Que retenir de la COP17 de Durban (28 novembre au 11 décembre 2011) ?

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COP17 Durban

La ministre sud-africaine des Affaires étrangères et présidente de "COP 17", a reconnu avant l'adoption de l'accord que celui-ci n'était "pas parfait". (©Unati Ngamntwini)

La « COP 17 » (17e Conférence des Parties des Nations Unies sur le changement climatique) s’est terminée le dimanche 11 décembre 2011, avec 36 heures de retard. L’Union européenne et autres négociateurs se sont félicité de l’accord a minima obtenu à Durban tandis que les ONG en ont eu une lecture plus critique.

Rappel du contexte

Adoptée en 1992 au sommet de la Terre à Rio de Janeiro, la CCNUCC est le cadre d’action de lutte contre le réchauffement climatique initié par l’ONU. Elle ne fixe pas d’objectifs juridiquement contraignants et prône un principe de précaution, à savoir éviter les émissions anthropiques potentiellement liées au changement climatique. Cette convention réunit 195 Parties qui se rencontrent annuellement depuis 1995 lors de Conférences des Parties (dites CdP ou « COP » en anglais). Elles y actent leurs principaux points d'accord, comme à Copenhague en 2009 (COP15), Cancun (COP16) fin 2010 et Durban (COP17).

Le Protocole de Kyoto est signé en 1997, à l’occasion de COP3. Il s’agit d’un traité fixant aux pays industrialisés et aux pays en transition économique (Parties visées à l’annexe I de la CCNUCC) des objectifs différenciés d’émission de GES. Dans ce cadre, l’Union européenne s’est engagée à diminuer ses émissions des 6 gaz à effet de serre considérés de 8% entre 2008 et 2012 par rapport aux niveaux de 1990.

Les Etats-Unis ont signé mais jamais ratifié ce protocole de Kyoto, malgré l’intention annoncée de réduire leurs émissions de 7%. De leur côté, la Chine, l’Inde et le Brésil ne sont soumis à aucune contrainte de réduction des émissions de GES en tant que pays en développement.

Ces quatre pays émettent pourtant alors près de la moitié des gaz à effet de serre de la planète (48% des émissions totales de CO2 dues aux combustibles en 2009 selon l’AIE). Le Japon, la Russie et le Canada refusent, à ce titre, de poursuivre leurs efforts de réduction après 2012 dans un cadre qui ne s’applique pas à la Chine et aux Etats-Unis.

L’Union européenne fait preuve de volontarisme, à l’image du système communautaire d’échange de quotas d’émissions mis en place (SCEQE), tandis que des Etats dépendants du charbon et du pétrole comme la Bolivie freinent l’instauration d’un futur cadre contraignant pour la période 2012-2020.

Attentes lors de la COP de Durban

A Durban, les Européens espèrent poser les bases d’un après-Kyoto à travers un futur cadre juridique contraignant à l’horizon 2020 engageant les Etats-Unis. L’émissaire américain pour le climat, Todd Stern, juge quant à lui qu’un tel accord est impossible s’il ne s’applique pas à toutes les principales économies.

La perspective d’un Kyoto 2 reste ainsi éloignée et soumise à de nombreuses conditions, comme l’entrée de la Chine dans le processus de Kyoto. Les négociations en Afrique du Sud doivent se concentrer plus modestement sur la période 2012-2020 et la consolidation des accords de principe de Cancun 2010, entre autres :

  • le développement d’un Fonds Vert de 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020, pour aider les pays en voie de développement à lutter contre les changements climatiques et la déforestation ;
  • la création d’un Mécanisme de technologie pour promouvoir l'énergie propre et les nouvelles technologies (déploiement du captage-stockage de CO2 à préciser);
  • la précision de l’objectif fixé à Copenhague en 2009 de limitation de l’augmentation de la température à 2°C d’ici à 2010.

Contrairement au sommet de Copenhague, aucun grand chef d’Etat n’est attendu à Durban.

Quels résultats ?

A l’issue de 14 journées, les 195 Parties réunies à Durban se sont notamment entendues sur les points suivants :

  • une feuille de route visant un accord en 2015 englobant tous les pays pour lutter contre le réchauffement climatique. Cet accord devrait entrer en vigueur à partir de 2020. Il est décrit dans l’accord final comme « un protocole, un autre instrument légal ou une solution légale concertée ayant une force légale ». Autrement dit, de nombreuses options restent ouvertes et aucune contrainte légale n’engage les différents signataires à l’heure actuelle ;
     
  • la prolongation du protocole de Kyoto après 2012 et le maintien des différents mécanismes de flexibilité ;
     
  • la mise en place opérationnelle du Fonds vert, outil qui doit aider les pays en voie de développement à lutter contre les changements climatiques et la déforestation.  Officiellement créé à Cancun, il devrait être mis en place début 2012 mais son financement reste à préciser(1) ;
     
  • la mise en place opérationnelle d’un Mécanisme de technologie en 2012, faisant la promotion de  l'énergie propre et des nouvelles technologies.

Entre atermoiements et soulagement, des réactions mitigées

« L’UE souhaitait plus d’ambition. Et a obtenu plus » s’est félicitée la commissaire européenne en charge du climat, Connie Hedegaard. Un sentiment partagé par de nombreux négociateurs européens, soulagés d’avoir atteint un accord de principe après avoir craint un échec des négociations.

Ce sentiment est tempéré par la ministre française Nathalie Kosciusko-Morizet : « on n’a pas sauvé la planète, mais on s’engage sur un accord global ». Il est battu en brèche par différentes ONG qui déplorent l’absence d’engagements concrets. Parmi elles, les Amis de la Terre souligne sa frustration et le flou de l’accord obtenu : « A Durban, on s’est mis d’accord pour continuer à discuter en vue d’un accord, en 2015, qui devrait préfigurer un autre accord plus ferme, qui pourrait entrer en vigueur en 2020, si on est d’accord pour fixer des objectifs contraignants ».

Les négociateurs ont eux-mêmes reconnu l’insuffisance des engagements à date pour limiter les émissions de gaz à effet de serre. Le round suivant de négociations s'est tenu fin 2012 au Qatar (« COP 18 »). Des observateurs de la COP17 s’amusaient déjà à souligner que l’émirat était alors le plus grand émetteur de CO2 par habitant au monde.

Entre-temps a eu lieu la conférence Rio+20 (20 au 22 juin 2012), 20 ans après la tenue du sommet de la Terre de Rio et l’adoption de la CCNUCC.

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