En 2023, la consommation mondiale de charbon aurait pour la première fois dépassé la barre des 8 500 millions de tonnes. (©Peabody)
Qu'est-ce que le charbon ?
Origine du charbon
Le charbon est un combustible fossile d’origine organique, il est le résultat de la transformation de biomasse enfouie dans le sol au cours des temps géologiques.
Par enfouissement, sous l’effet des pressions et des températures croissantes avec la profondeur (gravité, gradient thermique), les végétaux ensevelis sont en effet décomposés puis transformés en une matière solide et combustible à haute teneur en carbone : le charbon.
Les plus anciens et les plus recherchés des charbons datent de près de 300 millions d’années (ère carbonifère). Mais on trouve aussi des charbons plus récents, déposés jusque dans l’ère tertiaire (lignite) ou quaternaire (tourbe).
Les gisements de charbon se situent sous terre et sous les planchers continentaux des océans. Ils peuvent être enfouis à plusieurs kilomètres de profondeur ou affleurer à la surface du sol.
Le charbon comptait encore pour environ 36% de la production mondiale d'électricité en 2022. Près de 22% des réserves prouvées de charbon dans le monde sont situées aux États-Unis. La Chine extrait et consomme à elle seule près de la moitié du charbon dans le monde.
Composition du charbon
Le charbon est composé d’hydrogène, de soufre, d’oxygène et surtout de carbone. Selon la teneur en carbone, la profondeur et la température du gisement, il en existe plusieurs catégories.
Tout charbon est issu de la sédimentation de biomasse dans le sous-sol. La maturité de cette sédimentation est toutefois variable : elle peut avoir débuté il y a quelques millions d’années jusqu’à il y a plus de 300 millions d’années. Ce degré de maturité induit une sédimentation plus ou moins profonde et une composition spécifique qui détermine la qualité de chaque charbon. Par maturité croissante, on distingue :
- le lignite qui contient seulement 50 à 60% de carbone, principalement utilisé dans les centrales électriques ;
- les charbons sous-bitumineux qui contiennent 60 à 70% de carbone, principalement utilisés pour produire de l’électricité, pour des usages industriels ou dans des cimenteries ;
- les charbons bitumineux : qui contiennent entre 70% et 90% de carbone, utilisés pour des usages similaires à ceux des sous-bitumineux ou pour la production d’acier (coke) ;
- l’anthracite qui contient plus de 90% de carbone, majoritairement destiné au chauffage domestique.
Les charbons des deux catégories intermédiaires (sous-bitumineux et bitumineux) peuvent être qualifiés de houille (hard coal en anglais), le lignite étant pour sa part parfois appelé « houille brune » (brown coal en anglais). Notons que la tourbe (peat en anglais), au taux de carbone inférieur au lignite, est parfois considérée comme du charbon.
En effet, les charbons de rangs inférieurs ont une faible teneur en carbone :
- le lignite est composé de 50% à 60% de carbone ;
- les sous-bitumineux sont constitués entre 60% et 70% de carbone.
Les charbons de haut rang sont composés à plus de 70% de carbone et sont souvent désignés par le terme de « houille » :
- les bitumineux sont composés de 70% à 90% de carbone. Ils peuvent être utilisés comme « charbon-vapeur », c'est-à-dire comme combustible pour produire de la vapeur, ou comme « charbon à coke » que l’on carbonise dans un four chauffé à 1 000°C à l’abri de l’air pour produire du coke ;
- l’anthracite a encore une qualité supérieure puisqu’il est composé à plus de 90% de carbone.
Chaque type de charbon correspond à un stade de maturité. Dans les tourbières, les végétaux se décomposent pour devenir de la tourbe (constituée à 50% de carbone) ; les zones boisées produisent du lignite. Puis, par enfouissement, ces dépôts carbonés se transforment progressivement en houille.
Les charbons de haut rang se forment à plus de 10 km de profondeur. À la suite des mouvements tectoniques et de l’érosion, la houille peut affleurer à la surface. Compte tenu du gradient géothermique moyen (3°C par 100 m), les mines de charbon actuellement exploitées ne se trouvent pas à plus de trois kilomètres de profondeur.
Comment exploite-t-on du charbon ?
La diversité de ses utilisations assure au charbon une place prépondérante dans le mix énergétique. Le charbon extrait est principalement utilisé pour produire de l’électricité, mais aussi pour la cimenterie, la sidérurgie, le chauffage et les industries de carbochimie.
L’exploitation du charbon se décline en deux phases.
En amont : prospection et extraction
Les techniques d’exploitation sont déterminées par les connaissances géologiques du sous-sol qui permettent de préciser l’existence, la nature et la forme des gisements.
Outre les forages de reconnaissance, les techniques géophysiques permettent de préciser l’extension des couches et de localiser les failles. La bonne connaissance de la géologie des gisements est essentielle avant d’entreprendre une exploitation.
- Les mines souterraines : les gisements peuvent s’étendre sur des milliers de km2, à plusieurs kilomètres sous la surface. Il s’agit d’abord de déterminer la qualité et la forme du gisement, puis de définir les techniques à utiliser pour l’abattage (l’extraction). Des puits d’extraction et d’aération et des galeries sont creusés pour atteindre le gîte, là où se trouve le charbon. Un site industriel (le carreau) est créé en surface pour trier le charbon.
- Les mines à ciel ouvert : cette forme d’exploitation n’est possible que lorsque les gisements ne sont qu’à quelques dizaines de mètres de profondeur. L’exploitation s’effectue en couches successives. Les mines à ciel ouvert sont structurées en étages et ressemblent à de grands amphithéâtres ou à des carrières. Au fur et à mesure de l’exploitation, les déblais du front de taille sont utilisés pour combler les espaces exploités.
En aval : traitement et usages par type de charbon
Le charbon extrait est lavé et trié selon sa teneur en carbone.
L’utilisation du charbon dans les transports ne signifie pas le retour à la machine à vapeur. Des techniques thermochimiques permettent de transformer le charbon en hydrocarbures. Le « coal to liquids » (CTL) est un procédé transformant le charbon en combustibles liquides.
Le lignite et les sous-bitumineux sont principalement utilisés pour produire de l’électricité. Les bitumineux répondent souvent à des usages industriels (ex : production de chaleur et d'électricité, cimenterie). Le charbon à coke est par exemple utilisé pour la sidérurgie. L’anthracite répond aux besoins industriels et domestiques (ex : caoutchouc synthétique, sidérurgie, filtration d’eau, chauffage, etc.)
Avantages et inconvénients
Une place centrale dans les mix énergétique et électrique mondiaux
À l’origine de la Révolution industrielle, le charbon demeure au XXIe siècle une énergie privilégiée dans le monde. Il permet d’assurer les besoins énergétiques de l'équivalent de presque un homme sur quatre (le charbon a satisfait 23,5% de la consommation d'énergie primaire en 2022).
Le charbon est surtout toujours la première source d’énergie utilisée pour produire de l’électricité (environ 35,4% de l’électricité mondiale a été produite à partir de charbon en 2022).
Souvent décrié pour son fort impact environnemental et considéré comme une énergie du passé, le charbon joue encore un rôle majeur dans le bouquet énergétique mondial (notamment en Asie du Sud-Est).
En 2023, les fortes baisses de consommation dans les « économies avancées » (avec une chute record d'environ 20% aux États-Unis et au sein de l'Union européenne) ont été plus que compensées par les hausses de la demande provenant des pays asiatiques (+ 5% en Chine, + 8% en Inde, etc.), selon l'AIE.
Un combustible accessible
Grâce à une répartition géographique abondante et équilibrée, le charbon peut être importé à un prix compétitif partout dans le monde. Facile à transporter et à stocker, il est le combustible fossile le moins cher à exploiter.
Avec de gros gisements en Chine, en Inde, en Australie, en Afrique du Sud, en Russie et en Amérique du Nord, la diversité des sources permet d’assurer un approvisionnement sûr sans forte dépendance énergétique vis-à-vis d’un pays producteur.
Des incidences environnementales et de sécurité
Les mines peuvent dénaturer localement les paysages. De plus, la combustion du charbon s'accompagne d'importantes émissions de CO2, de soufre et d'oxydes d’azote et pollue ainsi davantage que les autres énergies fossiles.
En 2023, les émissions mondiales de CO2 liées à l'utilisation de combustibles fossiles et à la production de ciment étaient susceptibles d'« augmenter de 1,1% en 2023, pour atteindre 36,8 milliards de tonnes (Gt CO2) », soit un nouveau niveau record, a annoncé le Global Carbon Project lors de la COP28. Et 41% de ces émissions mondiales seraient dues au seul charbon.
Enfin, l’exploitation du charbon présente toujours des risques humains élevés.
Qui sont les grands acteurs de la filière ?
Les leaders mondiaux de l’industrie minière sont souvent aussi les principaux producteurs de charbon. Ils exploitent également le cuivre, les diamants, l’aluminium ou bien d’autres énergies fossiles. Ainsi BHP, Rio Tinto (Australie/Royaume-Uni) et Glencore (Suisse) sont notamment d'importants producteurs de charbon.
FutureCoal est l'association représentant l'industrie du charbon (précédemment appelée World Coal Institute, puis World Coal Association jusqu'en 2023).
Qu'est-ce que la tonne d'équivalent charbon ?
Tonne équivalent pétrole (tep) et tonne équivalent charbon (tec)
La tonne équivalent pétrole (tep) est une unité de mesure permettant de comparer les rendements énergétiques des différentes sources d’énergie. Une tep correspond à l’énergie produite par la combustion d’une tonne de pétrole.
L’énergie dégagée par la combustion d’une tonne de charbon de haut rang équivaut à 0,619 tep. Avec l’essor du pétrole, la tep s’est substituée à une ancienne unité, la tonne équivalent charbon (tec).
Qui a les principales réserves et produit le plus de charbon ?
Réserves de charbon dans le monde
En 2020, les réserves de charbon étaient de 1074108000000 tonnes selon le Statistical Review of World Energy de 2023.
Les réserves prouvées sont les ressources disponibles jugées exploitables et rentables selon les techniques actuelles utilisées. Elles sont estimées à 1 161 milliards de short tons » (ou tonnes courtes, unité de masse utilisée aux États-Unis. 1 short ton est égale à 907,1847 kg) à fin 2021 selon l'EIA américaine(1).
Cinq pays disposent de plus de 75% des réserves prouvées de charbon dans le monde :
- les États-Unis (22% des réserves mondiales selon l'EIA) ;
- la Russie (15%) ;
- l'Australie (14%) ;
- la Chine (14%) ;
- l'Inde (11%).
Le charbon est généralement consommé à une relative proximité des mines compte tenu de l’importance du transport dans le coût énergétique. Pour optimiser les coûts, le marché mondial du charbon est divisé en deux zones géographiques : la zone atlantique (Amérique, Europe) et la zone pacifique (Asie, Océanie). Le charbon est largement utilisé dans les pays d’Europe centrale et d’Asie où les ressources en gaz et en pétrole sont a priori limitées.
Production de charbon dans le monde
La production de charbon a considérablement augmenté depuis 1900, passant de 5 349,89 TWh à 48 490,00 TWh en 2022, une multiplication par environ 9.
- Entre 1940 et 1950, la production de charbon a augmenté de 8%, passant de 10 455,53 TWh à 11 332,58 TWh.
- De 1960 à 1970, il y a eu une augmentation de 13%, avec une production passant de 15 475,80 TWh à 17 469,68 TWh.
- De 1980 à 1990, la production a augmenté de 26%, atteignant 26 344,96 TWh en 1990.
- Entre 1990 et 2000, la croissance s'est ralentie, avec une augmentation de seulement 2%, atteignant 26 801,97 TWh.
- Entre 2000 et 2005, la production a augmenté de 31%, passant de 26 801,97 TWh à 35 048,48 TWh.
- De 2005 à 2010, la production a continué d'augmenter de 19%, atteignant 41 774,60 TWh.
Le niveau le plus élevé de production a été atteint en 2022 avec 48 490 TWh.
Année | Production (TWh) |
---|---|
1900 | 5 349,89 |
1910 | 8 062,11 |
1920 | 8 691,73 |
1930 | 8 920,00 |
1940 | 10 455,53 |
1950 | 11 332,58 |
1960 | 15 475,80 |
1970 | 17 469,68 |
1980 | 20 968,07 |
1990 | 26 344,96 |
2000 | 26 801,97 |
2005 | 35 048,48 |
2010 | 41 774,60 |
2011 | 44 738,31 |
2012 | 45 209,39 |
2013 | 45 935,54 |
2014 | 45 822,68 |
2015 | 44 548,60 |
2016 | 42 106,71 |
2017 | 43 059,48 |
2018 | 45 083,88 |
2019 | 45 541,91 |
2020 | 43 394,56 |
2021 | 45 137,52 |
2022 | 48 490,00 |
En 2022, la production mondiale de charbon a atteint un nouveau niveau record de 8 582 millions de tonnes, selon l'Agence internationale de l'énergie(2).
La Chine compte à elle seule pour plus de la moitié de cette production mondiale (près de 51% en 2022 avec 4 374 Mt). Suivent l'Inde (922 Mt en 2022), l'Indonésie (687 Mt), les États-Unis (539 Mt) et la Russie (444 Mt).
Quand a commencé l'exploitation du charbon ?
Le charbon à l'origine de la Révolution industrielle
Devenu à la fin du XVIIIe siècle la principale source d’énergie, le charbon est à l’origine de la Révolution industrielle. La Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne ont ainsi bénéficié de gisements exploités à proximité des zones de consommation.
En France, l’extraction du charbon remonte au Moyen Âge, mais se développe surtout à la fin du XVIIIe siècle jusqu’à la moitié du XIXe, notamment dans les bassins du Nord-Pas-de-Calais, de la Lorraine et de la Loire.
En 1762, la machine à vapeur créée par James Watt utilise le charbon comme combustible. Le charbon participe également au développement du transport grâce aux bateaux et aux chemins de fer (locomotives à vapeur).
Pour satisfaire les besoins en charbon, les techniques d’exploitation des mines se modernisent et des progrès sont réalisés dans la sûreté de l’extraction améliorant la sécurité des mineurs. L’exploitation du charbon a requis au cours de l’histoire d’importants efforts humains mettant parfois en jeu l’intégrité physique des mineurs.
Catastrophes liées au charbon en France
L’exploitation du charbon a causé la mort de plus d’un million d’hommes au cours des XIXe et XXe siècle : les causes principales en ont été le grisou, un gaz naturel se dégageant des couches de charbon causant des explosions meurtrières appelées « coups de grisou » (ex : catastrophe de Courrières en 1906, 1 099 morts), des incendies (ex : incendie de 1956 à Marcinelle, 262 morts), la silicose (une maladie pulmonaire mortelle provoquée par l’inhalation de particules de poussières de silice dans les mines), des effondrements, etc.
Malgré le danger, ces conditions extrêmes ont souvent créé une forte solidarité entre les mineurs. Aussi, cette cohésion et ce soutien ont marqué l’histoire du charbon.
Dernière mine en France fermée en France
Au cours du XXe siècle, le charbon est progressivement délaissé en Europe au profit du pétrole et du gaz du fait de leur pouvoir calorifique plus élevé et de l’épuisement des mines locales. Au moment où la France a fermé ses dernières mines de charbon, la demande mondiale est repartie à la hausse, principalement en raison du développement économique des pays d’Asie (Chine, Inde, Indonésie) qui possèdent d’importantes réserves de charbon.
La France a fermé sa dernière mine en avril 2004 en Moselle (puits de la Houve à Creutzwald).
Quand aura lieu le pic mondial du charbon ?
Le pic mondial du charbon désigne le moment où plus de la moitié des réserves seront consommées et où la production de charbon déclinera du fait de l’épuisement des réserves. En Europe, ce pic aurait eu lieu en 1982.
L’avenir de la production mondiale de charbon repose à la fois sur l’amélioration des techniques d’exploration et de transformation du charbon pour produire davantage d’énergie à partir d’une même quantité de charbon. La gestion de l’impact climatique de l’utilisation du charbon est devenu un enjeu central.
L’amélioration de l’efficacité énergétique des centrales à charbon et l’intégration des technologies de « captage et stockage géologique du CO2 » (CSC) participent au développement du charbon dit « propre ». Avec les méthodes de CSC, le CO2 rejeté dans l’atmosphère est récupéré puis séquestré (généralement sous terre dans des couches profondes).
La consommation mondiale de charbon pourrait baisser dans les prochaines années après avoir atteint un nouveau pic en 2023, selon les dernières prévisions de l'AIE de décembre 2023(3). En Chine, la consommation de ce combustible pourrait chuter en 2024 et se stabiliser par la suite jusqu'à 2026 « avec une production hydroélectrique prête à se rétablir tandis que les productions solaire photovoltaïque et éolienne augmenteront considérablement ».
Au niveau mondial, les experts de l'AIE estime que la consommation globale de charbon en 2026 pourrait être inférieure de 2,3% au niveau de 2023, « même en l’absence de nouvelles annonces gouvernementales ou de politiques plus strictes en matière d’énergie propre et de climat », grâce au déploiement très important de capacités renouvelables dans les prochaines années.