L'individualisation des frais de chauffage vise à encourager les ménages à mieux maîtriser leurs consommations. (©photo)
L’obligation de répartition des frais de chauffage dans les immeubles collectifs entre en vigueur aujourd’hui pour les plus énergivores d’entre eux. Rappels sur ce dispositif qui n’est pas encore mis en œuvre dans de nombreux bâtiments et qui fait encore débat.
Une obligation fixée par la loi de transition énergétique
Ce n’était pas la plus médiatisée des mesures prévues par la loi de transition énergétique pour la croissance verte adoptée à l’été 2015 (articles 26 et 27 de la loi(1)). Mais la généralisation du dispositif d’individualisation des frais de chauffage dans les immeubles équipés d’un chauffage commun (à tout ou partie de logements ou locaux privatifs) devrait avoir un impact très concret pour de nombreux ménages français.
Les bâtiments chauffés collectivement sont tenus d’installer des appareils de mesure permettant de déterminer la quantité de chaleur consommée dans chaque logement (répartiteurs électroniques placés sur chaque radiateur ou compteur d’énergie thermique à l’entrée du logement). Cette obligation doit permettre de responsabiliser davantage les différents consommateurs en basant leurs factures de chauffage sur l’énergie consommée et non sur la surface du logement ou la quote-part détenue dans la copropriété.
L’obligation d’individualisation des frais de chauffage s’applique au 31 mars 2017 aux immeubles les plus « énergivores » dont les consommations de chauffage excèdent 150 kWh par m2 par an(2). Selon le ministère en charge du logement, près de 1,8 million de logements sont concernés mais moins de la moitié d’entre eux auraient effectivement installé des compteurs individuels à ce jour(3).
Le dispositif sera progressivement étendu : il doit être déployé dans les immeubles consommant entre 120 kWh/m2/an et 150 kWh/m2/an d’énergie liée au chauffage avant le 31 décembre 2017 (600 000 logements concernés). Les immeubles restants auront jusqu’au 31 décembre 2019 pour individualiser leurs frais de chauffage (2 millions de logements concernés).
Notons que la réglementation prévoit que ce dispositif ne s’applique pas aux bâtiments où il est « techniquement impossible » à mettre en place(4) ou « excessivement » coûteux en raison de la modification de l’installation de chauffage nécessaire (l'obligation ne concerne pas non plus les établissements d’hôtellerie et les logements-foyers(5)).
Les coûts et la fiabilité des appareils de mesure en question
Les factures de chauffage ne seront pas totalement individualisées avec la nouvelle obligation. Il est en effet prévu de conserver pour ces dépenses de chauffage une part fixe de 30%. Il est également possible d’intégrer des coefficients de correction visant à prendre en compte les situations « thermiquement défavorables » de certains logements (disposant d’un faible ensoleillement ou souffrant de déperditions thermiques importantes, par exemple au dernier étage).
Selon l’Ademe, l’individualisation des frais de chauffage pourrait permettre in fine de réaliser 15% d’économies d’énergie sur ce poste. Selon le Syndicat de la Mesure, qui regroupe les entreprises en charge du travail d'équipement, les appareils de mesure coûteront « moins de 40 euros par an et par logement », ce prix incluant l'installation, la gestion et la maintenance desdits appareils. L’installation des appareils est éligible au crédit d’impôt pour la transition énergétique (plafonné à 30% des dépenses engagées pour l’achat des équipements).
La mesure reste toutefois critiquée par plusieurs associations, notamment de défense des consommateurs, qui la trouvent coûteuse par rapport à l'efficacité attendue et mettent en cause la fiabilité des répartiteurs de chauffage sur des réseaux vétustes(6). La mesure pourrait être fréquemment faussée, qu'elle soit surévaluée ou sous-évaluée, selon l’Association des responsables de copropriété (ARC) qui appelle à mettre en place d’autres solutions « mieux adaptées et plus économiques pour inciter les ménages à la maîtrise de leurs consommations d’énergie »(7). Le Syndicat de la Mesure met pour sa part en avant les millions de logements déjà équipés de tels compteurs dans d’autres pays européens.
Rappelons que le chauffage compte pour près de 62% des consommations d’énergie dans l’habitat en France. Pour bénéficier d'un bon confort dans son logement tout en maîtrisant sa consommation, l’Ademe recommande de limiter à 19°C la température dans les pièces à vivre et à 16°C dans les chambres et les pièces peu occupées(8).