Géothermie haute température

Centrale géothermique en Nouvelle-Zélande (©photo)

Définition et zones d'exploitation

Parmi les différents types d’exploitation de la chaleur géothermique, la géothermie haute température (aussi appelée haute enthalpie) concerne les fluides dont les températures sont supérieures à 150 °C. Ceux-ci sont mis en production par forages généralement à plus de 1 500 mètres de profondeur.

Les ressources de géothermie haute température sont situées dans des zones au gradient géothermal anormalement élevé (jusqu’à 30 °C par 100 m), généralement à la frontière des plaques lithosphériques.

Les fortes valeurs de ce gradient s’expliquent par la présence, à quelques kilomètres de profondeur, de roches chaudes correspondant :

  • soit à des poches magmatiques liées à des phénomènes volcaniques actuels ou récents ;
  • soit à une remontée locale du manteau.

Les régions volcaniques, les rifts et les failles en extension sont donc des localisations privilégiées.

Un gisement géothermique de haute température se compose d’une source de chaleur magmatique, d’un réservoir (formation poreuse et perméable) et d’une couverture. Pour garantir la pérennité de la production sans réinjection, il doit en outre bénéficier d’une réalimentation naturelle en eau. Dans ces conditions, les infiltrations d’eau assurent la recharge du réservoir géothermal. Chauffé par le magma sous-jacent, celui-ci est et maintenu sous forte pression, permettant une utilisation pour la production d’électricité.

Production d'électricité

À l’intérieur du réservoir géothermal, l’eau est soit sous forme liquide, soit sous forme gazeuse. Il est aussi possible de trouver de la vapeur d’eau et de l’eau liquide au sein d’un même réservoir géothermal.

Par un forage géothermique, il est alors possible de produire de la vapeur seule, dite vapeur sèche, ou un mélange de liquide et de vapeur, appelé vapeur humide.

  • Lorsque l'eau du réservoir est vaporisée, elle est récupérée sous la forme de vapeur sèche en tête de puits et directement utilisable pour faire tourner les turbines des centrales géothermiques.
  • Lorsqu’elle est sous forme liquide dans le réservoir, l'eau subit une baisse de pression lors de la remontée dans le forage, et se transforme partiellement en vapeur. Cette vapeur est alors séparée en surface et utilisée pour alimenter des turbines.

Dans la plupart des centrales géothermiques, la vapeur naturelle sous pression fait tourner une turbine (à vapeur) qui à son tour actionne un alternateur (1). Mais d’autres dispositifs sont employés notamment lorsque la température est moins élevée, ou parce que le fluide pose problème pour l’environnement.

Au total, en fonction de la nature et des propriétés du fluide géothermal, différents systèmes de production d’électricité sont utilisés dans les centrales géothermiques.

Cycle direct à contre-pression

La vapeur, directement ou après séparation de la phase liquide, entraîne une turbine. À la sortie de la turbine, la vapeur d'eau - encore à une température élevée - est soit envoyée dans l'atmosphère, soit dirigée vers un utilisateur de chaleur situé à proximité. Dans ce dernier cas, il y a cogénération, c'est-à-dire production combinée de chaleur (énergie thermique) et d'électricité (énergie électrique).

Cycle direct à condensation

Le système est similaire au précédent. Toutefois la vapeur à la sortie de la turbine est condensée pour être évacuée sous forme liquide. Le rendement de production électrique est ainsi amélioré et l’impact atmosphérique minimisé.

Cycle à vaporisation

Le fluide extrait du réservoir géothermal, constitué de vapeur et liquide, passe par un séparateur de phase :

  • la vapeur est dirigée dans un premier circuit à haute pression vers la turbine ;
  • l'eau liquide est vaporisée par abaissement de sa pression puis dirigée par un deuxième circuit vers la turbine.

Cycle indirect à condensation

Lorsque le caractère corrosif de l'eau, dû à sa minéralité, est important, deux circuits sont mis en place.
La vapeur provenant du réservoir géothermique n'est pas envoyée directement dans la turbine (pour éviter la corrosion). Le fluide géothermal est maintenu en circuit clos, sa chaleur étant transmise à de l'eau douce – ou à un autre fluide à plus bas point d’ébullition - par l'intermédiaire d'un échangeur thermique. Le fluide du deuxième circuit, vaporisé ensuite, entraîne la turbine de l'alternateur. On parle alors de « centrale à fluide binaire ».

centrale géothermique de bouillante
Schema de fonctionnement de centrale bouillante © geothermie-perspectives (ADEME/BRGM)
 

Actuellement, la production d’électricité d’origine géothermique n’est possible qu’à partir de formations géologiques naturellement perméables (zones aquifères). Une autre technique, le système EGS (Enhanced Geothermal Systems) ou système géothermique stimulé, est en cours d’expérimentation dans le monde, notamment à Soultz-sous-Forêts (France). Il s’agit de créer artificiellement des réservoirs géothermiques en profondeur dans les roches, en injectant de l’eau depuis la surface.(2)

Avantages et limites

La géothermie haute température est une énergie souvent assimilée comme renouvelable, ne dépendant pas des conditions atmosphériques ou climatiques. Il s’agit d’une énergie dite quasi-continue car uniquement interrompue par les opérations de maintenance de la centrale. D’ailleurs, les réservoirs géothermiques présentent l’intérêt d’avoir une durée de vie de plusieurs années (30 à 80 ans).

Toutefois, l'épuisement de cette ressource est possible : le rythme d'exploitation ne doit pas excéder celui du renouvellement des stocks d’eau. La réinjection permet de pallier cette difficulté. 

Les centrales géothermiques présentent d'autres limites :

  • un rendement de production d’électricité assez faible, de l’ordre de 5 à 10% (3) ;
  • une utilisation limitée à certaines régions caractéristiques (4) ;
  • un coût élevé d’investissement dans les phases à risques d’exploration 

En France, la production d'électricité à partir de la géothermie, concentrée sur une seule installation (à Bouillante en Guadeloupe), reste encore marginale. Elle représentait 0,01% de la production d’électricité en France.

Coût de la production électrique

Investissement

L’investissement est variable en fonction des gisements et des techniques : de 1 200 à 3 900 €/kW installé selon les données du Ministère de l’énergie américain (US DOE), de 1000 à 10 000 euros selon la Commission Européenne. La technologie des systèmes géothermiques stimulés devrait à terme arriver à des coûts de 2 à 3 000 €/kW.

Coûts de production

Les coûts de production, et donc la rentabilité, varient aussi en fonction de la qualité des réservoirs géothermiques et de la localisation géographique : entre 12 à 40 €/MWh dans les zones favorables (Islande, Philippines, Indonésie, Italie, côte ouest des États-Unis ; de 40 à 120 €/MWh en Europe continentale).
À titre de comparaison, les coûts de production d’électricité pour différentes sources d’énergies sont estimés à (7) :

  • l’éolien : 50 €/MWh
  • le nucléaire : 24 €/MWh
  • le charbon : 32 €/MWh
  • le gaz naturel : 30 €/MWh 

Exploitation dans le monde

En 1818, dans la région de Volterra, le Français François Larderel entreprend la première exploitation industrielle de la géothermie. Il invente la technique du "lagoni couvert" (petits bassins d'eau chaude saumâtre), permettant de capter la vapeur à une température suffisante pour alimenter des machines destinées à pomper des eaux boriques. La technique sera perfectionnée dans les années 1830, lors des premiers forages visant à augmenter la quantité de vapeur qui, plus tard, conduira à produire de l'électricité.

Si les premiers travaux datent du début du XIXe, la production d'électricité géothermique ne deviendra significative qu’à partir des années 1970, dans un contexte de crises pétrolières et d’un souci d’indépendance énergétique des pays en voie de développement. La puissance électrique installée dans le monde est ainsi passée de 400 MW en 1960 à 8 000 MW à la fin du XXe siècle.

Les États-Unis sont le premier pays producteur (alors que la géothermie couvre seulement 0,4 % de sa production électrique). Viennent ensuite les Philippines, le Mexique, l'Indonésie, l'Italie, le Japon, la Nouvelle-Zélande, l'Islande, ou encore le Salvador et le Costa Rica.

Les plus grandes installations de par le monde sont :

  • « The Geysers », à une centaine de kilomètres au nord de San Francisco (2000 MWe) ;
  • Larderello (800 MWe) et Monte Amiata, en Toscane (Italie) ;
  • Wairakei (150 MWe) et Broadlands (Nouvelle-Zélande).

La production d’électricité par géothermie sur le long terme devrait connaître une croissance faible dans le monde, mais significative dans les régions géodynamiques actives : Amérique Centrale, Asie du Sud Est, Afrique de l’Est, et îles océaniques(8).

Néanmoins, si la technique des systèmes géothermiques stimulés se développe, elle permettrait d’accroître considérablement les aires géographiques de production.

Sur le même sujet