Acceptabilité sociale et « NIMBY » : de quoi s'agit-il ?

Eolienne et maison

En France, les éoliennes ne peuvent être installées à moins de 500 m de zones habitables(1). (©photo)

L'acronyme NIMBY vient de l'anglais « Not In My Backyard », que l'ont peut traduire en français par « pas dans mon arrière-cour » ou « pas dans mon jardin ».

Définitions

Le sigle NIMBY désigne l’attitude d’une personne ou d’un groupe de personnes qui refusent l’implantation dans leur environnement proche d’une infrastructure. Par extension, ces personnes sont qualifiées de manière péjorative de « NIMBY » ou parfois de « nimbistes ».

Elles ne sont pas nécessairement hostiles à l’infrastructure en tant que telle mais n’acceptent pas que celle-ci puisse modifier leur environnement (désagréments d’ordre environnemental, social ou encore esthétique).

Terminologie employée dès les années 1980 aux États-Unis qui s'est fortement développé au cours des années 1990, le qualificatif « NIMBY » illustre l’affirmation croissante de droits individuels et des collectivités locales face à l’État : l’individu souhaite profiter des avancées technologies qui bénéficient à la collectivité, mais refuse que l’intérêt général nuise à une partie de son bien-être.

Autres acronymes

D’autres acronymes sont employés pour designer des attitudes plus tranchées encore que NIMBY : « NIABY » (« Not in Anybody's Back Yard), « BANANA » (Build Absolutely Nothing Anywhere Near Anyplace, « Ne construire absolument rien nulle part près d’aucun lieu » en français) ou « NOPE » (Not on Planet Earth, « Pas sur la planète Terre » en français).

Traduction française à privilégier : « Napi »

La Commission d'enrichissement de la langue française du ministère de la Culture recommande des équivalents français aux termes NIMBY et NIABY(2) :

  • Napi (« non au projet ici »), à la place de NIMBY, ;
  • Nina (« ni ici, ni ailleurs »), à la place de NIABY.

Un qualificatif parfois utilisé pour décrédibiliser des oppositions

Le recours à l'acronyme NIMBY fait l'objet de critiques, « du fait de son utilisation à des fins scientifiques et de la mention d'un "syndrome" NIMBY qui tend à transformer une logique d'action collective en pathologie », rappelle Fabrice Hamelin, Professeur de sociologie, Institut d'études politiques de Fontainebleau-UPEC(3

Autrement dit, cette appellation peut « servir alors moins à qualifier un mouvement qu'à disqualifier les opposants à un projet, sans que la pertinence et le caractère d'intérêt général du projet soient remis en cause ».

Le « syndrome » NIMBY est d'ailleurs assimilé à une forme d’égoïsme.

Nuance entre acceptabilité sociale et phénomène NIMBY

Les références à « l'acceptabilité sociale », notamment de projets énergétiques, sont plus récentes que celles au phénomène Nimby et « directement liées à l'expansion du champ des controverses et des contestations », explique Fabrice Hamelin(3).

Il s'agit d'un « concept plus riche que le phénomène NIMBY, auquel on s'efforce pourtant de le réduire » : NIMBY désigne des oppositions motivées par des raisons individuelles mais pas nécessairement au projet ciblé en tant que tel., tandis que « l'(in)acceptabilité sociale pourrait être assimilée au phénomène BANANA » (ne construire absolument rien nulle part).

« Dans le cadre du phénomène NIMBY, les opposants ont connaissance de l'intérêt collectif du projet envisagé. Ils s'y opposent, parce que sa mise en œuvre effective détériorait leur bien-être individuel. La logique en est simple : tout aménagement crée des nuisances pour les riverains les plus proches et suscite la controverse », précise Fabrice Hamelin. 

Raisons des oppositions de type Nimby 

Le phénomène NIMBY attire l'attention sur le fait « qu'être directement concerné, exposé ou impacté, par une décision publique, constitue un élément déclencheur de mobilisations à l'encontre de décisions publiques à impact environnemental », souligne Fabrice Hamelin.

Toutes les sources d’énergie sont susceptibles de rencontrer au niveau local ces réactions de type NIMBY qui peuvent se cristalliser sur des craintes diverses : « mitage du paysage », pollution sonore, dangerosité supposée, etc.

Le phénomène NIMBY « relève moins d'une montée des égoïsmes que de l'affirmation d'un intérêt territorial et du déplacement des frontières entre intérêt général et intérêts particuliers », précise Fabrice Hamelin. 

Infrastructures ciblées

Toutes les infrastructures énergétiques peuvent être ciblées par des protestations de type NIMBY, qui ont augmenté avec la décentralisation des productions d'énergie. 

En France, les projets éoliens ont été particulièrement la cible de ces réactions. Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) indique d'ailleurs dans un avis de 2022(4) consacré à l'acceptabilité de nouvelles infrastructures, accorder une « attention particulière aux parcs éoliens terrestres, qui cumulent le plus de motifs de blocage, même si d’autres types d’EnR (éolien en mer, parcs photovoltaïques et méthaniseurs) sont étudiés ».

Toutefois, selon une enquête d'opinion de 2024(5) de France renouvelables, l’association porte-parole des énergies renouvelables électriques, « 79% souhaitent voir les énergies renouvelables se développer en France » et à l’affirmation « Votre région devrait être plus ambitieuse dans le développement des énergies renouvelables », seuls 8% des Français répondent « non ».

Démocratie participative et moyens de renforcer l'acceptabilité

L'acceptabilité constitue un enjeu central de la transition énergétique. Or, « en général, on veut plus d’énergie renouvelable, mais pas près de chez soi », constate le Premier ministre Jean Castex, dans un discours au CESE en septembre 2021.

Outre les débats publics, une participation active des riverains aux projets d'infrastructures (par exemple avec une possibilité de participation financière) doit contribuer à renforcer la confiance des citoyens dans lesdits projets. Pour modérer les oppositions locales, des indemnisations des riverains sont parfois prévues, comme lors de la pose de lignes haute tension pour « préjudice visuel ».

Le CESE souligne « le rôle de la démocratie participative et l’importance d’une gouvernance partagée des projets locaux pour une meilleure acceptabilité ». Avec une mise en garde comme corolaire : « Quand la population comprend que sa participation n’a pas d’effet sur le projet, le processus s’enraye ».

L'anticipation des oppositions est également un pont central : « Quand aucun autre processus n’est imposé par le code de l’environnement, le CESE préconise qu’une concertation préalable aux projets d’énergies renouvelables (EnR) soit organisée par les porteurs de projet, pour anticiper et résoudre de futurs blocages. C’est en effet à ce stade que la participation du public peut agir sur les contenus et alternatives au projet ».

Parmi les arguments qui rendraient les Français « encore plus favorables à l’installation d’un parc éolien ou photovoltaïque près de chez eux », France Renouvelables souligne que « la possibilité de bénéficier d’un tarif préférentiel sur l’électricité arrive en tête (63% sont en accord avec cette idée) ». Suivent la perspective de recettes fiscales supplémentaires pour leur commune permettant d'améliorer les services publics locaux (54%) et l’accès à des aides financières, pour la rénovation énergétique de leur logement ou pour l’achat d’un véhicule électrique (48%).

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