- Source : Ifri
« Il n’est plus rare de trouver des projets pétroliers dans l’Arctique avec un seuil de rentabilité à moins de 35 dollars par baril », constate Mikaa Mered, professeur de géopolitique à l’Institut libre d’étude des relations internationales (ILERI), qui cite notamment en exemple le champ de Johan Castberg en mer de Barents(1) (nord de la Norvège).
Dans l’éditorial ci-après publié par le Centre Énergie de l’Ifri le 23 janvier, Mikaa Mered souligne que l’Arctique, outre ses ressources d’hydrocarbures(2) qui suscitent un intérêt croissant et dont l’exploitation inquiète les organisations environnementales, pourrait jouer un rôle important dans la « transition énergétique » mondiale.
D’importants gisements de terres rares seraient en effet présents dans le sous-sol (« terrestre » et « marin ») de cette vaste zone entourant le pôle Nord(3). L’Arctique russe disposerait en particulier des deuxièmes ressources estimées d’oxydes de terres rares au monde après la Chine. Plusieurs grands gisements sont en production (Lovozero en Russie) ou devraient l’être dans les cinq ans à venir (Tomtorskoye en Russie, Nechalacho au Canada, Kvanefjeld au Groenland).
De façon plus étonnante, Mikaa Mered signale également que l’Arctique pourrait s’affirmer comme une zone de développement importante pour la production d’« hydrogène vert ». Le projet « HYPER », mené par le centre de recherche SINTEF, envisage par exemple de produire de l’hydrogène à partir de différentes ressources énergétiques provenant de Norvège : d’une part à partir d’électricité d’origine renouvelable (par électrolyse, notamment en utilisant la production éolienne excédentaire) mais aussi à partir de gaz naturel (par vaporeformage en captant les émissions de CO2 associées à ce procédé)(4).
Il est enfin rappelé par Mikaa Mered que le projet « Global Energy Inteconnexion » d’un smart grid électrique à l’échelle mondiale, porté par le groupe chinois SGCC, prévoit un rôle stratégique de l’Arctique qui serait interconnecté aux autres continents à l’horizon 2050(5).
Sources / Notes
- Alors que le projet initial envisageait une mise en production sur la base d’un prix de plus de 80 $ par baril, le groupe norvégien Equinor indique désormais que l’exploitation y sera profitable « à des prix du pétrole inférieurs à 35 $ par baril ».
- En 2008, une étude de l'USGS américaine, encore fréquemment citée aujourd'hui, estimait entre autres à 90 milliards de barils les ressources de pétrole de l'Arctique. Les volumes récupérables devraient avoir significativement augmenté depuis avec les progrès technologiques (et notamment le développement de l'exploitation d'hydrocarbures non conventionnels).
- L’Arctique désigne la vaste région entourant le pôle Nord et s’étendant sur une partie de 8 pays : le Danemark (avec le Groenland), l’Islande, la Norvège, la Suède, la Finlande, la Russie, les États-Unis (avec l’Alaska) et le Canada.
- Projet HYPER, SINTEF.
- L’Arctique pourrait, selon les estimations de SGCC, fournir 600 TWh par an d’électricité d’origine éolienne, grâce aux excellentes ressources de vents dans cette zone (en particulier au Groenland et dans le nord de l’Islande).