La première phase du protocole de Kyoto s'est achevée fin 2012 et la prolongation de ce dernier a été actée à l'occasion de la COP 18 de Doha. (©2012 COP18/CMP8 Doha Qatar).
Présentation de l'accord
Le protocole de Kyoto est un traité international ayant pour objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Acté en 1997, il est le prolongement de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) adoptée en 1992 au sommet de la Terre à Rio de Janeiro (Brésil). L’objectif initial du protocole de Kyoto était de parvenir durant la période d’engagement 2008-2012 à la réduction des émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique d'au moins 5% par rapport aux niveaux de 1990(1) dans les pays engagés. Une seconde période d'engagement a été fixée lors du sommet de Doha en décembre 2012. Elle s'est étendue du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2020.
Le protocole a été signé le 11 décembre 1997 lors de la troisième conférence annuelle des Parties (« COP3 ») à Kyoto au Japon. Pour entrer en vigueur, il devait être ratifié par 55 pays développés générant en consolidé au moins 55% des émissions mondiales de gaz à effet de serre en 1990. Il est entré en vigueur le 16 février 2005.
À ce jour, 196 « Parties » (195 États et l'Union européenne) ont déposé leurs instruments de ratification(2), d’accession, d’approbation ou d’acceptation, à l’exception notable des États-Unis, alors plus gros émetteurs de gaz à effet de serre. En effet, le protocole a été signé sous la présidence Clinton, mais n’a pas été ratifié par le Sénat américain.
Le protocole de Kyoto vise à réduire les émissions anthropiques de 6 gaz à effet de serre.
Seuls 37 pays industrialisés se sont réellement engagés sur les objectifs de ce dispositif. En pratique, les sanctions consécutives au non-respect du protocole de Kyoto n’ont jamais été clairement définies. Dans les faits, l’accord n’est légalement pas contraignant à ce jour. Les objectifs des pays engagés par le protocole ont toutefois été largement dépassés (-22,6%)(3).
Rappelons que l'ambition de la COP21 à Paris fin 2015 est précisément de trouver un accord global qui soit juridiquement contraignant.
Objectifs et engagements
Objectifs
Le protocole de Kyoto vise à réduire les émissions des gaz à effet de serre dues à l’activité humaine.
Les six gaz énoncés dans le traité sont les suivants :
- le gaz carbonique ou dioxyde de carbone(CO2), produit lorsque des composés carbonés sont brûlés et en présence d'oxygène (combustion d’énergies fossiles, éruptions volcaniques, respiration des plantes, des animaux et des hommes, incendies naturels de forêts, etc.) ;
- le méthane (CH4), dû :
- aux fuites dans la gestion des gisements d’énergies fossiles (émissions des mines de charbon, fuites lors de l’exploitation du gaz naturel — méthane — et torchage incomplet du méthane relâché par l’industrie pétrolière) ;
- à la décomposition de la cellulose par les bactéries (fermentation anaérobie de la biomasse dans les zones humides (marais, tourbières, rizières, etc.), dans les décharges, dans la panse des bovins) ;
- à la combustion incomplète de la biomasse notamment lors des feux de forêts ;
- deux halocarbures (HFC et PFC) : les gaz réfrigérants utilisés pour la climatisation et les gaz propulseurs des aérosols ;
- le protoxyde d'azote ou oxyde nitreux (N2O) issu d’engrais azotés et de certains procédés chimiques ;
- l'hexafluorure de soufre (SF6), utilisé dans des transformateurs électriques.
Engagements pris
Les pays développés ou en transition vers une économie de marché qui se sont engagés à limiter ou à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (Parties visées à l’annexe B du Protocole)(4) regroupent des pays comme l’Allemagne, la France, la Suisse, le Japon, le Canada, la Russie. Ces pays ont en moyenne décidé de réduire d'au moins 5% leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) sur la période 2008-2012 par rapport aux niveaux de 1990 (sauf pour les cinq pays ayant une période de référence différente).
Le Japon a accepté d’accroître cet objectif de réduction à hauteur de 6% et l’Union européenne de 8%. Constituée de 15 États membres au moment de sa ratification du protocole en mai 2002, l’Union européenne a décidé de répartir la charge de cet objectif entre lesdits États. Par la suite, la plupart des pays ayant adhéré à l'UE se sont engagés à réduire leurs émissions de GES avec un objectif similaire(5).
Les États-Unis qui ont uniquement signé le protocole (et non ratifié) ont manifesté l’intention de réduire leurs émissions de 7%.
Les engagements des Parties constitutives de l’Annexe B sont alors considérés comme ambitieux. Le protocole de Kyoto leur fixe une quantité d’émissions de GES qui ne doit pas être dépassée au cours de la première période dite d’engagement de 2008 à 2012.
Le protocole de Kyoto prévoit trois mécanismes de « flexibilité » auxquels les pays développés peuvent recourir pour réduire leurs émissions comptabilisées.
Chaque Partie doit s’engager à ne pas dépasser la quantité globale d’émissions attribuée prenant en compte les 6 gaz mentionnés (sur la base de « l'équivalent CO2 »). Toutes ont dû soumettre avant la période d’engagement 2008-2012 un rapport sur leurs émissions de GES.
Par ailleurs, le protocole de Kyoto prévoit trois mécanismes de « flexibilité » auxquels les pays développés peuvent recourir. Ces mécanismes s’ajoutent aux mesures qui peuvent être mises en place sur le plan national pour réduire les émissions de GES :
- les permis d’émission, mécanisme qui permet de vendre ou d’acheter des droits à émettre des GES entre les pays industrialisés afin d'améliorer les systèmes de production les plus polluants. Les États membres fixent pour chaque période des objectifs de réduction d'émission de GES à chacune des installations concernées grâce à un Plan National d'Affectation des Quotas (PNAQ) ;
- la « mise en oeuvre conjointe » (MOC), mécanisme de financement de projets ayant pour objectifs principaux le stockage de carbone et la réduction des émissions de GES. Elle concerne principalement les projets industriels et forestiers lancés en Russie et dans les pays d’Europe centrale et orientale. Entre deux pays industrialisés, elle donne la possibilité aux entreprises d’investir dans des « projets propres » en dehors de leur territoire national. Ceux-ci permettent de générer des crédits d’émission de GES utilisables par les investisseurs ;
- le « mécanisme de développement propre » (MDP), mécanisme qui permet aux pays développés de réaliser leurs objectifs de réductions d’émissions de GES en investissant dans des projets réduisant les émissions de GES dans des pays en voie de développement En retour, ils obtiennent des crédits d’émission pouvant être utilisés pour leurs propres objectifs de réduction d’émissions de GES.
Le système communautaire d’échange de quotas d’émission (SCEQE) a été initié le 1er janvier 2005 en Europe. Il s’agit du premier et du plus grand système d’échange de quotas d’émission de GES mis en place dans le monde. Il couvre actuellement plus de 11 000 installations européennes.
Durant la phase 1 (2005-2007) du SCEQE, le prix du carbone et le principe d’échange de quotas ont été définis. Durant la phase 2 (2008-2012), les quotas étaient encore gratuits mais les sanctions ont été durcies en cas de dépassement du plafonnement d’émissions autorisées. En raison de l'incapacité du SCEQE à fixer un réel signal prix du carbone, une révision a été actée en 2009 pour la phase 3 (2013-2020) avec de nombreuses modifications : plafond d’émissions unique pour l’UE (au lieu des précédents plafonds nationaux), mise aux enchères des quotas (qui doit être progressivement élargie), inclusion de nouveaux secteurs, etc.
Les unités du marché du carbone :
- Unité de Quantité Attribuée (UQA) : il s’agit de la quantité d’émissions attribuée par pays de l’Annexe B, répartie en tonnes d’équivalent CO2.
- Unité de Réduction des Emissions (URE) : ce sont les crédits attribués pour des réductions d’émissions réalisées dans le contexte de la mise en œuvre conjointe (MOC). Cette unité équivaut à une tonne métrique d’équivalent de CO2.
- Unité de Réduction Certifiée des Emissions (URCE) : ce sont des crédits attribués pour des réductions d’émissions réalisées dans le contexte du mécanisme de développement propre (MDP). Cette unité équivaut à une tonne métrique d’équivalent de CO2.
Signature et ratification
Entre sa signature en 1997 et son entrée en vigueur en 2005, le protocole de Kyoto a été ratifié en plusieurs phases successives.
A l'heure actuelle, 196 « Parties » (195 pays et l'Union européenne) ont déposé leurs instruments de ratification, d’accession, d’approbation ou d’acceptation du protocole de Kyoto. Par la « signature » d’une Convention, un État exprime, en principe, son intention de devenir Partie à la Convention. Mais la signature ne préjuge en aucun cas l'éventuelle suite (ratification ou non) que donnera cet État. Par contre, la « ratification » entraîne une obligation juridique pour l'État ratifiant de mettre en œuvre la Convention.
La première période du protocole de Kyoto n'a réellement engagé que 37 pays industrialisés.
Toutefois, le protocole n’a réellement réellement que 37 pays industrialisés durant la première période. Selon la convention sur le changement climatique de 1992, les pays développés doivent être à l’avant-garde de la lutte contre les changements climatiques. Les pays en développement, y compris le Brésil, la Chine, l’Inde et l’Indonésie, sont également parties prenantes au protocole mais ne sont pas concernés par l’engagement de réduction d’émissions de GES.
Réengagement
Lors de la conférence de Doha en 2012, les parties prenantes ont convenu de prolonger le Protocole de Kyoto jusqu'en 2020. Ce deuxième engagement a été essentiel pour maintenir un cadre international de réduction des émissions de gaz à effet de serre en attendant la mise en place de l'Accord de Paris.
Pour entrer en vigueur, le deuxième engagement du Protocole de Kyoto nécessitait la ratification par un nombre suffisant de pays. Cela a été réalisé grâce aux efforts diplomatiques et à la volonté politique des nations participant aux négociations.
Durant la période de prolongation, plusieurs pays se sont engagés à des objectifs plus ambitieux de réduction des émissions de gaz à effet de serre. L'Union européenne, par exemple, a visé une réduction de 20 % des émissions par rapport aux niveaux de 1990.
Le réengagement au Protocole de Kyoto a servi de transition vers l'Accord de Paris, adopté en 2015, qui vise à inclure tous les pays dans un effort global pour limiter le réchauffement climatique à moins de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels.
Dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, des résistances nationales existent parfois encore lorsque les pays estiment que leurs intérêts économiques sont menacés. La Pologne, qui produit près de 90% de son électricité à partir de charbon, a par exemple refusé de ratifier le prolongement du Protocole de Kyoto en octobre 2015. De même pour le Japon et le Canada.
Enjeux ayant mené à la soumission d'un tel traité
Enjeux environnementaux
De nombreux scientifiques s'accordent sur le fait que les températures moyennes pourraient encore augmenter de 1,4 à 5,8°C à l’horizon 2100 par rapport à 1990 (dans le cadre de la COP21, c'est l'ère pré-industrielle qui est prise comme période de référence)(6). Les conséquences d’une telle augmentation pourraient être considérables : désertification, inondations, dissémination des maladies, disparitions d'espèces animales, etc. Le réchauffement climatique est donc considéré par beaucoup comme le défi environnemental du XXIe siècle. Le protocole de Kyoto illustre l’importance que les pays mondiaux accordent à l’environnement et à la relation entre l’humanité et l’équilibre naturel de la planète.
Enjeux économiques
La mise en place du marché de permis d’émission de CO2 soulève de nombreuses questions économiques sur les implications financières pour les pays signataires du protocole de Kyoto. Comment les entreprises intégreront-elles la contrainte CO2 dans leurs comptes financiers et dans leurs prévisions de développement ? Quelles contreparties financières seront associées à l'engagement des pays en voie de développement de participer à l'effort collectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre ?
Le protocole de Kyoto redessine le clivage Nord-Sud en exonérant les pays en développement des responsabilités climatiques.
Par ailleurs, le protocole de Kyoto redessine le clivage Nord-Sud. Il exonère les pays en développement et les pays émergents des responsabilités climatiques cruciales, sans contrepartie financière. Les pays en développement ont une démographie et une consommation énergétique en forte croissance. Les pays industrialisés, qui sont jugés historiquement responsables des émissions anthropiques de gaz à effet de serre, sont incités à financer des « projets propres » dans des pays en développement s’ils ne parviennent pas à atteindre leurs objectifs nationaux.
Les autres sommets et traités pour l'environnement
Les Sommets de la Terre sont des rencontres entre les dirigeants mondiaux ayant lieu tous les 10 ans depuis 1972. Ils ont pour but de stimuler le développement durable au niveau mondial. Le premier sommet a eu lieu à Stockholm (Suède) en 1972, le deuxième à Nairobi (Kenya) en 1982, le troisième à Rio de Janeiro (Brésil) en 1992, le quatrième et dernier avant Kyoto à Johannesburg (Afrique du Sud) en 2002.
Le Sommet de 1992 a donné naissance à la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) et a vu l’adoption de la Convention sur le Climat. Celle-ci confirme la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre et a abouti à la signature en 1997 du protocole de Kyoto.
La ratification du protocole de Kyoto par la Russie en octobre 2004 a permis son entrée en vigueur 4 mois plus tard.
La négociation de Bonn finalisée à Marrakech en 2001 a permis la ratification par de nombreux pays en 2002 : par exemple, l’Union européenne alors composée de 15 États membres le 31 mai 2002, le Japon le 4 juin 2002. Par la suite, la Russie a ratifié le protocole le 22 octobre 2004 et cela a permis l’entrée en vigueur du protocole le 16 février 2005. En effet, pour entrer en vigueur, le protocole de Kyoto devait d’abord être ratifié par 55 pays représentant 55 % des émissions totales de GES en 1990.
En décembre 2009, la Conférence de Copenhague a abouti à un accord a minima non contraignant visant à réduire de moitié les GES en 2050 par rapport à 1990.
En décembre 2010, la Conférence de Cancun a réaffirmé cet objectif et mis en place l’allocation d’un Fonds Vert de 100 milliards de dollars par an pour aider les pays en voie de développement à lutter contre les changements climatiques et la déforestation. Cette conférence a par ailleurs révélé un point de désaccord sur la question de la prolongation du protocole de Kyoto, dont la première phase s'est achevée en 2012 : le Japon, la Russie et le Canada réclamaient la ratification des deux principaux pays consommateurs mondiaux, la Chine et les Etats-Unis.
Lors de la Conférence de Durban en décembre 2011, les Parties se sont entendues sur une feuille de route visant un accord en 2015 englobant tous les pays pour lutter contre le réchauffement climatique. Cet accord devrait entrer en vigueur à partir de 2020.
En 2012, la prolongation du protocole de Kyoto a été actée lors de la Conférence de Doha en décembre 2012. Le Japon, la Russie et le Canada ont refusé de poursuivre leurs efforts de réduction dans un cadre ne s'appliquant pas à la Chine et aux États-Unis. La seconde période d'engagement concerne 37 pays dont les membres de l'Union européenne et l'Australie.