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Le groupe français Nexans mise, pour grossir aux États-Unis, sur l'essor des éoliennes en mer et le renouvellement du réseau électrique, deux priorités de l'administration Biden, explique à l'AFP son directeur général Christopher Guérin après l'inauguration cette semaine d'une usine de câbles sous-marins.
Le groupe avait déjà un site au bord de l'eau sur la côte est du pays, à Charleston en Caroline du Sud, pour fabriquer des câbles de haute tension terrestre. Il a décidé fin 2018 d'y investir 200 millions de dollars supplémentaires pour construire des câbles pouvant relier les fermes éoliennes en mer et être transférés directement sur un navire.
"C'était un pari par rapport au gouvernement de l'époque", Donald Trump s'étant publiquement opposé aux éoliennes à plusieurs reprises, raconte M. Guérin. "Mais on voit arriver depuis quatre ans une tendance de fond sur l'électrification", dit-il.
Plusieurs États, dont celui de New York ou du Massachusetts, travaillent sur de grands projets de fermes éoliennes au large de leurs côtes depuis plusieurs années. La seule ville de New York a annoncé fin septembre vouloir investir 191 millions de dollars sur 15 ans dans le secteur.
Sous l'impulsion de Joe Biden, le gouvernement américain a annoncé en mars son intention de disposer de 30 gigawatts (GW) de capacités éoliennes offshore dans le pays d'ici 2030. "Les fermes éoliennes, on en parle depuis plus de 10 ans", rappelle M. Guérin. "La grande différence aujourd'hui, c'est que le coût a baissé."
Les fermes en cours de conception sont généralement placées entre 50 et 120 kilomètres des côtes, pour la protection de la biodiversité et du paysage, mais aussi pour profiter de vents plus forts. Au bénéfice de Nexans puisque la longueur des câbles nécessaires s'allonge. "Aux États-Unis, les projets se font beaucoup plus vite et beaucoup plus fort", car ils profitent de dix années d'expérience en Europe, souligne M. Guérin.
L'usine de Charleston est la seule dans le pays à fabriquer des câbles sous-marins et ce "made in America" profite au groupe qui, selon son directeur, a capté "60% des parts du marché (de la connexion des éoliennes en mer) pour les six prochaines années".
Vers une pénurie de cuivre ?
Nexans a annoncé en février vouloir se concentrer exclusivement sur l'électrification et se délester d'ici 2024 de ses activités dans les autres secteurs comme les télécoms ou l'industrie.
Mais le groupe, qui a réalisé en 2020 un chiffre d'affaires de 5,7 milliards d'euros, mise aussi sur le renouvellement du réseau électrique aux États-Unis. "Comme dans tous les pays développés, le réseau américain a été construit après la Seconde guerre mondiale. Il était pensé pour les énergies thermiques, avec des hydrocarbures", explique M. Guérin.
L'administration de Joe Biden souhaite que l'électricité ne soit plus, dans son ensemble, une source d'émissions polluantes d'ici 2035 et a prévu plusieurs milliards de dollars pour la modernisation du réseau dans son grand plan sur les infrastructures adopté début novembre.
Le groupe français compte aussi sur les investisseurs américains, qui détiennent désormais environ 30% de son capital. Sa stratégie centrée sur l'électrification lui vaut "un très gros buzz" aux États-Unis parmi des fonds cherchant de plus en plus à "verdir" leurs placements, assure M. Guérin.
L'intérêt grandissant pour l'électrification, qu'il s'agisse des énergies renouvelables ou des voitures, devrait toutefois rapidement faire face selon lui à une pénurie de cuivre, au centre des câbles. La consommation du métal doré était de 9 millions de tonnes en 1995, de 20 millions actuellement et devrait monter, selon les simulations de Nexans, à 35 millions en 2030. Même s'il est possible de recycler assez efficacement le cuivre, "il va y avoir rapidement une bagarre, comme pour les métaux rares", prédit-il.