- AFP
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Le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi, est attendu vendredi sur deux importants sites nucléaires en Iran, au moment où Téhéran affirme vouloir lever "doutes et ambiguïtés" sur son programme controversé.
Le déplacement de M. Grossi est perçu comme une des dernières chances pour la diplomatie avant le retour en janvier à la Maison Blanche de Donald Trump.
Il intervient au moment où, selon le New York Times, l'homme d'affaires Elon Musk, soutien du président américain élu, a rencontré lundi l'ambassadeur d'Iran à l'ONU pour "apaiser les tensions" entre Téhéran et les Etats-Unis.
Donald Trump élu a été durant son premier mandat (2017-2021) l'artisan d'une politique dite de "pression maximale" à l'encontre de l'Iran et a rétabli de lourdes sanctions, que l'administration Biden a maintenues.
En 2018, M. Trump avait retiré les Etats-Unis de l'accord sur le nucléaire conclu entre l'Iran et les grandes puissances trois ans plus tôt.
Le texte prévoyait un allègement des sanctions internationales, en échange de garanties que l'Iran ne cherche pas à acquérir l'arme atomique.
Téhéran conteste avoir de telles ambitions sur le plan militaire et défend un droit au nucléaire à des fins civiles, notamment pour l'énergie.
En représailles au retrait des Etats-Unis de l'accord, l'Iran a considérablement augmenté ses réserves de matières enrichies ces dernières années.
- "Engagement diplomatique" -
Le site de Fordo (centre) est particulièrement surveillé depuis que l'Iran a commencé à y produire de l'uranium enrichi à 60% en novembre 2022, en plus du site de Natanz (centre).
Ce seuil dépasse largement celui de 3,67% fixé par l'accord de 2015 et se rapproche des 90% nécessaires pour produire une bombe atomique, selon l'AIEA.
M. Grossi doit visiter ces deux sites, situés à plusieurs centaines de kilomètres de la capitale Téhéran.
"Natanz est la principale installation d'enrichissement d'uranium de l'Iran, tandis que Fordo abrite certaines de ses centrifugeuses les plus avancées", indique à l'AFP le chercheur Samuel Hickey, du Centre pour le contrôle des armes et la non-prolifération, basé à Washington.
Fordo "compte parmi les sites iraniens les plus sensibles du point de vue de la prolifération", ajoute M. Hickey.
Par cette visite de M. Grossi, "l'Iran montre que l'accès le plus facile à ces installations passe par un engagement diplomatique", souligne le chercheur.
Ce déplacement du chef de l'AIEA intervient avant une possible résolution critique de Londres, Berlin et Paris au Conseil des gouverneurs de l'agence onusienne ce mois-ci.
- "Prêts à coopérer" -
L'Iran fait "semblant de coopérer, afin de saper le soutien à une résolution du Conseil", déclare à l'AFP David Albright, président de l'Institut pour la Science et la Sécurité internationale (ISIS), un organisme basé aux Etats-Unis, spécialisé dans la prolifération nucléaire.
Selon l'AIEA, l'Iran est le seul Etat non doté d'armes nucléaires à enrichir de l'uranium jusqu'au niveau élevé de 60%, tout en continuant à accumuler d'importants stocks d'uranium.
Des traces d'uranium inexpliquées sur deux sites non déclarés près de Téhéran, Turquzabad et Varamin, alimentent également les suspicions de l'agence onusienne.
"Nous essayons de calmer un peu l'atmosphère" pour résoudre cette question, a assuré jeudi le chef de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA), Mohammad Eslami, à la télévision d'Etat.
"Nous sommes prêts à coopérer" avec l'AIEA "pour résoudre les ambiguïtés et les doutes supposés concernant l'activité nucléaire pacifique de notre pays", a déclaré le président iranien, Massoud Pezeshkian, lors d'une entrevue avec Rafael Grossi.
"Nous sommes prêts à négocier sur la base de nos intérêts nationaux et de nos droits inaliénables, mais nous ne sommes PAS prêts à négocier sous la pression et l'intimidation", a pour sa part mis en garde le chef de la diplomatie iranienne Abbas Araghchi, dans un message sur le réseau social X. Il a lui aussi reçu Rafael Grossi, jeudi.
M. Araghchi était en 2015 le négociateur en chef côté iranien des pourparlers sur le nucléaire avec les grandes puissances.