Comment est calculée l’indépendance énergétique de la France ?

littoral français

La France annonce un taux d'indépendance énergétique supérieur à 50% depuis la fin des années 1990, en raison de l'importance de sa production électrique. (©photo)

Définition et calcul

L’indépendance énergétique désigne la capacité d’un pays à satisfaire de manière « autonome » ses besoins énergétiques. Elle est généralement mesurée par un indicateur officiel : le taux d’indépendance énergétique.

Celui-ci désigne le rapport entre la production nationale d’énergie primaire d’un pays et sa consommation d’énergie primaire réelle(1).

Cette autonomie relève d'un enjeu économique et géopolitique.

Taux actuel en France

Selon ce critère, le taux d’indépendance énergétique en France est de 50,6% en 2022(2).

La production française d’énergie primaire a atteint 1 254 TWh en 2023, dont plus de 80% est fournie par les réacteurs nucléaires selon les statistiques officielles. Outre cette production, la France a importé l'équivalent de près de 1173 TWh afin de satisfaire ses besoins. Elle a dans le même temps exporté l'équivalent de plus de 50 TWh d'énergie, principalement sous forme d’électricité, mais aussi de produits pétroliers raffinés, et consommé 2 523 TWh d’énergie primaire.

Les statistiques officielles définissent l'électricité « primaire » comme l’électricité tirée directement de la nature ou contenue dans les produits énergétiques de la nature : hydraulique, éolienne, photovoltaïque, géothermique à haute température. L’électricité nucléaire est considérée comme « primaire » par convention, contrairement à l’électricité produite dans des centrales thermiques.

Évolution de l'autonomie énergétique française

La hausse de la consommation d'énergie en France a été parallèle à celle de la production, en grande partie nucléaire jusqu'à récemment.

evolution taux independance energetique

La baisse de la production nucléaire en 2022, avec plus de la moitié des réacteurs à l'arrêt pendant plusieurs semaines, a fortement impacté le taux d'indépendance énergétique en France.

 1973199020022013201420152022
Total production primaire43,5111,2135,5138,0139,3139,9107,9
Électricité primaire8,086,8119,6118,8121,8121,785,7
dont nucléaire3,881,7113,8110,4113,7114,076,8
dont hydraulique, éolien, photovoltaïque4,15,05,78,38,07,78,9
Énergies thermiques et déchets9,810,710,917,616,217,021,3
Pétrole2,23,52,41,21,21,20,8
Gaz naturel6,32,51,40,30,00,00,0
Charbon17,37,71,20,10,10,00,0
Taux d'indépendance énergétique (en %)23,949,550,853,255,855,250,6

Évolution du taux d'indépendance énergétique en France depuis 1973 (©Connaissance des Énergies, d'après les données du ministère en charge de l'énergie)

Débat sur le taux réel d'indépendance énergétique

Notons que le calcul de l’indépendance énergétique est sujet à débat en France. Il peut sembler paradoxal que l’indépendance énergétique, oscillant autour de 50% ces dix dernières années, soit principalement due au parc électronucléaire alors que l’électricité ne constitue elle-même que 27% de l’énergie finale consommée dans l'Hexagone.

Cette contradiction est due au fait que 2/3 de « l’électricité primaire » dans les réacteurs nucléaires soit perdue sous forme de chaleur : la part de l’électricité produite par l’énergie nucléaire (65% en 2023) est plus faible que cette même part comptabilisée en énergie primaire (autour de 90% de l' « électricité primaire »), prise en compte dans la mesure du taux d’indépendance énergétique, compte tenu des conventions de conversion entre électricité et énergie primaire.

Des observateurs reprochent également à l’indicateur officiel de ne pas tenir compte du fait que 100% du combustible nucléaire est actuellement importé.

Quelle est la stratégie pour tendre vers l'autonomie énergétique française ?

Pour tendre vers l'autonomie énergétique, la France mise sur plusieurs axes principaux : développement du biogaz et de la biomasse, augmentation des véhicules électriques, expansion des énergies renouvelables, autoconsommation et renforcement du nucléaire nouvelle génération.

Ces mesures sont encadrées par la Stratégie française pour l'énergie et le climat (SFEC) et la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), qui définissent les grandes orientations et les objectifs à atteindre pour les décennies à venir​. En adoptant ces différentes stratégies, la France entend non seulement assurer son indépendance énergétique, mais aussi répondre aux défis climatiques globaux. Cela passe par des aides et incitations importantes auprès de la population.

Nucléaire nouvelle génération

Le nucléaire reste une composante clé du mix énergétique français, avec des plans pour lancer un nouveau programme de réacteurs EPR2 (six voire davantage) tout en maintenant les réacteurs actuels en fonction.

La France compte aussi développer des SMR, notamment pour les DOM-TOM qui dépendent encore parfois d'énergies fossiles pour générer de l'électricité.

Cette stratégie vise à garantir une production d'énergie stable, peu émettrice de carbone, et à répondre à une partie importante des besoins énergétiques futurs​.

Énergies renouvelables

Le gouvernement vise une massification des énergies renouvelables avec des objectifs ambitieux :

Fin des chaudières à gaz et installation de pompes à chaleur

La France s'engage également à éliminer progressivement les chaudières à gaz au profit des pompes à chaleur, dans le cadre de ses efforts pour réduire la consommation d'énergie et les émissions de gaz à effet de serre.

D'ici 2025, il sera interdit d'installer des chaudières à gaz dans les nouvelles constructions. Puis, l'installation de chaudières à gaz sera progressivement interdite dans les bâtiments existants, avec des incitations financières pour encourager le remplacement par des pompes à chaleur​.

Les pompes à chaleur sont plus efficaces que les chaudières à gaz et utilisent l'énergie renouvelable de l'air pour chauffer et refroidir les bâtiments, et fonctionnent avec peu d'électricité. Elles peuvent réduire la consommation d'énergie pour le chauffage de 60 à 70 % par rapport aux systèmes traditionnels.

Biogaz

Le biogaz joue un rôle central dans cette stratégie. Le gouvernement prévoit de multiplier par cinq la production de biogaz d'ici 2030 pour atteindre 50 TWh.

Cette énergie renouvelable est produite à partir de déchets agricoles, alimentaires et autres, et elle offre une alternative locale et durable au gaz naturel importé.

Véhicules électriques

L'adoption des véhicules électriques est cruciale pour réduire la dépendance aux combustibles fossiles. La France ambitionne d'avoir entre 5,5 et 15,6 millions de véhicules électriques en circulation d'ici 2035. Cela réduirait très fortement l'importation de pétrole, alors même que les transports restent en France le premier secteur consommateur d'énergie.

Autoconsommation

La France promeut activement l'autoconsommation énergétique comme partie intégrante de sa transition vers une énergie durable et décarbonée vers les renouvelables. L'utilisation de ballons d'eau chaude solaire et thermodynamique, ainsi que de panneaux solaires photovoltaïques et thermiques, est encouragée pour augmenter l'indépendance énergétique des ménages et des entreprises.

Ballons d'eau chaude solaire et thermodynamique

Les ballons d'eau chaude solaire utilisent l'énergie solaire pour chauffer l'eau, ce qui réduit la dépendance aux sources d'énergie conventionnelles. Ce système peut couvrir jusqu'à 70 % des besoins en eau chaude d'un foyer moyen, en utilisant des panneaux solaires thermiques pour capter la chaleur du soleil.

Les ballons d'eau chaude thermodynamique, quant à eux, fonctionnent comme des pompes à chaleur en captant l'énergie thermique de l'air ambiant pour chauffer l'eau, ce qui les rend efficaces même par temps froid.

Panneaux solaires photovoltaïques et thermiques

Les panneaux solaires photovoltaïques convertissent la lumière du soleil en électricité, permettant aux foyers de produire leur propre énergie et de réduire leur facture électrique. Alors que les prix baissent fortement, une forte hausse des installations solaires est anticipée dans les différents scénarios d'évolution de la production électrique française.

En parallèle, les panneaux solaires thermiques utilisent l'énergie solaire pour chauffer des fluides, qui peuvent être utilisés pour le chauffage domestique. De quoi se passer d'électricité et de gaz.

Filière bois

La filière bois-énergie joue un rôle crucial dans la stratégie d'autonomie énergétique de la France. Le bois est une ressource renouvelable locale qui peut contribuer à la réduction de la dépendance aux combustibles fossiles et aux émissions de CO2.

Les poêles et chaudières à pellets (ou granulés) sont des dispositifs de chauffage efficaces et écologiques qui utilisent des pellets de bois compressé comme combustible. Ces systèmes sont de plus en plus populaires en France grâce à leur efficacité énergétique et à leur faible impact environnemental.

Les pellets de bois ont une haute densité énergétique et leur combustion produit moins de cendres et de polluants par rapport aux autres formes de chauffage au bois.

Sobriété énergétique et efficacité

Un des objectifs majeurs est la réduction de la consommation d'énergie de 40 à 50 % d'ici 2050 par rapport à 2021. Cela implique des efforts importants en matière de rénovation énergétique des bâtiments, d'isolation thermique et de promotion de modes de vie plus sobres en énergie. La "sobriété énergétique" devient ainsi un pilier de la stratégie française pour diminuer la dépendance aux énergies importées.

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Sources / Notes

  1. Non corrigée des variations climatiques.
  2. INSEE

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