Selon ExxonMobil, le pétrole et le gaz naturel pourraient encore satisfaire près de 57% des besoins mondiaux en énergie primaire en 2040. (©ExxonMobil)
Près de 2 mois après la COP21, ExxonMobil a rendu public en début de semaine son « Outlook for Energy » de 2016(1) dans lequel le groupe présente ses projections sur l’évolution du mix énergétique mondial d’ici à 2040. Selon la « major » américaine, le poids des énergies fossiles devrait peu baisser dans les 25 ans à venir.
78% d’énergies fossiles en 2040 ?
En 2014, près de 82% de la demande d’énergie primaire dans le monde est satisfaite par les énergies fossiles, le pétrole étant la première source d’énergie consommée (34%). Les énergies renouvelables satisfont pour leur part un peu plus de 13% des besoins énergétiques mondiaux, principalement sous forme de biomasse, tandis que le nucléaire fournit les 5% restants.
Selon les dernières estimations d’ExxonMobil, ces proportions devraient peu évoluer à l’horizon 2040 : les consommations d’énergies renouvelables et nucléaire devraient certes augmenter rapidement (et leurs parts s’élever respectivement à hauteur de 15% et 8% du mix de consommation mondial) mais les énergies fossiles fourniront encore 78% des besoins mondiaux selon le groupe américain. La consommation de gaz naturel pourrait en particulier augmenter de 50% et compter pour 26% du mix énergétique mondial en 2040, derrière le pétrole (32%).
Certains objecteront à raison que cette publication d’ExxonMobil sert d’outil de planification aux investissements du groupe et qu’il serait étonnant d’y trouver l’annonce du déclin des hydrocarbures. Notons toutefois que l’AIE a également fait état en novembre dernier de prévisions assez similaires, estimant que le mix énergétique mondial pourrait encore reposer aux trois quarts sur les énergies fossiles en 2040.
Des besoins énergétiques en hausse
D’ici à 2040, la consommation d’énergie pourrait augmenter de 26% selon ExxonMobil. Cette croissance proviendrait à 40% des géants asiatiques, à savoir la Chine (+32% entre 2014 et 2040) et l’Inde (+86%). Les besoins énergétiques de l'Afrique devraient également très fortement augmenter (+83%) en raison du rattrapage économique de ce continent mais surtout de sa croissance démographique attendue (+75% d’ici à 2040).
La consommation énergétique des pays de l’OCDE devrait quant à elle diminuer (-2%), en particulier dans l’Union européenne (-11%) dont les besoins en énergie primaire avoisineront ceux de l’Afrique en 2040.
Consommation d’énergie primaire dans le monde par source d'énergie en 2014, 2025 et 2040 (©Connaissance des Énergies)
Le charbon, encore première source d’électricité mondiale
Parmi les énergies fossiles, seule la consommation de charbon reculera très légèrement d’ici à 2040 selon ExxonMobil (-4%). Cette énergie restera toutefois de loin la première source d’électricité dans le monde d’après les prévisions du groupe (34% du mix de production électrique en 2040). Au niveau mondial, la consommation d’électricité pourrait augmenter d’environ 65% entre 2014 et 2040 et de 85% dans les pays hors OCDE.
Production d’électricité dans le monde par source d'énergie en 2014, 2025 et 2040 (©Connaissance des Énergies)
Une vision difficilement compatible avec les engagements de la COP21...
L’intensité énergétique dans le monde, c’est-à-dire la consommation d’énergie par unité de PIB, pourrait diminuer de plus de 40% d’ici à 2040 grâce aux gains d’efficacité énergétique selon ExxonMobil. Toutefois, compte tenu du mix énergétique envisagé par ExxonMobil et en considérant que la population mondiale pourrait augmenter de 2 milliards d’habitants d’ici à 2040, l’équation des émissions de gaz à effet de serre face au changement climatique semble difficile à résoudre.
Selon cet « Outlook for Energy », les émissions mondiales de CO2 liées à la combustion d’énergie pourraient augmenter de 11,3% d’ici à 2040 pour atteindre 36,4 milliards de tonnes à cet horizon. Dans les pays en développement (hors OCDE) à la forte démographie, la hausse de ces émissions pourrait atteindre 31,7%.
Rappelons que, selon les estimations du GIEC, il faudrait limiter l'ensemble des émissions mondiales de gaz à effet de serre (incluant notamment les émissions de méthane et pas uniquement les émissions de CO2 liées à l’énergie) à environ 1 000 milliards de tonnes équivalent CO2 d'ici la fin du siècle pour limiter le réchauffement climatique à 2°C(2), ce qui correspond approximativement à 20 ans d’émissions mondiales au rythme actuel.
Pour respecter cet objectif entériné lors de la COP21, il faudrait concrètement que ces émissions soient réduites de 40% à 70% d’ici à 2050 par rapport au niveau de 2010. Selon le scénario de l'AIE compatible avec cet objectif, cela implique de réduire la part des énergies fossiles dans le mix énergétique mondial à un maximum de 60% en 2040(3).