La peinture des chercheurs du RMIT pourrait contribuer au développement du vecteur hydrogène. (©Pixabay)
En Australie, des chercheurs du Royal Melbourne Institute of Technology (RMIT) ont annoncé en juin avoir conçu une peinture capable d’absorber l’humidité ambiante pour produire de l’hydrogène. Explications.
Une « peinture semi-conductrice »
La peinture mise au point par les chercheurs australiens présente plusieurs caractéristiques lui permettant de produire de l’hydrogène de façon autonome. Comme le gel de silice (utilisé pour capter l’humidité, notamment dans l’alimentaire), la peinture absorbe la vapeur d’eau dans l’air. Elle capte également le rayonnement solaire qui permet de casser les molécules d’eau absorbées en hydrogène et en oxygène.
Associé à des oxydes de titane, le composant à base de sulfure de molybdène synthétique mis au point par les chercheurs fonctionne « comme un semi-conducteur ». Il permet la production d’hydrogène sans source extérieure d’électricité. Pour rappel, les deux procédés actuels les plus courants pour produire de l'hydrogène sont le reformage des combustibles fossiles à la vapeur d’eau et l'électrolyse de l'eau (qui nécessite de l’électricité et qui n'est donc rentable que si cette électricité est peu coûteuse).
Pour les chercheurs australiens, il reste notamment à préciser comment collecter l’hydrogène produit par leur peinture, « un des défis majeurs » à venir, reconnaît le Dr Torben Daeneke, chercheur principal du projet. Plusieurs approches sont envisagées à ce stade comme la possibilité d'ajouter des membranes au-dessus de la peinture ou d’« encapsuler » ladite peinture dans un contenant conçu à cette fin, ce qui conférerait au produit final une apparence proche de celle d’un panneau solaire(1).
Trois chercheurs travaillent aujourd'hui sur ce projet mais des expérimentations doivent associer 14 personnes au total en Australie et aux États-Unis selon Torben Daeneke. De nombreuses autres équipes de recherche ont actuellement pour projet de produire de l’hydrogène à partir d’eau mais la plupart d’entre elles utilisent de l’eau liquide qui doit être purifiée pour ne pas endommager le catalyseur. Torben Daeneke insiste à ce sujet sur l’intérêt d’avoir recours à la vapeur d’eau présente dans l’air, « naturellement très pure et qui peut être utilisée sans purification préalable ».
Au centre, la peinture mise au point par les chercheurs du RMIT qui a été déposée sur des morceaux de verre à gauche et à droite. (©RMIT)
Une utilisation bon marché en tout point du globe ?
La peinture « solaire » mise au point à Melbourne doit faire l’objet de nombreux tests en conditions réelles afin de confirmer les espoirs nés en laboratoire. Torben Daeneke évoque ainsi « le tout début d’un parcours » qui pourrait aboutir à un produit fini pour le grand public « dans plusieurs années ».
A ce stade, les chercheurs de Melbourne ne voient pas de barrières majeures au déploiement de leur peinture. Elle devrait être « très bon marché » selon Torben Daeneke, compte tenu des différents ingrédients utilisés : les oxydes de titane sont déjà couramment employés dans des peintures et le sulfure de molybdène devrait être « raisonnablement peu cher ».
La peinture pourrait être appliquée sur toute surface : mur, voiture, ouvrage, etc. Selon les chercheurs du RMIT, elle pourrait être employée en tout point du globe, dès lors que de la vapeur d’eau peut être récupérée dans l’air, y compris dans des zones où l’installation de panneaux photovoltaïques est aujourd’hui inadaptée, faute d’ensoleillement suffisant. La production d’hydrogène associée à cette peinture pose toutefois encore question : elle serait plus ou moins importante selon les régions. « Une maison en Scandinavie produira moins d’hydrogène qu’à Melbourne », confirme Torben Daeneke.
Les chercheurs du RMIT ne communiquent pas encore sur le rendement possible de leur peinture. D’après les premières estimations de Torben Daeneke, la peinture appliquée sur une maison pourrait produire « plusieurs litres d’hydrogène pur par jour ». L’hydrogène généré par la peinture pourrait ensuite être utilisé dans des piles à combustible, voire directement dans des moteurs à hydrogène selon les chercheurs du RMIT.