Près de 80% des panneaux solaires fabriqués dans le monde le sont aujourd'hui en Chine. (©photo)
Il y a tout juste une semaine, la Commission européenne a annoncé sa proposition de faire peser des droits de douane « anti-dumping » de 47% en moyenne sur les importations de panneaux solaires chinois et de leurs principaux composants. Ces taxes visent à protéger l’industrie européenne de pratiques anticoncurrentielles. Rappels.
Vers des droits douaniers renforcés
La Chine a misé sur le développement des énergies renouvelables depuis le début des années 2000 et fortement soutenu ses entreprises par le biais de financements des banques d’État(1). Ces pratiques entraînant des prix plus faibles rendent de fait les entreprises européennes moins compétitives.
A ce titre, le commissaire européen au commerce Karel de Gught a proposé aux 27 États membres la mise en place de taxes provisoires sur les importations de modules solaires provenant de Chine, pouvant aller de 37% à 68%. Les détails de cette proposition sont restés confidentiels. Les États doivent se prononcer à ce sujet d’ici le 6 juin prochain.
Cette proposition s’intègre dans le cadre d’une procédure anti-dumping. En juillet 2012, des industriels européens réunis au sein de l’association EU Pro Sun ont alerté la Commission sur les prix des matériaux solaires importés de Chine, jugés anormalement bas. Une enquête a été ouverte au niveau européen en septembre 2012 afin d’évaluer le caractère déloyal ou non des pratiques chinoises dans ce secteur. La Commission européenne dispose d’un délai de 15 mois, soit jusqu’au 6 décembre 2013, pour conclure cette enquête. La proposition actuelle de droits douaniers provisoires vise à préserver les industriels européens d’ici là. Notons que l'ensemble des acteurs européens du secteur ne sont pas favorable à la proposition de taxes provisoires, certains craignant que cela ralentisse le développement du solaire, en particulier photovoltaïque.
Rapport de force avec Pékin
La mise en place de droits douaniers « anti-dumping » engendre des rapports de force délicats entre Pékin et l'Union européenne. Des tensions similaires existent entre la Chine et les États-Unis : outre-Atlantique, des constructeurs du secteur ont remis dès octobre 2011 une pétition au département du commerce pour augmenter les droits de douane sur les importations chinoises. Des taxes ont depuis été entérinées et confirmées en octobre 2012.
La Chine a annoncé, par le biais de son agence nationale officielle Chine Nouvelle, que la proposition douanière soumise aux États membres de l’UE pourrait se retourner contre les intérêts économiques de l’Europe, si elle était adoptée. Vendredi dernier, la Chine a annoncé le lancement d'une enquête anti-dumping sur les tubes à soudure importés de l'Union européenne, du Japon et des États-Unis.
La Chine se trouve face à un tournant alors que le secteur du photovoltaïque est actuellement en situation de surproduction (l’offre, portée par la Chine, est approximativement deux fois plus forte que la demande). Le pays a jusqu’ici principalement misé sur les exportations. Ces exportations de panneaux et de composants solaires auraient atteint, en 2011, un montant record de près de 21 milliards d’euros rien que vers l’Europe.
Cette situation pourrait toutefois s’infléchir sous le double effet de nouvelles mesures douanières défavorables et des freins au financement du secteur. La mise en faillite en mars dernier de la société chinoise Suntech, numéro un mondial du secteur, témoigne que les acteurs chinois rencontrent eux aussi des difficultés sur ce marché.