Transition énergétique : les prix des métaux critiques en forte chute mais prudence...

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Katinniq au nord du Québec où est située la mine de nickel Raglan

Entre 2017 et 2022, la consommation mondiale de lithium a plus que triplé, celle de cobalt a augmenté de 70% tandis que celle de nickel a progressé de 40%. Ici, à Katinniq au nord du Québec où est située la mine de nickel de Raglan. (©Glencore)

« L’appétit mondial pour les panneaux solaires, les voitures électriques et les batteries augmente rapidement mais nous ne pouvons le satisfaire sans un approvisionnement fiable et croissant » en minerais et métaux (cuivre, lithium, nickel, cobalt, terres rares), souligne Fatih Birol, directeur de l'Agence internationale de l'énergie (AIE) à l'occasion de la publication d'un nouveau rapport ce 17 mai.

Une demande toujours plus forte

En 2023, la demande mondiale de minerais et métaux critiques a sans surprise connu une forte hausse : + 30% pour le lithium (principalement à destination des batteries de véhicules électriques), + 8% à 15% pour le nickel, le cobalt, le graphite et les terres rares, etc.

L'essor du parc de voitures électriques (près de 14 millions de ventes dans le monde en 2023, soit + 35% par rapport à 2022) explique en partie ces besoins en forte croissance, tout comme les importantes installations de capacités éoliennes et solaires et l'extension des réseaux électriques.

Dans son scénario « STEPS » basé sur les politiques annoncées à ce jour, l'AIE estime que les besoins mondiaux en minerais et métaux critiques devraient doubler d'ici à 2030. Dans son scénario « NZE » (qui prévoit l'atteinte de la neutralité carbone à l'horizon 2050), ces besoins devraient tripler d'ici 2030 et quadrupler d'ici 2040.

Le lithium, au cœur du développement de l'électromobilité, pourrait connaître une croissance bien plus forte encore, avec une demande mondiale multipliée par 9 d'ici 2040 selon les projections de l'AIE (toujours dans son scénario « NZE »).

Des marchés « instables »

Les marchés des minerais et métaux critiques restent instables, avec une forte chute des prix en 2023 (- 75% pour le lithium) après deux années de très forte hausse : l'Energy Transition Mineral Price Index de l'AIE (panier constitué de différents métaux critiques pour suivre leurs cours) a ainsi triplé dans les deux années suivant janvier 2020 avant de revenir quasiment à son niveau initial fin 2023.

Cours des minerais de la transition énergétique

La baisse des prix, malgré la hausse de la demande, est liée à une forte croissance de la production, notamment en Afrique, en Indonésie et en Chine.

La valeur de marché des différents minerais et métaux clés de la transition énergétique est estimée par l'AIE à près de 325 milliards de dollars à l'heure actuelle (un montant approximativement similaire à celui du marché du minerai de fer, indique l'Agence). D'ici à 2040, cette valeur pourrait plus que doubler pour atteindre 770 milliards de dollars selon le scénario « NZE » de l'AIE.

Impact sur les investissements

La chute des prix des minerais et métaux nécessaires à la transition énergétique constitue « une épée à double tranchant – une aubaine pour le déploiement des énergies propres mais un fléau pour les investissements dans les minerais critiques et dans leur diversification ».

En 2023, ces investissements ont augmenté de « seulement » 10% dans le contexte de baisse des prix. Selon les estimations de l'AIE, près de 800 milliards de dollars d'investissements dans l'extraction de ces ressources clés seraient nécessaires d'ici à 2040 (dont 492 milliards de dollars rien que pour le cuivre) pour rester sur la trajectoire d'un scénario « + 1,5°C ».

L'innovation, le recyclage des matériaux et les changements de comportements devraient par ailleurs réduire les tensions sur la chaîne d'approvisionnement (en diversifiant par ailleurs les sources et avec une exploitation aussi « propre et responsable » que possible).

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