- Source : Ifri
Après un an de mandat, l’action de Donald Trump en matière d’énergie a entre autres été marquée par l’annonce en juin 2017 du retrait américain de l’accord de Paris. Cet épisode ne constitue toutefois que « la partie émergée de l’iceberg » d’une politique en rupture systématique avec la présidence de Barack Obama, rappelle l’ancien diplomate Jean-François Boittin.
Dans cette étude publiée le 12 janvier par le Centre Énergie de l’Ifri, ce spécialiste de la politique économique américaine(1) rappelle le contexte énergétique américain (marqué en particulier par l’essor des hydrocarbures non conventionnels, « facteur de continuité » entre la présidence d’Obama et celle de Trump), les engagements de campagne et mesures de Donald Trump mais aussi les nombreuses oppositions auxquelles il se heurte.
Entre 2008 et 2015, la production américaine de pétrole brut a plus que doublé grâce aux progrès techniques permettant l’exploitation de ressources non conventionnelles et devrait encore très fortement croître en 2018(2). Depuis octobre 2013, les États-Unis produisent davantage de brut qu’ils n’en consomment(3) et sont désormais de loin le premier producteur d’hydrocarbures liquides au monde.
Avec le développement du gaz de schiste – qui comptait pour presque 60% de la production gazière américaine en 2016 contre à peine plus de 10% en 2008 –, les États-Unis envisagent une très forte hausse de leurs exportations gazières sous forme de GNL. Dans ce contexte, Donald Trump a développé un concept de « domination énergétique » américaine.
Soutenu lors de son élection par l’industrie charbonnière, le président américain s’est par ailleurs engagé à soutenir le « King Coal », notamment en remettant en cause le Clean Power Plan. Le recul du charbon est toutefois étroitement lié à des facteurs de marché, en particulier la concurrence du gaz naturel mais aussi la faible demande d’électricité et l’essor des énergies renouvelables.
Donald Trump et le directeur de l’EPA(4) Scott Pruitt ont marqué leur opposition aux subventions fédérales en faveur des énergies renouvelables(5) mais les électeurs des deux grands partis américains y restent largement favorables selon les sondages d’opinion (73% des électeurs de Donald Trump pensent que les États-Unis devraient utiliser davantage les renouvelables selon le think tank conservateur Clear Path).
Le changement climatique fait en revanche l’objet d'importants désaccords au sein de l’opinion publique américaine. Cette problématique est « un non-sujet » pour l’administration de Trump, face aux priorités affichées, à savoir la croissance économique et l’indépendance énergétique. Les États fédéraux, villes et entreprises américaines qui disposent d’importants pouvoirs pour réduire les émissions nationales de gaz à effet de serre(6) constituent ainsi les nouveaux porte-paroles américains de la lutte contre le réchauffement climatique.
Sources / Notes
- Jean-François Boittin est chercheur associé au Centre Énergie de l’Ifri depuis juillet 2017.
- L’EIA prévoit une production de 9,8 millions de barils par jour (Mb/j) en 2018, contre 8,9 Mb/j en 2016.
- Le pays continue toutefois d’importer du pétrole brut lourd pour approvisionner ses raffineries, ce qui permet d’augmenter ses exportations de produits pétroliers.
- Environmental Protection Agency.
- Mises en place en 2015.
- Les villes américaines jouent entre autres un rôle central dans l’organisation des transports et la réduction des émissions des bâtiments. La ville de Seattle a par exemple pour objectif de réduire de 5% la consommation d’énergie des locaux commerciaux « en imposant un ajustement des systèmes de conditionnement d’air, de chauffage et de ventilation », indique Jean-François Boittin.