Capture stockage CO2

Projet pilote de centrale sans émission de CO2 à Brandenburg, Allemagne (©photo)

Définition et étapes

Le procédé de capture (parfois appelé captage) du CO2 consiste à piéger les molécules de CO2 avant, pendant ou après l’étape de combustion afin d’éviter sa libération dans l’atmosphère (gaz à effet de serre). Il est également connu sous le terme anglophone CCS - pour Carbon Capture and Storage.

Le potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre grâce aux technologies de capture et de stockage du CO2 est important. L'Agence Internationale de l'Énergie (AIE) estime qu'elles pourraient contribuer à 20 % des efforts de réduction des émissions en 2050 dans un contexte de diminution par deux des émissions mondiales entre 2005 et 2050.

La capture du CO2

La combustion de ressources énergétiques fossiles (charbon, gaz naturel, pétrole), de ressources énergétiques renouvelables (biomasse) ou de dérivés de ces ressources entraîne la formation de molécules de dioxyde de carbone ou CO2.

Trois familles de procédés de capture sont ainsi envisagées :

  • la capture avant la combustion : précombustion ;
  • la capture après une combustion classique (à l’air), avec peu ou pas de modification du procédé de combustion : postcombustion ;
  • la capture après une combustion à l’oxygène pur : oxycombustion.

Le CO2 extrait est obtenu sous forme gazeuse ou liquide, généralement mélangé à d’autres espèces gazeuses minoritaires.

Le stockage du CO2

En amont du stockage, le CO2 doit être transporté, soit par pipeline, soit par bateau, soit encore par camion pour de petites quantités. Le CO2 extrait est ensuite stocké dans des formations géologiques du sous-sol permettant sa séquestration sur le long terme, typiquement plusieurs siècles.

Types et Fonctionnement technique et scientifique, étape par étape

Prérequis : la combustion

Une combustion est une réaction libérant de l’énergie et faisant intervenir :

  • un réducteur : le combustible (charbon, fioul, gaz, biomasse, etc.) ;
  • un oxydant aussi appelé comburant : généralement l’oxygène contenu dans l’air (l’air est un mélange d’azote N2 pour 78%, d’O2 pour 21% et d’autres espèces - moins de 1%, notamment du CO2).

Typiquement, le combustible est composé de chaines carbonées. La réaction de combustion s’écrit alors sous forme simplifiée :

C + O2 → CO2

À l’issue de la combustion, le CO2 est contenu dans les gaz d’échappement mais reste une espèce minoritaire.

La capture du CO2 en postcombustion

Ce procédé consiste à intervenir en aval de l’étape de combustion et à traiter les gaz de combustion pour en extraire le CO2. Les gaz de combustion contiennent majoritairement du N2, provenant de l’air entrant, mais également du CO2, de l’O2, de l’eau, des NOet SOx (oxydes d’azote et de soufre) et d’autres produits (combustion incomplète, espèces minoritaires de l’air entrant).

Le procédé le plus commun est la capture par un solvant présentant une affinité pour les molécules de CO2 (c’est-à-dire capable de se lier avec des molécules de CO2 dans certaines conditions, notamment de pression et de température). La capture se fait en deux temps :

  • charge du solvant : les gaz de combustion sont mis en contact avec le solvant, qui se lie aux molécules de CO;
  • régénération : le solvant est « régénéré » dans un autre compartiment pour libérer les molécules de CO2 qui s’y étaient fixées.

Le reste du gaz de combustion, appauvri en CO2, est libéré dans l’atmosphère. La réussite de la capture repose sur le choix du solvant et des procédés choisis pour la mise en contact. Les solvants aux amines, notamment la MEA (monoéthanolamine), sont les plus utilisés. D’autres solvants sont à l’étude visant à limiter notamment les coûts, l’énergie de régénération (énergie nécessaire pour effectuer le cycle charge-régénération) et les impacts socio-environnementaux.

La capture du CO2 par postcombustion 
La capture du CO2 par postcombustion (©Connaissance des Énergies)

D’autres procédés existent, notamment la capture par cryogénie en refroidissant les gaz de combustion jusqu’à -120°C/-80°C pour congeler le CO2.

La capture du CO2 par oxycombustion

L’oxycombustion consiste à injecter de l’oxygène pur (et non pas de l’air) au cours de la combustion. Cela évite d’introduire du N2 dans le foyer de combustion et de le retrouver dans les gaz de combustion. Des étapes de lavage et de déshydratation des fumées sont suffisantes pour isoler le CO2.

Cette technologie nécessite la production de grandes quantités d’oxygène très pur. L’oxygène est obtenu par séparation de l’oxygène de l’air, par exemple par cryogénie. D’autres procédés sont à l’étude (ex : membranes sélectives).

La capture du CO2 par oxycombustion (©2012)

La capture du CO2 par oxycombustion (©Connaissance des Énergies)

La capture du CO2 en précombustion

La technologie de capture en précombustion nécessite de modifier l’ensemble du procédé de combustion. Les principales étapes sont :

  • gazéification du combustible, pour obtenir un mélange de CO + H2O ;
  • transformation chimique permettant d’obtenir un mélange CO2 + H2 ;
  • extraction du CO2 par solvant (typiquement du méthanol) ;
  • production d’énergie grâce à l’hydrogène (turbines).

Cette technologie ne peut s’appliquer que sur des unités neuves.

Ces différents procédés permettent d’atteindre des taux de capture du CO2 généralement de l’ordre de 80 à 95%. La capture en oxycombustion peut même permettre de dépasser 95%, voire 99% de taux de capture.

La capture du CO2 par oxycombustion (©2012)

La capture du CO2 en précombustion (©Connaissance des Énergies)

Le stockage du CO2

Le stockage en grande quantité est réalisé en profondeur dans des formations géologiques. Les technologies de forage et d’injection sont déjà bien connues, et utilisées notamment pour l’extraction du pétrole. Il est cependant nécessaire de s’assurer de l’étanchéité du site de stockage. Les sites potentiels les plus courants sont les aquifères salins, les gisements épuisés de pétrole et de gaz et les veines de charbon non exploitées.

L’étanchéité est assurée par une ou plusieurs couches géologiques imperméables au CO2 et un scellement des puits d’injection en fin d’exploitation. De nombreuses études portent encore sur l’impact des constituants du flux de CO2 (CO2 et espèces minoritaires) sur les roches constituant les cavités de stockage.

Pendant toutes les phases de stockage et les phases suivant la fermeture du site de stockage, un suivi est mis en place pour détecter toute fuite éventuelle et y remédier.

Les avantages environnementaux

Le CO2 est, hormis la vapeur d’eau, le gaz à effet de serre majoritaire émis dans l’atmosphère par les activités humaines. La capture et le stockage du CO2 permettent de limiter les émissions de CO2 dans l’atmosphère, et par conséquent de limiter l’effet de serre.

Malgré la nécessité reconnue de réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre, les scénarios de nombreuses organisations de référence (Agence internationale de l'énergie en tête) considèrent que les énergies fossiles continueront de jouer un rôle central dans le mix énergétique dans les décennies à venir. Dans son rapport Coal 2018, l’AIE estime entre autres que la consommation mondiale de charbon pourrait rester stable d’ici à 2023,.

Le GIEC souligne à ce titre l'importance des procédés de capture et de stockage du CO2 pour contenir autant que possible le réchauffement climatique.

Notons par ailleurs que des recherches existent pour valoriser le CO2 et en faire une ressource à part entière : substitution au pétrole pour certains usages, « carburants solaires » à partir du CO2, etc.

Coût de la technologie

Le coût du procédé de captation et stockage du dioxyde de carbone est actuellement autour de 50 à 100 €/t CO2 (60 euros la tonne en moyenne selon le GIEC, dont 85% pour le seul captage)(1). Ce coût est à comparer avec le faible prix de la tonne de CO2 sur les marchés internationaux du carbone. L’amélioration des procédés pourrait permettre une diminution de ces coûts.

Deux facteurs influent sur le coût final de l’énergie produite :

  • un surcoût de fabrication des centrales, surcoût initial parfois très important (40% en moyenne selon IFP EN). Ce coût est répercuté sur l’énergie produite ;
  • un surcoût d’exploitation : l’étape de capture du CO2 est coûteuse en énergie. On parle de pénalité énergétique. Pour une centrale électrique, cette pénalité énergétique peut représenter plus de 25% de l’énergie produite.

Où en est l'application industrielle aujourd'hui ?

Les procédés de capture du CO2 en postcombustion sont déjà appliqués de longue date pour la production de « CO2 alimentaire » (il s’agit de CO2 très pur), par exemple pour produire de l’eau gazeuse ou des sodas. Les unités de production sont cependant de petite taille, et ne sont pas directement transposables pour des grandes puissances, d’où les expérimentations en cours. Ces expérimentations sont confrontées à des obstacles techniques et économiques.

La maîtrise d’un procédé à petite échelle ne garantit pas sa réussite à grande échelle. Plusieurs étapes sont souvent nécessaires pour transposer ce procédé.

La capture du CO2 n’est pas encore déployée à grande échelle. De nombreuses expérimentations sont en cours, soit sur des centrales existantes, soit sur des unités neuves, principalement dans les pays développés (Europe, Amérique du Nord, Australie pour l’essentiel) ainsi qu’en Chine. Actuellement, les expérimentations sont menées sur des petites puissances (typiquement 30 MWth pour la chaudière à gaz en oxycombustion de Lacq de Total). Des projets de plus grande taille sont à l’étude, comme celui de White Rose sur une centrale à charbon au Royaume-Uni, financé par le programme européen NER300.

Potentiellement, la capture du CO2 pourrait être utilisée dans le monde entier.

Des sites de stockage sont également exploités. Ils peuvent être situés en mer (stockage de Sleipner, au large de la Norvège) ou sur les continents (stockage de Lacq, dans le Sud de la France).

Côté réglementation, l’Europe a statué pour encadrer les activités de capture et de stockage du CO2 (directive 2009/31/CE, stratégie énergétique et climatique à l'horizon 2030)(2). Les obligations sont très strictes concernant le suivi des sites de stockage et la responsabilité de l’exploitant et en dernier recours de l’État.

Concrètement

Les émissions mondiales de CO2 sont aujourd’hui évaluées à près de 36 milliards de tonnes (donnée Global Carbon Project pour l'année 2013), provenant en partie seulement de grandes installations fixes de combustion. Les sites géologiques identifiés représentent un potentiel de stockage allant de plusieurs centaines à plus de 10 000 Gt de CO2(3). Le potentiel de stockage n’est pas limitant. Des obstacles technico-économiques persistent cependant.

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