La manne pétrolière et les relations internationales du Nigeria

  • Source : Ifri

Le Nigéria est le principal producteur africain de pétrole, avec une production de 1,54 million de barils par jour (Mb/j) en 2023(1). Le pays a une riche histoire dans ce secteur qui a débuté avant son indépendance (obtenue en octobre 1960)(2).

Le Nigéria a « été profondément influencé par la colonisation, qui a eu des répercussions sur ses structures socio-économiques, politiques et économiques. En particulier, le contrôle du système mondial de crédit par les pays occidentaux développés a eu des répercussions sur le rôle du pétrole dans les relations internationales du pays et sur l'accès à des emprunts justes et équitables », explique Fidelis Allenl(3) dans la note en anglais ci-après publiée ce 17 juillet par le Centre Énergie & Climat de l'Ifri.

Un « fardeau pétrolier »

Le secteur pétrolier compte aujourd'hui pour près de 65% des revenus du Nigéria et pour 85% de ses exportations totales.

Mais comme d'autres pays en développement, notamment africains, le Nigéria est sujet à la « malédiction des ressources naturelles » (concept défini par Richard Auty en 1990 selon lequel les pays disposant notamment de pétrole en abondance ne connaissent pas sur le long terme un développement accéléré, en raison entre autres d'une captation de la rente liée à ces ressources naturelles ou de la corruption). Fidelis Allen évoque pour sa part un « fardeau pétrolier » du Nigéria.

Précisons que le Nigéria dispose par ailleurs des premières réserves prouvées de gaz en Afrique et est le 3e producteur de gaz du continent, derrière l’Algérie et l’Égypte, avec une production de 43,7 milliards de m3 en 2023 selon le Statistical Review of World Energy 2024. Le pays est par ailleurs à la fois l'un des principaux exportateurs mondiaux de GNL (le 7e au monde en 2023) et l'un des pays « torchant » le plus de gaz, en raison du manque d'infrastructures pour capter du gaz associé sur les champs pétroliers.

Un appel à la « décolonialité »

Après avoir vécu sous le régime colonial britannique (de 1861 à 1960)(4), « l’attitude servile du Nigéria en matière de politique étrangère, fondée sur la soif d’investissements dans le pétrole et le gaz, laisse présager des pratiques en matière de prêts qui ne favorisent pas suffisamment les citoyens ordinaires », alerte Fidelis Allen.

Il cible notamment la relation bilatérale avec la Chine dans laquelle « le pétrole semble servir de garantie aux facilités de crédit chinoises. Le Nigéria est ouvert à des relations de prêt dérisoires avec la Chine, avec pour conséquence un endettement croissant ». 

Pour ce Professeur à l'Université de Port-Harcourt au Nigéria, « la solution semble résider dans la décolonialité, définie en termes d’évaluation critique par les citoyens du comportement du système de crédit international face à l’incapacité du secteur pétrolier et gazier à placer le Nigeria au-dessus d’emprunts inconsidérés et non justifiés ».

Lire l'étude :
La manne pétrolière et les relations internationales du Nigeria

Sources / Notes

  1. Contre 1,41 Mb/j pour l'Algérie 1,27 Mb/j pour la Libye et 1,15 Mb/j pour l'Angola.
  2. Le Nigéria a effectué sa première livraison de pétrole en 1958, devenant un producteur de pétrole à l'échelle mondiale
  3. Fidelis Allen est Professeur à l'Université de Port Harcourt au Nigéria.
  4. La colonisation du Nigeria a commencé à la fin du XIXe siècle avec l'arrivée de commerçants et de missionnaires britanniques. Petite ville côtière à l'origine, Lagos est devenue une colonie britannique en 1861.

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