L'année 2022 a été marquée par de nombreuses crises représentant autant de défis pour contenir la hausse des émissions de CO2 : conditions météorologiques « extrêmes », arrêt de centrales nucléaires, recours accru à des centrales à combustible fossile, etc. (©Equinor-Ole Jørgen Bratland)
« La fenêtre d'une voie crédible vers la limitation du réchauffement à 1,5 °C à l'horizon 2100 se referme rapidement », souligne sans surprise l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Mais cette dernière met en avant « 4 piliers pour agir durant les années 2020 », dans un nouveau rapport (accessible en bas de cet article) publié en amont de sommets majeurs à l'image de la COP28 à l'automne prochain.
Le contexte
En 2022, les émissions mondiales de CO2 liées à l'énergie ont atteint un nouveau pic historique (36,8 milliards de tonnes), rappelle l'AIE en préambule de son nouveau rapport. Malgré une croissance quasi ininterrompue de ces émissions, hors crise majeure, l'AIE estime que « la baisse des coûts des technologies énergétiques propres et les nouvelles politiques peuvent déjà réduire de 1 °C le réchauffement projeté d'ici à 2100 » par rapport aux scénarios présentés avant la COP21 de Paris en 2015.
Si l'ensemble des engagements annoncés dans le monde pour lutter contre le réchauffement climatique (notamment en matière de neutralité carbone) sont respectés « intégralement et dans les temps », la hausse moyenne des températures pourrait théoriquement être contenue à 1,7°C, assure l'AIE. Encore faudrait-il que lesdites politiques annoncées soient mises en œuvre en atteignant les objectifs associés.
Les « 4 piliers » soulignés par l'AIE pour agir
L'AIE pose comme condition préalable d'une « voie crédible vers les 1,5°C » l'atteinte de la neutralité carbone dans le secteur énergétique d'ici à 2050, en s'appuyant sur une décarbonation de la production d'électricité, l'électrification de nos mix énergétiques et l'amélioration de l'efficacité énergétique.
Ce scénario de neutralité carbone exigerait entre autres, selon l'Agence, de tripler le rythme des installations annuelles de capacités électriques renouvelables dans le monde d'ici à 2030 (par rapport au niveau de 2022)(1) ou de porter la part de marché des ventes de voitures électriques « à 60% à l'horizon 2030 contre 14% en 2022 ».
Pour rappel, et malgré le développement rapide des filières renouvelables, le charbon reste de très loin la principale source d'électricité dans le monde à l'heure actuelle (35,7% de la production en 2022, avec une part importante de centrales récentes en Asie).
Par ailleurs, l'AIE souligne que son scénario de neutralité carbone exigerait d'atteindre des gains d'efficacité énergétique de plus de 4% par an d'ici à 2030 (contre environ 2% en 2022). En l'absence de ces nouveaux gains d'efficacité énergétique, « la taille du système énergétique mondial serait 20% plus grande en 2030, ce qui équivaudrait à ajouter la consommation d'énergie de la Chine d'aujourd'hui », avertit l'AIE.
Hors secteur énergétique, l'AIE prône par ailleurs d'intensifier les actions autour de 3 autres grands « piliers » pour limiter le réchauffement climatique :
- « stopper et inverser le recul des forêts et la dégradation des terres d’ici à 2030 » conformément à la Déclaration des dirigeants de Glasgow sur les forêts et l'utilisation des terres(2) ;
- réduire les émissions de gaz effet de serre hors CO2, « en atteignant ou en dépassant les engagements comme l'Amendement de Kigali sur les hydrofluorocarbones(3) ou le Global Methane Pledge(4) » ;
- augmenter significativement les capacités de captage et de stockage de CO2 (y compris directement dans l'atmosphère) « pour compenser les émissions résiduelles difficiles à réduire » : les projets devraient être en mesure de capter 1,2 milliard de tonnes de CO2 d'ici à 2030 (contre environ 0,3 milliard de tonnes selon les prévisions actuelles à cet horizon et près de 40 millions de tonnes en 2022).