétrolier de Jubilee, découvert en 2007, a commencé à être exploité en 2014. La Côte d'Ivoire possède également plusieurs champs gaziers offshore (notamment Gazelle) qui alimentent un marché essentiellement national. Le Sénégal produit aussi du gaz naturel mais dans de très petits volumes.
Depuis sa mise en service en 2011, le gazoduc de l'Afrique de l'Ouest (WAPCO), long de 678 km, est censé alimenter en gaz le Bénin, le Togo et le Ghana depuis le Nigéria. En pratique, l'approvisionnement est très irrégulier car le Nigeria doit faire face à une demande croissante en énergie au niveau national et n'exporte pas les quantités prévues. De plus, de nombreux actes de sabotage perturbent la continuité de l’approvisionnement.
Notons par ailleurs qu'un important gisement offshore a été découvert en janvier 2016 à la frontière du Sénégal et de la Mauritanie, au large de Saint-Louis. Ses réserves en sont estimées à 450 milliards de m3, ce qui en ferait le plus grand gisement d'Afrique de l'Ouest.
Hydraulique
L’Afrique de l’Ouest a un potentiel estimé à 25 000 MW dont le quart serait localisé en Guinée-Bissau. D’après une évaluation en 2007, seulement 16% de ce potentiel était exploité mais une vingtaine de grands projets sont actuellement à différents stades d’avancement dans la région. L’Organisation pour la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal (OMVS) a notamment été mise en place par le Mali, le Sénégal et la Mauritanie (hors Afrique de l’Ouest) pour développer la production hydroélectrique le long de ce fleuve. De nombreux projets sont par ailleurs à l’arrêt en raison d’un manque de financements.
L’Afrique de l’Ouest a un potentiel estimé à 25 000 MW dont le quart serait localisé en Guinée-Bissau.
Éolien
Un potentiel important existe sur les côtes sénégalaises et au Cap Vert. Sur les îles de Boa Vista, Sao Vicente, Sal et Santiago du Cap Vert, 35 éoliennes ont été installées au sein de 5 parcs. Elles fournissent près de 20% des besoins électriques du pays en 2014. Le potentiel éolien des autres pays de la région est nettement plus limité. Une concession pour le développement d’un parc éolien d’une puissance de 25 MW a été signée au Togo en 2012 mais n’a pour le moment pas été concrétisée sur le terrain.
Solaire
L’Afrique de l’Ouest dispose d’un important ensoleillement, évalué entre 5 et 7 kWh/m2/jour (soit près de 2 fois plus qu’en France) au Burkina Faso, au Mali, au Niger et au Sénégal ainsi qu’au Nord du Bénin et du Togo dans une moindre mesure. A l'heure actuelle, aucun projet d'envergure n'a pourtant vu le jour. L’abaissement des coûts et les progrès technologiques permettent cependant à de nombreux projets locaux de petite taille « hors-réseau » de se développer.
Ensoleillement de l'Afrique de l'Ouest (©Connaissance des Énergies d'après l'Ecowas Observatory for renewable energy and energy efficiency)
Zoom sur l’électricité
Les pays d’Afrique de l’Ouest disposent tous de réseaux de distribution d'électricité mais ceux-ci sont limités en matière de puissance raccordée et il existe peu d’interconnexions entre eux. En 2012, la capacité installée reliée aux réseaux électriques d’Afrique de l’Ouest atteignait seulement 20 GW (128,9 GW en France à fin 2014).
Plus de la moitié des capacités électriques en Afrique de l’Ouest provient de centrales à gaz, essentiellement situées au Nigéria. Les centrales au fioul comptent pour près de 30% de ces capacités et sont réparties de façon plus homogène en Afrique de l’Ouest. Enfin, près de 20% de ces capacités provient des barrages hydroélectriques.
La production électrique à partir des centrales à gaz devrait continuer à croître dans le futur en Afrique de l’Ouest tandis que les énergies renouvelables devraient progressivement augmenter leur contribution au mix électrique de la région. Notons que le mix électrique de l’Afrique de l’Ouest diffère de ceux des autres régions du continent : l’Afrique centrale exploite davantage ses ressources hydroélectriques tandis que la partie sud de l’Afrique mise essentiellement sur le charbon pour produire son électricité.
Évolution de la production d’électricité selon les différentes zones d’Afrique (©Connaissance des Énergies d'après l'Africa Energy Outlook de l'AIE)
Un MWh du réseau électrique ouest-africain coûte environ 140 dollars à produire(5). Selon l’IRENA (International Renewable Energy Agency), le coût associé à la production d’1 MWh par un générateur diesel peut parfois même monter jusqu’à 400 dollars(6).
Futur
D’après les projections de l’IRENA (International Renewable Energy Agency) sur le futur mix énergétique de l’Afrique, la part des énergies renouvelables pourrait augmenter de 50% d’ici à 2030 et de 73% d’ici à 2050 à l’échelle du continent. En Afrique de l’Ouest, le scénario de l’IRENA envisage une montée en puissance des grands barrages hydroélectriques (37% de la production d’électricité à l’horizon 2030) et de l’éolien (17%).
La composition des mix électriques varierait encore fortement d’un pays à un autre en Afrique de l’Ouest, avec des pays dépendant très fortement de l’hydroélectricité comme le Liberia et la Guinée (pays exportateur net d’électricité en 2030) et d’autres ayant un mix plus diversifié comme le Burkina Faso, le Bénin et le Togo (petite hydraulique, éolien, biomasse, nucléaire).
Quelques pays en chiffres
Acteurs majeurs
Créée en 1975, la Communauté Économique des États d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO)(7) regroupe les 15 pays d'Afrique de l'Ouest. Elle vise à encourager la coopération économique au niveau régional et aborde également les problématiques de stabilité régionale (lutte contre le terrorisme, prévention des épidémies, etc.) depuis 1990. Des institutions ont été créées par la CEDEAO afin de gérer des thématiques énergétiques, en particulier les questions d'accès à l'énergie dans la région :
- le Centre Régional pour les Énergies Renouvelables et l’Efficacité Energétique (CEREEC) dont le siège est situé au Cap Vert ;
- le Système d'Echanges d'Energie Électrique Ouest Africain (EEEOA) dont le siège est situé au Bénin ;
- l'Autorité de Régulation Régionale du secteur de l'Électricité (ARREC) dont le siège est situé au Ghana.
Ces différentes institutions facilitent les collaborations entre les opérateurs des différents réseaux et permettent l'émergence de schémas directeurs dans le domaine de l'énergie à un niveau régional.
Concrètement
D’après les données de l’AIE de 2014(8), la consommation d’électricité moyenne d’un habitant d’Afrique de l’Ouest est de moins de 200 kWh par an. A titre de comparaison, un Français consomme plus de 7 000 kWh par an en moyenne et un Américain plus de 13 000 kWh par an.
Le saviez-vous ?
D'après l’AIE, les vols de pétrole brut au Nigeria s’élèveraient à près de 150 000 barils par jour, ce qui représenterait un coût d’environ 5 milliards de dollars par an. Cette somme suffirait à financer l'accès à l'électricité pour toute la population du Nigeria d'ici à 2030.