Les deux réacteurs en service de la centrale de Khmelnitski ont généré au total près de 10,5 TWh en 2020. (©Energoatom)
L’Ukraine faisait partie, avant l'attaque de la Russie, des principaux producteurs électronucléaires dans le monde avec ses 15 réacteurs nucléaires. La centrale de Zaporijia (comptant ses 6 réacteurs) est toutefois actuellement aux mains des Russes et ne produit plus d'électricité.
Capacité nucléaire de l'Ukraine
Le parc nucléaire ukrainien est constitué de 4 centrales :
- Zaporijia (6 réacteurs), située dans le sud-est du pays et dotée d’une puissance cumulée de 5 700 MW ;
- Rovno (4 réacteurs), dans le nord-ouest du pays, d’une puissance cumulée de 2 657 MW ;
- South Ukraine (3 réacteurs) dans le sud-ouest du pays, d’une puissance cumulée de 2 850 MW ;
- Khmelnitski (2 réacteurs), dans l’ouest du pays, d’une puissance cumulée de 1 900 MW.
Le parc nucléaire ukrainien en service a une puissance installée de 13,1 GW, ce qui en fait le 8e plus important parc nucléaire au monde en matière de capacité installée (95,5 GW nucléaires aux États-Unis, 61,4 GW en France).
Les réacteurs qu'elle utilise actuellement sont de conception soviétique, mais elle les a convertis au combustible américain.
Production Ukrainienne d'origine nucléaire
L'Ukraine a généré 86,1 TWh en 2021, soit plus de la moitié de la production électrique ukrainienne cette année-là(1). L’énergie nucléaire occupe une place plus importante dans le mix électrique de seulement 2 autres pays dans le monde : la France et la Slovaquie.
Année | Production (en TWh) |
---|---|
1985 | 53,31 |
1986 | 42,71 |
1987 | 50,43 |
1988 | 72,00 |
1989 | 66,52 |
1990 | 76,18 |
1991 | 75,13 |
1992 | 73,75 |
1993 | 75,24 |
1994 | 68,85 |
1995 | 70,52 |
1996 | 79,58 |
1997 | 79,43 |
1998 | 75,24 |
1999 | 72,07 |
2000 | 77,34 |
2001 | 76,17 |
2002 | 77,99 |
2003 | 81,41 |
2004 | 87,02 |
2005 | 88,76 |
2006 | 90,22 |
2007 | 92,54 |
2008 | 89,84 |
2009 | 82,92 |
2010 | 89,15 |
2011 | 90,25 |
2012 | 90,14 |
2013 | 83,21 |
2014 | 88,39 |
2015 | 87,63 |
2016 | 80,95 |
2017 | 85,58 |
2018 | 84,40 |
2019 | 83,00 |
2020 | 76,20 |
2021 | 86,21 |
2022 | 62,07 |
Réacteurs en construction depuis 2024
Deux réacteurs supplémentaires sont en cours de construction au sein de la centrale de Khmelnitski. A la base, la construction de 4 réacteurs avaient été annoncée. Tous les réacteurs sont à eau pressurisée (REP ou PWR en anglais), soit la même filière que l’ensemble des réacteurs nucléaires français. Ils sont exploités par la compagnie nationale Energoatom.
Les travaux ont commencé en avril 2024. Ils utiliseront une technologie (AP1000 de Westinghouse) et un combustible américains. Le projet a pour but d'améliorer la sécurité énergétique de l'Ukraine et de réduire sa dépendance envers la technologie nucléaire russe, ainsi que de compenser la perte de la centrale de Zaporijjia, la plus grande d'Europe, occupée par les forces russes depuis mars 2022.
Les unités auront chacune une capacité de plus de 1 100 mégawatts. Avec six réacteurs en fonctionnement, Khmelnitskiï deviendra la plus grande centrale d'Europe, dépassant Zaporijjia.
Energoatom et Westinghouse n'ont toutefois pas indiqué quand les réacteurs seraient opérationnels.
La centrale de Khmelnitskiï est située dans l'ouest du pays, une zone relativement sûre, mais tout de même régulièrement visée par des frappes russes, d'autant qu'une importante base aérienne y est située. En octobre 2023, le ministère de l'Energie avait ainsi affirmé qu'une attaque avait touché la zone proche de la centrale nucléaire, faisant exploser les vitres de certains bâtiments administratifs et de laboratoires.
Les tensions concernant la centrale de Zaporijia
L'intervention russe en Ukraine suscite de nombreuses inquiétudes, entre autres au sein de la filière nucléaire et de l'AIEA. Outre les informations portant sur la centrale de Tchernobyl, les dangers se multiplient autour des centrales nucléaires ukrainiennes en activité, du fait de la proximité des combats et des coupures d'électricité.
Tombée aux mains de l'armée russe le 4 mars 2022, Zaporijjia, la plus grande centrale d'Europe, a été visée par des tirs et a été coupée du réseau électrique à plusieurs reprises, une situation précaire qui fait craindre un accident nucléaire majeur.
"Les actions militaires ont augmenté, et dans notre mission d'experts permanente, que nous avons à Zaporijjia et aussi dans les autres centrales ukrainiennes, on voit une multiplication des attaques aux alentours" des centrales, a relevé M. Grossi de l'AIEA. "Ca nous préoccupe énormément". Sur place, il a jugé la situation "grave" mais s'était en même temps dit rassuré par le fait que "des mesures sont prises pour stabiliser la situation".
Le patron de l'AIEA a aussi évoqué les coupures d'électricité, "ce qui comporte un risque pour la fonction de refroidissement" des réacteurs.
Dans ce contexte, l'AIEA essaye "d'avoir un aspect dissuasif sur les uns et les autres pour éviter qu'à la misère de cette guerre, on ajoute un accident avec des conséquences radiologiques", a-t-il expliqué.
Les deux camps s'accusent mutuellement de vouloir y provoquer une catastrophe. La Russie a affirmé avoir intercepté neuf drones ukrainiens qui volaient près de la centrale. Moscou avait déjà accusé l'Ukraine d'avoir visé à l'aide de drones une centrale nucléaire dans la région russe frontalière de Koursk, touchant un bâtiment administratif et un dépôt de déchets nucléaires.
De son côté, Kiev avait accusé Moscou de préparer une "provocation" à Zaporijjia, l'armée affirmant que des "objets similaires à des engins explosifs avaient été placés" sur les toits des réacteurs 3 et 4. L'AIEA avait ensuite assuré n'avoir observé "aucune mine ou explosif" sur les toits de ces bâtiments.