La Suède veut devenir l’un des premiers pays « sans énergies fossiles »

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Stockholm

Stockholm (©Ola Ericson/imagebank.sweden.se)

La ministre suédoise pour le Développement et la Coopération Nordique Kristina Persson, souvent appelée « ministre du Futur », a annoncé mi-novembre que son pays comptait se passer des énergies fossiles(1) à moyen terme. L’horizon de temps n’est pas clair mais l’expression « fossil free society » revient fréquemment dans les discours des Suédois. Explications.

Un mix énergétique déjà très « décarboné »

La Suède est le quatrième plus grand pays de l’Union européenne (près de 450 000 km2) après le Danemark (en y incluant le Groenland), la France et l’Espagne. Avec environ 22 habitants au km2, elle bénéficie d’une très faible densité démographique (la densité avoisine 100 habitants au km2 en France) et de ressources énergétiques exceptionnelles. Près de 65% de son territoire est notamment couvert de forêts et la biomasse est la principale source d’énergie du pays devant le pétrole lorsque l’on additionne sa consommation « directe » et sa contribution à la production d’électricité et de chaleur dans les réseaux urbains.

Mix énergétique et électrique de la Suède

Au total, la biomasse satisfait près d'un tiers des besoins énergétiques de la Suède (consommation directe, dans les réseaux de chaleur et sous forme d'électricité). (©Connaissance des Énergies)

La Suède a entamé sa transition énergétique dès le premier choc pétrolier de 1973. La consommation de produits pétroliers dans ce pays a depuis été divisée par 2 grâce à l’électrification du pays et au fort développement des énergies renouvelables dans les réseaux de chaleur.

La production électrique de la Suède est « décarbonée » à près de 97%, essentiellement grâce aux énergies nucléaire (la Suède dispose d’un parc de 10 réacteurs) et hydraulique (plus de 2 000 centrales hydroélectriques). Les réseaux de chaleur sont pour leur part « chauffés » à près de 60% à partir de biomasse et ne dépendent plus qu’à 2,7% des produits pétroliers en 2013 (contre 98% en 1970).

Une nouvelle révolution mêlant « innovations et renouvelables »

La Suède a réussi à réduire de 60% son intensité énergétique (consommation d’énergie par point de PIB) entre 1970 et 2012. Cette intensité reste toutefois encore supérieure de 27% à celle de la France en raison de l’importance des industries « intensives en énergie » du pays nordique (acier et papier).

Lundi dernier lors du Leaders Event ouvrant la COP21, le Premier ministre suédois Stefan Löfven a néanmoins rappelé que l’industrie avait été et serait encore « moteur de changements » dans ce pays. Ce changement doit aujourd’hui reposer selon lui sur les énergies renouvelables et privilégier les innovations. Dans son intervention, il a ainsi comparé la cellule photovoltaïque et les moyens de stockage nécessaires pour pallier son intermittence à la machine à vapeur.

Le Premier ministre a également rappelé que son pays s’était fixé comme objectif de « sortir des énergies fossiles ». L’horizon n’est pas arrêté mais le gouvernement voit cet objectif comme un impératif, y compris pour des raisons économiques : les entreprises suédoises doivent être incitées à développer des produits « décarbonés » pour conquérir de nouveaux marchés à l’export.

Les transports, principal défi de la « décarbonation » suédoise

La Suède peut d’ores et déjà s’appuyer sur la bonne performance énergétique de son secteur des bâtiments. Selon une étude de Global Chance de novembre 2014, les logements suédois consommeraient presque moitié moins d’énergie en chauffage par m2 que les logements français « à climat identique ». Le climat y est évidemment plus rude que dans l’hexagone, ce qui explique que les besoins de chauffage par logement soient approximativement les mêmes dans les deux pays.

Le grand chantier de la Suède concerne aujourd’hui les transports qui sont à l’origine de 45% des émissions de CO2 du pays. La perspective d’éliminer les énergies fossiles des transports routiers d’ici à 2030 a été évoquée dans le passé. Du côté des négociateurs suédois à la COP21, on parle « plutôt d’une vision mais pas de cibles ». Une commission parlementaire discute actuellement des objectifs plus précis du pays pour qu’il puisse devenir l’un des premiers pays à se passer des énergies fossiles.

Pour rappel, la contribution de l’Union européenne dans le cadre de la Conférence Climat (INDC) fixe un objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40% d’ici à 2030 par rapport à 1990. Cet objectif doit être traduit en objectifs nationaux l’an prochain et il sera bien plus élevé en Suède qui constitue un bon élève des politiques européennes de développement durable à l’image du paquet Energie-Climat. Ce dernier fixe entre autres un objectif d’au moins 20% d’énergies renouvelables dans la consommation d’énergie finale des États membres de l’Union européenne d’ici à 2020. Selon les dernières statistiques d’Eurostat, seuls 3 pays sont en avance sur leurs objectifs : la Bulgarie, l’Estonie et la Suède.

Centrale hydroélectrique d'Akkats

Centrale hydroélectrique d'Akkats dans le nord de la Suède (©Vattenfall)

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