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C'est encore un peu "le parent pauvre" des politiques énergétiques : l'"efficacité" dans les transports, l'industrie, l'habitat... doit progresser, a insisté mercredi l'Agence internationale de l'énergie (AIE) auprès de décideurs de 80 pays réunis près de Paris.
La crise énergétique mondiale a depuis un an fait revenir le sujet des économies d'énergie à l'avant-scène, comme le montre le volume inédit de mesures et investissements engagés.
Mais "maintenant il faut passer à la vitesse supérieure et doubler les progrès d'ici 2030", a plaidé Fatih Birol, le directeur de l'AIE, lors de cette réunion de trois jours au palais des congrès de Versailles.
L'efficacité dans l'usage de l'énergie (moins d'énergie consommée pour un même service rendu) est un enjeu climatique, mais aussi pour l'accès universel à l'électricité, souligne l'agence, émanation de l'OCDE.
Quelque 625 millions de personnes restent sans courant, selon l'ONU, quand deux milliards d'autres devraient s'ajouter à la population mondiale d'ici 30 ans.
Cette année, les investissements mondiaux dans l'efficacité énergétique devraient atteindre un record de 624 milliards de dollars, selon un rapport de l'AIE publié mercredi: rénovation des bâtiments, transports publics, infrastructures destinées aux véhicules électriques... c'est 20% de plus par rapport à 2021.
Par exemple, un quart de l'Inflation Reduction Act de l'administration américaine y est consacré. Le Green Transformation Plan du Japon s'intéresse à l'efficacité dans les immeubles, l'Inde a adopté un projet de "conservation de l'énergie", le Chili une loi efficacité...
Du côté des équipements, les ventes de pompes à chaleur ont crû en 2022 de 10% (+40% en Europe), les véhicules électriques ont représenté 14% du total écoulé (18% attendu en 2023) et les technologies de gestion énergétique de la maison se développent, mais moins nettement.
Les normes progressent aussi, en place dans plus de 100 pays, a recensé l'AIE, qui cite l'Afrique du Sud où les nouvelles lampes devront être équipées en LED.
Résultat, l'efficacité de l'énergie a globalement augmenté de 2,2% l'an dernier, quatre fois le taux des deux années précédentes. Pourtant, cela ne suffit pas.
- "Boîte à outils" -
Il faudrait doubler ces progrès, les relever à 4% par an, pour réduire d'un tiers d'ici à 2030 la demande mondiale d'énergie et les émissions de CO2 du secteur, conformément au scénario de neutralité carbone à l'horizon de 2050 destiné à protéger le monde des pires effets du réchauffement.
Pour cela, les investissements devront tripler, à plus de 1.800 milliards de dollars annuels d'ici 2030.
Or "quand on parle d'énergie propre, les États pensent encore souvent renouvelables, solaire, hydrogène... C'est important, mais il faudrait penser plus aussi à la manière dont on utilise l'énergie", souligne Brian Motherway, responsable Efficacité à l'AIE.
"C'est le parent pauvre des politiques. C'est pourtant la source d'énergie la moins chère et la plus rapide", a dit Jean-Pascal Tricoire, président de Schneider Electric qui coorganise la réunion.
Au rythme actuel, la rénovation thermique des bâtiments en Europe mettra 300 ans, ajoute-t-il.
L'Agence a concocté pour les dirigeants une "boîte à outils", avec des exemples de mesures efficaces et "paquets sectoriels" (cuisson, chauffage, climatisation, financements...)
A Versailles, le ministre ougandais de l'Energie Okaasai Opolot a dit combien l'efficacité serait d'abord une source de "transformation économique" pour son pays.
Pour la Chine, c'est "la base de son développement économique et social".
"Cette dernière décennie, l'intensité énergétique de la Chine a baissé de 26,4%, et la hausse de 3% de notre consommation annuelle d'énergie a soutenu une croissance économique de 6,2%", a expliqué Zhao Chenxin, vice-président de la Commission du développement, qui énumère les actions: essor des renouvelables, "gestion améliorée" de la production énergétique (notamment du charbon, toujours en développement), réglementations sur les immeubles et plus généralement une politique d'économies d'énergie "dès les années 80".
Dans l'UE, les 27 "préparent leurs plans nationaux" pour se conformer aux ambitions réhaussées de l'Union, a dit pour sa part la commissaire Kadri Simson. "Ils ont à leur disposition des centaines de milliards" d'euros du plan de relance.
Une somme qui ne suffira peut-être pas. Le sujet financement a de fait occupé une part des échanges, tandis que l'AIE s'alarme de la montée des taux d'intérêt.