Centrale géothermique

Centrale géothermique (©Pixabay-WikiImages)

Définition et catégories

La géothermie, du grec Géo (la terre) et Thermos (la chaleur) désigne à la fois la chaleur terrestre et son exploitation par l’homme.

La chaleur terrestre provient, pour l’essentiel (80-90%) de la désintégration radioactive dans les roches constituant la terre des atomes fissiles (uranium, thorium, potassium) qu’elles contiennent. Le reste (10%) est le reliquat de la chaleur de formation initiale, il y a 4,5 milliards d’années.

L’écorce terrestre est solide et peu conductrice. A sa base, elle flotte sur le manteau supérieur liquide très chaud (1 000 - 1 200°C). En surface, dès une faible profondeur (10 m), le sol est presque partout à une température stable d’environ 15°C. La croûte continentale (épaisseur de 30 à 70 km) et le plancher océanique (5 à 10 km) s’échauffent en moyenne d’environ 3 à 4°C par 100 mètres de profondeur. Ce gradient correspond au différentiel de température qui fait de l’écorce terrestre une source d’énergie. Dans les régions de fracture de l’écorce, cet échauffement peut atteindre des valeurs nettement supérieures (volcanisme ≥ 10°C par 100 m).

La géothermie exploite le différentiel thermique de l’écorce terrestre pour en extraire de la chaleur utilisable par l’homme. On distingue trois types :

Fonctionnement technique ou scientifique

La géothermie, grâce à la tomographie sismique, a identifié la composition et la température des couches constituant la Terre, le long de son rayon de 6 371 km. Elle est successivement composée de :

  • un noyau solide au centre (Fer-Nickel, de densité 13), de 1 200 km de rayon et de température supérieure à 5 000°C ;
  • une couche liquide métallique, d’une épaisseur de 2 300 km et d’une température moyenne de 4 000°C (de 5 100 à 3 500°C). Les mouvements de convection et de rotation de cette énorme masse métallique liquide sont à l’origine du champ magnétique terrestre (effet dynamo) ;
  • un manteau ductile constitué de deux couches :
  • le manteau inférieur, solide et élastique, épais de 2 250 km, de température décroissant de 3 500 à 2 000°C ;
  • le manteau supérieur, plastique et liquide, au contact de l’écorce terrestre (décroissant de 2 000 à 1 000°C).
     
  • une écorce solide, flottant sur le manteau supérieur (1 000°C), fracturée en plaques mobiles constituant :
  • le plancher océanique (70% de la surface terrestre, épaisseur de 5 à 10 km) ; 
  • la croûte continentale  (30%, épaisseur de 30 à 70 km).

Le manteau constitue 84% du volume de la Terre, le noyau 15%, l’écorce terrestre 1%. La transition croûte-manteau s’appelle la discontinuité de MOHO. En 2010, malgré un forage record à 12 km, MOHO (la limite entre la croûte terrestre et le manteau supérieur) n’a pas encore été atteinte. L’homme ne peut donc aujourd’hui capter la chaleur terrestre en provenance du manteau, qu’entre le sol et les premiers kilomètres de l’écorce.

L’écorce terrestre est d’une extrême variété en épaisseur, en nature de roches (sédiments, basaltes, granites…) et en gradient thermique, d’où la diversité des techniques géothermiques pour en extraire la chaleur. Parmi ces modes d’exploitation :

  • la géothermie profonde va forer à plusieurs kilomètres pour trouver des nappes aquifères ou des roches sèches brûlantes dont on tirera de la vapeur sous haute pression, directement utilisable pour entraîner des turbines et produire de l’électricité. Les techniques d’exploration et d’exploitation seront donc directement dérivées de celles des pétroliers. On privilégiera les zones de failles ou de rift, en bordure de plaques. Mais on ne sait pas aujourd’hui forer au-delà de quelques kilomètres. La chaleur terrestre profonde reste encore largement hors de portée. La production d’électricité géothermale est ainsi marginale avec une puissance installée totale dans le monde de 11,7 GWe en 2012(1), dont notamment 29% aux États-Unis et 16% aux Philippines ;
  • la géothermie à moyenne et basse énergie s’intéresse aux nappes aquifères de températures intermédiaire (30 à 150°C) inapte à la production électrique mais utilisable directement pour le chauffage urbain par des réseaux de chaleur géothermique. En France, les régions Aquitaine et Île-de-France ont développé cette filière pour chauffer près de 200 000 logements ;
  • la géothermie à très basse énergie exploite la chaleur superficielle du sol. A dix mètres de profondeur, sa température est couramment de l’ordre de 15°C, grâce à la fois à la chaleur terrestre et à l’énergie solaire, en particulier celle qui est stockée dans l’eau de pluie s’infiltrant vers les nappes phréatiques. Cette chaleur à basse température peut être extraite de ces nappes, ou du sol, par des pompes à chaleur couplées à des capteurs. Ce procédé est adaptée au chauffage (et à la climatisation) des logements individuels.

Enjeux par rapport à l'énergie

La géothermie est la seule énergie qui soit à la fois quasi-inépuisable, omniprésente, stable et propre. Sa faible accessibilité en restreint cependant drastiquement l’emploi.

Dans ses deux applications majeures, la production d’électricité et de chaleur, la géothermie est donc encore aujourd’hui marginale, loin derrière les énergies fossiles et d'autres énergies renouvelables telles que l'hydroélectricité, le solaire photovoltaïque ou encore l'éolien).

  • En production électrique mondiale, la puissance totale installée est d’environ 11,7 GWe en 2012 avec une production de près de 72 TWh, soit près de 0,3% de la production électrique mondiale(2).
  • En production directe de chaleur, la puissance fournie serait de 66 GWth en 2012(3), ce qui correspond à une production équivalant à près de 150 TWh/an.

Les deux filières seraient en nette croissance (+5% par an) grâce à la progression des techniques de prospection et de prélèvement (forages profonds en particulier offshore, doublet géothermal, pompes à chaleur), et aux soutiens financiers des États (soutien lié, dans le cas de la France, au Grenelle de l’Environnement).

Acteurs majeurs

Les principaux pays producteurs d’électricité d'origine géothermique se trouvent dans des régions volcaniques situées aux frontières des plaques (ceinture de feu Pacifique, arcs antillais et méditerranéen, rift africain). On trouve en tête les États-Unis (29% de la puissance mondiale installée, essentiellement dans l’ouest), puis les Philippines (16%), l’Indonésie (11%), le Mexique (8,5%). Suivent l'Italie, la Nouvelle-Zélande, l'Islande et le Japon. La France ne dispose, pour la production d'électricité géothermique, que de la centrale de Bouillante en Guadeloupe, et un projet en Alsace (Soultz-sous-Forêts).

Au moins 78 pays produisent de la chaleur d'origine géothermique en 2012. La Chine, les États-Unis, la Suède, la Turquie, l'Islande et le Japon sont les principaux producteurs.

En France, l’Ademe (Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie) et le BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières) sont les deux EPIC chargés de la promotion de la géothermie, en particulier individuelle, en coopération avec EDF.

L’Île-de-France, qui exploite le DOGGER, réservoir d’eau chaude situé sous le Bassin parisien, a la plus forte densité au monde de géothermie exploitée pour l’industrie et le chauffage urbain.                                  

Unités de mesure et chiffres clés

Unités

  • En géothermie, les quantités de chaleurs sont couramment exprimées en mégawattheure thermique (MWth) qui vaut 3,6×103 mégajoules. On le relie aux énergies fossiles par la tep (tonne équivalent pétrole) qui vaut 11 MWh thermiques.
  • Le watt électrique est à distinguer du watt thermique, le rendement d’une conversion thermique-électrique dépassant rarement 30%.

En France, la puissance électrique installée des installations géothermiques est de 16,5 MW, ce qui correspond à une production de 89 GWh en 2010(4).

Zone de présence ou d'application

  • La géothermie profonde se développe naturellement dans les pays situés dans les zones de fracture des plaques de la lithosphère (dorsales et rift) où le gradient thermique est élevé, nécessitant des forages moins profonds (ex : ouest des États-Unis, Japon, Mexique, Philippines, Amérique Centrale, etc.)
  • Pour la production de chaleur, outre les régions volcaniques, de nombreux bassins sédimentaires possèdent des ressources adaptées encore peu exploitées : Bassin amazonien, Mississipi-Missouri, Asie centrale, et en Europe, Bassin parisien et Bassin danubien.
  • Enfin, rappelons qu’en tout point émergé de la planète, de la chaleur est disponible à faible profondeur, pour le chauffage des habitations, à condition de disposer d’électricité pour alimenter une pompe à chaleur.

La géothermie offshore, encore inexplorée, pourrait ouvrir de nouvelles perspectives aux forages en eau profonde parvenant à proximité du manteau.

Passé et présent

Les plus anciens vestiges d’utilisation humaine de la géothermie dateraient de 20 000 ans, en pleine glaciation, dans une région volcanique du Japon.

Depuis, l’usage des thermes a accompagné l’essor des civilisations, en particulier dans les régions volcaniques. En Sicile, 2000 ans av. J.-C., les boues chaudes des îles Lipari étaient déjà fréquentées. Rome, dont l’empire couvrait l’arc méditerrannéen, faisait d’abord construire des thermes dans les villes conquises. Au Moyen Âge, la France utilisait ses abondantes ressources thermales dans le Massif central (Auvergne, Ardèche), en Provence, en Aquitaine…

Aujourd’hui, la convergence entre la raréfaction des ressources fossiles et leur dangerosité climatique pose la géothermie en alternative pour produire de la chaleur partout et de l’électricité dans les pays géologiquement privilégiés. Mais la géothermie reste difficilement accessible tant que l’on ne sait pas pénétrer profondément en terre et son développement nécessiterait des investissements substantiels, qui ne sont pas encore envisagés.

Futur

Seul l’avenir de la géothermie à très basse énergie est aujourd’hui assuré. Les progrès en fiabilité, performance et coût des pompes à chaleur devraient en faire rapidement un moyen de chauffage très répandu.

Au-delà, c’est l’accessibilité à la chaleur intense et profonde qui va dimensionner le développement de la géothermie. Les solutions, si elles existent, devraient venir de ceux qui maitrisent le mieux les technologies des forages et les disciplines associées (sismique, géologie…, c'est-à-dire les "fossiliers"). Aux Etats-Unis, des projets d’exploitation géothermique d’anciens puits de pétrole ou de gaz sont envisagés (1). Là aussi, la stratégie d’investissement de la puissante industrie pétrolière sera décisive pour l’avenir de la géothermie.

Le saviez-vous ?

Si la Terre n’était chauffée que par le soleil, la température moyenne de l’atmosphère serait de –18°C et elle serait une boule de glace (snowball). Elle l’a d’ailleurs été il y a 750 millions d’année, faute de CO2. Or, dans les périodes interglaciaires comme celle que nous vivons, elle est de +15°C !

C’est le volcanisme, donc la radioactivité, qui en perçant la glace a réinjecté massivement dans l’atmosphère de la vapeur d’eau, du CO2 et du méthane dont le magma est riche et provoqué l’effet de serre qui a rétabli une température favorable à la vie.

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