« La dépendance de l'Asie du Sud-Est aux combustibles fossiles pour répondre à une demande croissante d'énergie s'avère être une vulnérabilité importante dans la crise énergétique actuelle », avertit l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dans un rapport publié le 17 mai.
La situation énergétique en Asie du Sud-Est
Entre 2000 et 2020, la consommation d’énergie de l’Asie du Sud-Est a augmenté d’environ 80%, sous l’effet des croissances économique et démographique (la région compte environ 600 millions d’habitants). Les énergies fossiles ont satisfait plus de 90% de cette demande supplémentaire d’énergie selon l’AIE, et la consommation de charbon de l’Asie du Sud-Est a même été multipliée par 6 durant cette période.
En 2020, les énergies fossiles ont au total compté pour environ 78% de la consommation d’énergie primaire de l’Asie du Sud-Est (32% pour le pétrole, 26% pour le charbon et environ 20% pour le gaz naturel). Les énergies renouvelables comptent pour environ un cinquième de la demande d’énergie de la région. La consommation de biomasse traditionnelle pour la cuisson a fortement reculé (division par 2 depuis 2000) grâce à l’électrification.
Notons que la région dispose d’importantes ressources géothermiques (principalement exploitées en Indonésie et aux Philippines) et hydrauliques (Cambodge et Laos notamment). Aucun des dix pays membres(1) de l’ASEAN (Association des nations d’Asie du Sud-Est) ne dispose de réacteur nucléaire en service.
La situation énergétique des pays d'Asie du Sud-Est diffère selon leur niveau de développement, leur tissu industriel ou encore leur géographie et leur histoire : l’AIE souligne ainsi qu’un pays comme la consommation d’énergie par habitant du Cambodge équivaut à environ un quart de la moyenne mondiale tandis que celle de Singapour est trois supérieure à cette moyenne.
« Un rôle majeur dans les transitions énergétiques mondiales »
La consommation d’énergie en Asie du Sud-Est a en moyenne augmenté de près de 3% par an au cours des deux dernières décennies et cette tendance pourrait se poursuivre d’ici à 2030 (selon le scénario tendanciel « STEPS » de l’AIE), « les trois quarts de cette demande accrue étant satisfaits par les combustibles fossiles » selon les prévisions de l’AIE.
Dans un tel scénario, les émissions de CO2 en Asie du Sud-Est pourraient augmenter de 35% d’ici à 2030 par rapport au niveau de 2020. Et sans action politique, la facture pétrolière de cette région (importations nettes), « qui s'élevait à 50 milliards de dollars en 2020, devrait augmenter rapidement si les prix élevés des matières premières perdurent ».
L’AIE souligne dans son rapport l’importance d’un soutien international pour aider les pays membres de l’ASEAN à atteindre leurs objectifs de décarbonation de réduction de la dépendance au charbon dans le secteur électrique. Pour atteindre les objectifs climatiques de la région, l’AIE estime que « 190 milliards de dollars d'investissements par an dans l’énergie seront nécessaires d’ici à 2030 dans la région », contre environ 70 milliards de dollars par an entre 2016 et 2020.
Il est souligné enfin que l’Asie du Sud-Est est « appelée à jouer un rôle majeur dans les transitions énergétiques mondiales en tant que fournisseur clé de minéraux critiques et fabricant de produits énergétiques propres » : le Myanmar compte entre autres pour 13% de la production mondiale de terres rares, la Malaisie et le Vietnam sont les 2e et 3e plus grands fabricants de modules solaires photovoltaïques, etc. Des raisons supplémentaires pour lesquelles l'AIE qualifie l'Asie du Sud-Est de « poids lourd émergent de l'énergie mondiale ».