Décarbonation : quels sont les principaux objectifs en France ?

Décarbonation en France

Containers sur le port du Havre

La décarbonation désigne l'ensemble des mesures et des techniques permettant de réduire les émissions de dioxyde de carbone (CO2). Par extension, ce terme est employé pour l'ensemble des gaz à effet de serre (GES).

Le principal objectif de la France en matière de décarbonation est d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050. 

Le terme « décarbonisation » est également encore utilisé dans le langage courant (mais il s'agit d'un anglicisme selon la Commission d'enrichissement de la langue française).

Objectifs de décarbonation de la France

Stratégie nationale bas carbone

Créée en 2015, la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) constitue le cadre d’action en France en matière de décarbonation et d’atténuation du changement climatique. La 3e version de cette stratégie nationale bas carbone a été présentée en novembre 2024 (en concertation jusqu'au 15 décembre 2024)

Elle fixe les objectifs climatiques de la France d'ici à 2030, avec une ambition renforcée : réduire de 50% le niveau des émissions brutes de gaz à effet serre en 2030 par rapport au niveau de 1990, ce qui revient à porter lesdites émissions autour de 270 MtCO2 éq à l'horizon 2030 (l'objectif était de - 40% dans la précédente SNBC). 

Pour atteindre cet objectif, la France devra réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 5% par an entre 2022 et 2030.

Objectifs de la SNBC 3

La SNBC 3 donne également des « premières réflexions sur la trajectoire de décarbonation pour l’horizon 2030-2050 ».

Loi Climat et résilience de 2021

L'article 301 de la loi climat et résilience impose aux secteurs fortement émetteurs de gaz à effet de serre d’établir une feuille de route en associant les représentants des filières économiques, le gouvernement et les représentants des collectivités territoriales pour les secteurs dans lesquels ils exercent une compétence. 

Ces feuilles de route doivent préciser les actions mises en œuvre par chacune des parties pour atteindre les objectifs de baisse des émissions de gaz à effet de serre fixés par la SNBC.

Décarbonation des transports en France

Les transports constituent le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre (GES) en France (avec 131 millions de tonnes équivalent CO2 en 2022, soit environ 33% des émissions nationales). C'est également le seul secteur dont les émissions ont augmenté entre 1990 et 2022 (+ 6,5%) et il constitue le principal défi en matière de décarbonation (notamment car ce sujet - touchant à la « liberté individuelle » - est très sensible, comme l'a rappelé la ministère Agnès Pannier-Runacher lors de la présentation de la 3e SNBC).

« Réduire les émissions du secteur des transports nécessite d’agir sur l’ensemble des leviers : maîtrise de la demande, report modal, augmentation du taux d’occupation pour le transport de voyageurs (ou taux de chargement des véhicules pour le transport de marchandises), amélioration de la performance énergétique des moyens de transport, progression de la part de véhicules électriques produits en France et électrification des moyens de transport/utilisation d’énergies décarbonées telles les biocarburants », souligne la SNBC3.

Objectifs par secteur de la SNBC 3

Décarbonation de l'agriculture 

Les émissions du secteur de l’agriculture étaient de 74 Mt CO2e en 2022 (soit 19% des émissions brutes de la France), « dont 59% des émissions liées à l’élevage, 26% liées aux cultures et 14% liées à la combustion dans les engins, moteurs et chaudières des secteurs », selon la SNBC 3 qui reprend les données de référence du Citepa(2).

Dans la nouvelle stratégie nationale bas carbone, l’exercice de modélisation doit permettre « à ce stade pour le secteur de l’agriculture d’atteindre 67 Mt CO2eq et un niveau de consommation d’énergie finale de 48 TWh à l’horizon 2030 » (schéma ci-après de la SNBC 3). Ce qui constituerait une baisse de 13% des émissions de gaz à effet de serre entre les niveaux de 2021 et de 2030, avec une action particulière sur l'élevage.

Décarbonation de l'agriculture

Décarbonation de l'industrie

L'industrie est le 3e secteur émettant le plus de gaz à effet de serre en France après les transports et l'agriculture (avec environ 18% des émissions nationales) mais il fait l'objet d'une attention particulière. L'État a fait de la décarbonation de l’économie « l’une des principales ambitions du plan d’investissement France 2030 en lui consacrant la moitié de son budget total (54 milliards d’euros). Objectif : diviser par deux les émissions de gaz à effet de serre de notre industrie en 10 ans »(3)

Focus sur les 50 sites industriels les plus émetteurs de France

Les 50 sites industriels les plus émetteurs de France comptent à eux seuls pour 55% des émissions industrielles de la France. Ceux-ci sont encouragés par l'État depuis 2022 à baisser leurs émissions de façon accélérée en échange d'aides publiques.

En novembre 2023, une trentaine d'industriels gérant les sites les plus émetteurs de CO2 (cimenteries, sidérurgistes, fabricants d'engrais, agroalimentaire) ont signé des contrats de transition écologique avec l’État (dont certains couvrent plusieurs sites). 

Ces acteurs sont(4) :

  • Alsachimie ;
  • Aluminium Dunkerque ;
  • Arc France ;
  • ArcelorMittal ;
  • Butachimie ;
  • Cristal Union ;
  • Eqiom ;
  • Heidelberg Matérials ;
  • Holcim ;
  • Humens ;
  • LAT Nitrogen ;
  • Lhoist ;
  • Basell Polyolefines France ;
  • Naphtachimie ;
  • Saint Gobain PAM Canalisation ;
  • Petroineos ;
  • Roquette Frères ;
  • Solvay France ;
  • TotalEnergies Raffinage France ;
  • Trimet France ;
  • Versalis France ;
  • Vicat ;
  • Yara France.

À cette occasion, le ministère français de l'Industrie a estimé « entre 50 et 70 milliards d'euros » le montant des investissements liés à la décarbonation et surcoûts pour les entreprises en 7 ans.

L'exemple de Dunkerque, place forte de l'industrie à décarboner

En avril 2024, Roland Lescure (alors ministre de l'Industrie et de l'énergie) a signé à Dunkerque la première convention ZIBaC (zones industrielles bas carbone), qui vise à financer des études sur les moyens de décarbonation à l'horizon 2030 par le biais de l'Ademe.

« On a signé des contrats de décarbonation avec les 50 sites les plus émetteurs qui représentent 60% des émissions de l'industrie. Vous en avez sept ici », à Dunkerque, a indiqué le ministre, soulignant que ces contrats avaient « des objectifs très concrets, avec entre 45% et 50% des réductions émissions d'ici à 2030 ».

Avec 16 millions de tonnes de CO2 émises par an, Dunkerque représente « 5% des émissions de la France, donc il s'agit de concentrer les ressources pour avoir un maximum d'impact ».

Comparaison entre industries française et allemande

Les émissions directes de l'industrie française (dites de scope 1, en jargon climatique) s'élevaient à 380 grammes de CO2 ou équivalent par euro de valeur ajoutée en 2021, contre 290 grammes de CO2 pour l'industrie allemande, selon une étude publiée en septembre 2024 par La Fabrique de l'industrie et le cabinet conseil McKinsey.

Explication de la différence : l'industrie française est plus représentée dans des secteurs de base très émetteurs comme la métallurgie, la chimie, la fabrication de produits minéraux non métalliques, le papier-carton ou la cokéfaction-raffinage (tandis que l'industrie allemande est plus axée sur des secteurs moins émetteurs, comme l'automobile).

Mais « en considérant le mix électrique des deux pays, l'écart entre la France et l'Allemagne s'annule, voire même s'inverse dans certains secteurs » en raison du mix électrique français très décarboné selon David Lolo, économiste à la Fabrique de l'industrie, auteur de l'étude. En prenant en compte les émissions indirectes de l'énergie utilisée dans l'industrie (scope 2), la comparaison ressort « systématiquement à l'avantage de la France ».

Et au niveau européen ?

Au niveau européen, l’UE a fixé(5) comme ambition de réduire ses émissions nettes de gaz à effet de serre de 55% en 2030 par rapport à 1990(6).

En février 2024, la Commission européenne a publié une communication, recommandant un objectif de réduction nette des émissions de gaz à effet de serre de 90% d'ici à 2040 par rapport aux niveaux de 1990.

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