La quille de SeaOrbiter peut être relevée pour ramener le tirant d'eau du vaisseau à 8 m. (©SeaOrbiter/Jacques Rougerie)
Les vaisseaux marins futuristes seront à l’honneur en 2014. D’ici la fin de cette année, deux projets stupéfiants devraient prendre forme : le Polar Pod, vaisseau de Jean-Louis Etienne présenté en vidéo dans la rubrique « Ruptures », prendra le large tandis que débutera la construction d’un autre vaisseau autonome, le SeaOrbiter. Présentation de ce laboratoire des mers insolite.
Une station marine internationale en sealium
SeaOrbiter est à la fois un vaisseau et un laboratoire marin à vocation scientifique et pédagogique. A première vue, ce navire rappelle à certains la forme d’une immense planche à voile. Cette élégante structure verticale en sealium (aluminium recyclable adapté aux conditions marines) n’a toutefois pas de voile et peut aussi faire penser à un vaisseau venu de l’espace. L’analogie prend plus de sens encore lorsque l’on sait que cette base recevra des astronautes qui viendront s’y entraîner en milieu hyperbare(1).
En détails, SeaOrbiter mesurera 58 m de haut, dont plus de la moitié seront immergés (31 m) et pèsera près de 550 tonnes, l’équivalent du poids de 3 planètes bleues. Le vaisseau sera constitué de 10 niveaux, 4 au-dessus du niveau de la mer, 6 en dessous. Il se déplacera principalement au gré des courants océaniques comme pour mieux se fondre dans ce milieu encore très mystérieux.
A bord, cette « station océanique internationale » pourrait accueillir 18 à 22 personnes, équipage compris. Ceux-ci pourront observer jour et nuit les fonds marins depuis les niveaux inférieurs du navire. Les données recueillies, par exemple sur le réchauffement des océans ou sur les micro-virus y vivant, pourront déboucher sur des applications variées : cartographie, biologie marine, pharmacologie, etc.
Les moyens d’exploration de SeaOrbiter seront variés : des plongeurs pourront explorer les environs immédiats du vaisseau en étant directement amenés à 12 m de profondeur depuis un espace pressurisé du navire. Pour les explorations profondes, des engins autonomes prendront le relais, certains drones plongeurs (AUV, pour « Autonomous Underwater Vehicle ») étant capables de descendre jusqu’à près de 6 000 m de profondeur.
Une « peau » solaire pour alimenter ce géant en énergie
SeaOrbiter présente également un intérêt pour éprouver l’efficacité des énergies renouvelables intégrées à ce navire. Les besoins en énergie du vaisseau seront en effet principalement satisfaits par une « peau » photovoltaïque de 350 m2 de surface. Deux éoliennes verticales fixées en haut du vaisseau contribueront également à l’autonomie énergétique du vaisseau. Des propulseurs électriques seront utilisés pour manœuvrer dans les ports.
A l’origine de ce projet d’envergure se trouve Jacques Rougerie, architecte océanographe qui a notamment passé 71 jours d’affilée dans un habitat sous-marin. Son rêve est de déployer à terme un « réseau de sentinelles » de 7 à 9 Sea Orbiter sur les différents océans. Ceux-ci transmettraient en temps réel des données aux centres de recherche partenaires comme l’Ifremer.
La première étape de ce déploiement devrait débuter fin 2014 avec la construction d’un vaisseau. Si la durée de cette phase de 18 mois est respectée, une première mission pourrait être effectuée en Méditerranée début 2016. Le coût total de la construction de SeaOrbiter est évalué à 35,6 millions d’euros. Des internautes peuvent actuellement contribuer à soutenir cet explorateur des mers via la plateforme de crowdfunding KissKissBankBank(2).
Le projet vise ainsi à associer un maximum de personnes à cette expédition, dans un milieu encore très mal connu des scientifiques eux-mêmes. Selon l’Ifremer, 85% de la biodiversité marine resterait encore à découvrir.