La réputation de l'hydrogène pâtit de l'explosion de la navette Challenger en 1986, bien que cet accident soit en réalité dû à la défaillance d'un joint torique dans l'un des boosters à carburant solide. (©NASA/Bill Ingalls)
Certes, comme tout combustible, l’hydrogène peut s’enflammer et/ou exploser en cas de fuite. Néanmoins, pour comparer les niveaux de dangerosité entre les carburants traditionnels et l’hydrogène, il convient de discerner la nature du risque évalué.
Risque de fuite
La petite taille de la molécule d’hydrogène lui permet de s’échapper à travers des ouvertures de taille extrêmement faible. Le risque de fuite est donc plus élevé avec l’hydrogène qu’avec les autres combustibles.
En cas de fuite, il peut être difficile à détecter, car il est incolore, inodore et non toxique. Cependant, cette légèreté permet également à l'hydrogène de se diffuser facilement, ce qui pourrait entraîner la formation de mélanges explosifs avec l'air dans des espaces confinés, augmentant les risques d'explosions.
Risque de formation d’une nappe explosive
L’hydrogène se disperse plus rapidement que les carburants traditionnels. Il se dilue 4 fois plus vite dans l’air que le gaz naturel et 12 fois plus vite que les vapeurs d'essence. Cette volatilité est un facteur protecteur limitant la formation de nappes d’hydrogène.
Risque d’inflammabilité
Lorsqu’une nappe d’hydrogène se forme, le risque d’inflammabilité est nettement plus élevé que pour une nappe d’essence ou de gaz.
L'hydrogène présente un risque élevé d'explosivité en raison de sa grande inflammabilité. Il peut s'enflammer facilement au contact d'une source de chaleur ou d'une étincelle, même à des concentrations relativement faibles dans l'air. De plus, l'hydrogène a une large plage d'explosivité (entre 4 % et 75 % en volume dans l'air), ce qui augmente la probabilité d'accidents dans des environnements où des fuites peuvent survenir.
D’où venait l’hydrogène qui a causé des explosions à Fukushima ?
L’hydrogène responsable des explosions s’est formé dans le cœur du réacteur nucléaire situé à l’intérieur de l’enceinte de confinement, suite à une défaillance du système de refroidissement endommagé par le tsunami. Normalement, ce système aurait dû poursuivre le refroidissement des réacteurs arrêtés par le dispositif de sécurité.
Le cœur d’un réacteur nucléaire est composé de tubes en alliage de zirconium, appelés gaines, dans lesquelles se trouve le combustible nucléaire. En temps normal, ces gaines sont immergées dans l’eau pour être refroidies, même en cas d’arrêt du réacteur, car la température de son cœur reste très élevée pendant une longue durée. Au-delà de 1 400°C (la température normale du cœur est de 300°C), le zirconium peut s’oxyder et former de l’hydrogène :
Zr + H2O → ZrO2 + H2
Cet hydrogène est explosif au contact de l’oxygène.
Dans le cas de Fukushima, la défaillance du système de refroidissement a conduit à cette réaction. A l’intérieur du cœur du réacteur, l’eau destinée au refroidissement des gaines s’est progressivement évaporée. Le niveau de l’eau a baissé et la pression a augmenté. Non immergées, le haut des gaines en zirconium a surchauffé et réagi avec la vapeur d’eau, en formant de l’hydrogène à l’intérieur de la cuve.
Afin d’éviter une surpression de vapeur et la rupture de l’enceinte de confinement, les experts ont procédé au relâchement volontaire de ces gaz à l’extérieur de l’enceinte. L’hydrogène mêlé à la vapeur d’eau s’est accumulé en haut du bâtiment abritant l’enceinte de confinement. Au contact de l’air, l’hydrogène a explosé, soufflant ce bâtiment.
Réglementation
Rappelons que l’hydrogène est utilisé dans l’industrie. Des moyens de prévention permettent d’en limiter les risques, comme par exemple l’ajout d’un gaz inerte (tel que le CO2) pour diminuer l’inflammabilité de l’hydrogène. L’utilisation d’un système de ventilation et l’inflammation délibérée de l’hydrogène évitent aussi la formation d’une nappe explosive.
Si une réglementation est appliquée en milieu industriel, elle reste encore à définir pour les applications grand public de l’hydrogène. Des mesures de sécurité en garantiraient l’utilisation, notamment dans le cas des véhicules à hydrogène et des infrastructures de distribution.
Enfin, le stockage et le transport de l'hydrogène posent des défis techniques et sécuritaires importants. Étant un gaz très léger et nécessitant d'être stocké sous haute pression ou à très basse température pour rester liquide, les infrastructures doivent être soigneusement conçues pour éviter les fuites. Les conteneurs de stockage sous haute pression ou les réservoirs cryogéniques doivent être extrêmement robustes, car toute rupture ou défaillance pourrait entraîner une libération soudaine et dangereuse d'hydrogène, avec des conséquences potentiellement catastrophiques.