Groupe de visiteurs sur la centrale solaire photovoltaïque de Bouloc, en Haute-Garonne. (©EDF-Pascal Rondeau)
La participation des particuliers et des collectivités locales dans les projets d’énergies renouvelables est en plein développement en France. Elle est jugée « nécessaire à l’accélération de la transition énergétique » par l’Ademe dans un nouvel avis publié le 10 décembre(1).
« Crowdfunding » et participation à la gouvernance
Pour faciliter le développement des projets d'énergies renouvelables(2) – certains faisant l’objet de recours « qui allongent considérablement leur durée de développement, voire les empêchent d’aboutir » – de plus en plus de développeurs s’appuient sur une participation des citoyens et des collectivités locales. Ces acteurs peuvent contribuer au financement des projets sur des plateformes de « crowdfunding » ou être encore davantage impliqués dans leur gouvernance.
Dans le cas de projets faisant l’objet d’un financement participatif en ligne (« crowdfunding »), les investisseurs financent « une part de la dette »(3) des porteurs de projets et reçoivent en retour des intérêts. Ces contributions interviennent généralement après les premières étapes risquées de développement du projet (étude de faisabilité réalisée et permis obtenu). Elles s'inscrivent « habituellement dans le cadre d'un contrat financier de prêt ou obligation (participations de 10 à 2 000 € selon les campagnes) d’une durée de 2 à 5 ans assorti d’un taux d’intérêt brut généralement compris entre 2% à 6% ».
En 2018, l’Ademe faisait état de 153 projets portant sur un montant total de 38 millions d'euros de financement participatif(4). Selon l’Iddri (Institut du développement durable et des relations internationales), « plus d’1/3 des nouveaux projets ENR qui se sont montés en France entre 2016 et 2018 ont fait appel à du crowdfunding ».
Les citoyens et collectivités locales peuvent s’impliquer plus activement et avoir « le contrôle effectif » de projets d'énergies renouvelables en en étant actionnaires. Ils sont alors rémunérés sous forme de dividendes. Ils sont parfois présents dès l’origine du projet et peuvent alors avoir une influence forte sur son orientation (en définissant « collectivement le lieu du projet, ses caractéristiques techniques et ses performances environnementales : intégration paysagère, respect de la biodiversité, minimisation des nuisances »(5)). Ces projets sont généralement dits « à gouvernance locale » lorsque les collectivités et citoyens « détiennent au moins 40 % des droits de vote sans qu'aucun autre actionnaire ne détienne de fraction supérieure(6)» mais il n’existe pas de définition officielle en droit français(7).
L’Association Énergie Partagée et ses partenaires contribuent à accompagner les citoyens se lançant dans ces projets à gouvernance locale. En 2019, l’Ademe répertorie en France près de 110 projets de ce type déjà en service (pour 148 MW installés(8)) et 125 projets supplémentaires (222 MW) « à l’étude », impliquant au total 11 000 citoyens(9).
Vers une massification des participations citoyennes ?
Les projets d'énergies renouvelables incluant une participation citoyenne font l'objet d'un soutien de l'État. Dans le cas des projets à gouvernance locale, un bonus est octroyé avec « des exigences reposant notamment sur la part de capital détenu par les citoyens et les collectivités ». Pour « conforter l’implication effective des acteurs locaux dans la gouvernance », l’Ademe suggère « d’imposer que cette part de capital soit définie relativement à la taille du projet (€/kW) et non pas uniquement relativement à ses fonds propres, qui peuvent, pour certains modes de financement, être très faibles ».
Le développement du crowdfunding bénéficie lui aussi d’un soutien public « incitatif apporté lors des appels d’offre lancés par l’Etat via un bonus participatif appliqué sur le prix d’achat de l’électricité produite » (uniquement pour les projets d’électricité « renouvelable »). Un cadre réglementaire a été fixé en 2014 pour le financement participatif, ce qui a permis le développement de plateformes dédiées (Lendosphere, Enerfip, Lendopolis, LUMO, etc.). Pour une « massification » de ces contributions citoyennes, l’Ademe souligne que « la distribution de tels produits localisés par les banques de détail pourrait permettre d’accompagner un plus grand nombre de projets tout en fléchant les revenus de ces placements à la maille du territoire »(10).
À titre indicatif, l’Ademe rappelle qu’un projet d’énergie renouvelable est en moyenne financé pour 10% à 30% sur fonds propres (capital apporté par les actionnaires investisseurs qui sont ensuite rémunérés sous forme de dividendes) et pour 70% à 90% par de la dette (prêts bancaires ou participatifs).
En 2018, 54% des Français se déclaraient prêts à placer leur épargne dans des projets d’énergies renouvelables alors qu’ils n’étaient que 6% à déclarer « connaitre un moyen de le faire »(11). Un engagement citoyen à grande échelle pourrait avoir un impact très significatif dans le financement de la transition énergétique, sachant que « la somme des comptes courants des ménages, des livrets A, des livrets de développement durable et solidaire et autres produits d’épargne réglementée s’élevait à 1 312 milliards d’euros » à fin 2018, rappelle l’Ademe.