Composite à base d'hydrures de magnésium contenant 600 litres d'hydrogène (©McPhy)
La société grenobloise McPhy Energy, créée en 2008, travaille sur le stockage d’hydrogène sous forme solide. Sa technologie permet notamment de stocker des surplus d’électricité grâce à des installations combinant la production d’hydrogène et son stockage à basse pression.
L’hydrogène absorbé par du magnésium
S’appuyant sur des travaux du CNRS (Institut Néel), McPhy Energy a développé une solution de stockage de l’hydrogène sous forme d’hydrures métalliques, c'est-à-dire de composés chimiques d’hydrogène avec un métal ou un alliage métallique. Certains métaux présentent la propriété de former des liaisons réversibles avec des atomes d’hydrogène. C’est le cas du palladium, du vanadium ou encore du magnésium qui a été retenu par la PME grenobloise comme principal matériau combiné à l’hydrogène.
Le magnésium est broyé en une poudre fine afin d'obtenir des cristaux d’une dizaine de nanomètres (1 nm = 10-9 m) offrant une plus grande surface de contact avec l’hydrogène. Des additifs y sont ajoutées afin d’accélérer le processus d'hydrogénation et de déshydrogénation du magnésium qui ne dure alors que quelques minutes. Les atomes d’hydrogène sont « absorbés » ou « désorbés » (c'est-à-dire se détachent des cristaux) en fonction de la température et de la pression du milieu. L’absorption s’effectue à une pression de 10 bars et la désorption à une pression de 2 bars. La réaction d’absorption dégage de la chaleur qui est captée pour ne pas bloquer la réaction(1). Elle est restituée ultérieurement pour faciliter la désorption de l’hydrogène. Le stockage est totalement réversible et la quasi-intégralité de l’énergie hydrogène stockée est récupérée au terme du processus(2).
Concrètement, l’hydrogène est ainsi stockée sous la forme de pastilles d’hydrures de magnésium (MgH2) de 30 centimètres de diamètre contenant chacune 600 litres d’hydrogène. Ces pastilles sont conditionnées dans des réservoirs cylindriques recouverts d’une couche d’isolant thermique.
Pour quelles applications ?
Certains industriels utilisent dans leurs procédés d’importantes quantités d’hydrogène (pour ses propriétés chimiques), par exemple dans les usines d’ammoniac et dans les raffineries de pétrole. Le stockage d’hydrogène constitue pour eux une alternative à l’approvisionnement sous forme d’hydrogène comprimé (à plusieurs centaines de bars) ou liquéfié (à une température de -253°C). La technologie du stockage sous forme solide présente un avantage en termes de sécurité dès lors qu’elle nécessite des pressions faibles. De plus, la densité volumique atteinte sous cette forme est de 106 kg d’hydrogène par m3 contre 70 kg/m3 sous forme liquide et 42 kg/m3 sous forme de gaz comprimé (à 700 bar).
La technologie développée par McPhy Energy constitue surtout une voie prometteuse pour le marché de l’hydrogène énergie (hydrogène utilisé pour son contenu énergétique et le stockage). Elle pourrait faciliter la gestion des réseaux électriques basée sur un équilibre entre production et consommation de plus en plus complexe : le développement des énergies renouvelables intermittentes rend des volumes d’électricité disponibles à des moments où la demande n’est pas forcément présente. De plus, les variations de la demande sont de plus en plus fortes, la pointe électrique atteignant en particulier des niveaux record depuis plusieurs années. Les surplus d’électricité sur le réseau peuvent être valorisés pour produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau, puis restitués au réseau grâce à une pile à combustible. L’électricité n’est alors plus perdue ou « fatale ». Notons que d’autres hydrures métalliques que ceux de magnésium peuvent être employés pour des applications particulières comme le stockage embarqué pour les transports.
McPhy Energy a déjà conclu des contrats avec de grands électriciens comme Enel en Italie et E.ON dans le nord-est de la France. La société a récemment racheté l’italien Piel qui dispose de près de 3 000 électrolyseurs en service dans le monde. Elle a d’autre part reçu une dotation de 5 millions d’euros du Fonds Écotechnologies, un fonds de la Caisse des dépôts à destination des PME innovantes dédiées aux technologies vertes.