Les start-up dédiées au climat naviguent en eaux troubles

  • AFP
  • parue le

Sauver la planète sans changer nos habitudes? Le monde de la tech véhicule depuis des années cette idée, mais certaines innovations présentées cette semaine au Web Summit divisent experts et investisseurs.

La start-up américaine Twelve qui affirme pouvoir créer du carburant propre à partir du CO2 présent dans l'air fait partie des entreprises sous le feu des projecteurs lors de cette grand-messe de l'économie numérique qui se tient jusqu'à jeudi à Lisbonne.

"Nous imitons les arbres et les plantes", a expliqué sa cofondatrice Etosha Cave lundi lors de la soirée d'ouverture de l'événement qui a lieu en même temps que la conférence mondiale sur le climat, COP29, en Azerbaïdjan.

Devant un public captivé, elle a décrit un futur où cette technologie pourrait alimenter les vols longs courriers et aider à l'exploitation de minéraux sur Mars. Une vision utopique qui a permis à Twelve de lever près de 650 millions de dollars.

Mais les affirmations révolutionnaires au sujet des carburants durables ou de nouvelles sources d'énergie devraient être accueillies avec scepticisme selon Mike Berners-Lee, professeur spécialiste du climat et de l'empreinte carbone à l'université de Lancaster au Royaume-Uni.

"Tout le monde cherche une solution miracle pour n'avoir aucune mesure difficile à prendre", avance-t-il.

- Perspective sombres -

D'une façon plus générale, les start-up de la transition écologique, ou "greentech", entre dans une période de turbulences.

Si certaines arrivent à attirer les investisseurs, les financements pour le climat devraient globalement chuter de 50% cette année par rapport à l'année précédente, selon Bloomberg. Et la réélection de Donald Trump, ouvertement climatosceptique et favorable au pétrole, n'est pas de bon augure pour le secteur.

Le républicain avait retiré les États-Unis de l'accord de Paris sur le climat de 2015, avant que Joe Biden ne le réintègre en 2021.

Le nouveau président pourrait réitérer dès son entrée à la Maison-Blanche le 20 janvier, ce qui rendrait le retrait effectif en janvier 2026.

Malgré ces sombres perspectives, les greentech étaient présentes en masse au Web Summit, proposant tous types de solutions, des "centrales électriques virtuelles" basées sur une chaîne de blocs aux gadgets intelligents pour stopper les fuites d'eau, dans l'espoir de séduire les investisseurs.

"Ces innovations sont faites pour provoquer l'étonnement", a expliqué à l'AFP, Elisabeth Gilmore, professeure d'ingénierie environnementale à l'université Carleton au Canada. Mais pour cette experte, les start-up doivent aller plus loin que la seule recherche du profit et fabriquer des produits pour aider les populations.

Si ces solutions étaient "si géniales qu'elles le prétendent, elles devraient déjà être développées à grande échelle", a tempéré Mike Berners-Lee.

Réussir à produire du carburant durable est particulière difficile, a-t-il rappelé, précisant que cela nécessitait des percées technologiques majeures pour le stockage et l'usage de cette énergie.

Etosha Cave a reconnu que sa start-up se servait du réseau électrique pour ses installations même si selon elle, son entreprise a besoin de moins de terrains et d'énergie que les biocarburants traditionnels.

Pour Mike Berners-Lee, c'est la recherche de nouvelles sources d'énergie qui devrait elle-même être questionnée.

"J'ai des réserves fortes sur le fait de fournir à l'humanité une source illimitée d'énergie au-delà des combustibles fossiles - nous causons déjà assez de dégâts avec l'énergie que nous avons", a-t-il conclu.

Ajouter un commentaire