En Afrique, le défi énorme de l'électrification avec ou sans réseau

  • AFP
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L'électrification de l'Afrique représente un défi énorme mais aussi un marché qui attire aussi bien les grands groupes que de petites entreprises qui proposent des solutions "hors réseau", à l'échelle d'une maison ou d'un village.

"En Afrique subsaharienne, 2 personnes sur 3 n'ont pas accès à l'électricité. C'est près de 600 millions de personnes, rappelle Fatih Birol, directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). "C'est une priorité absolue".

Avec la progression démographique, le défi est énorme pour les décennies à venir. D'autant que certaines parties du continent - l'Afrique de l'ouest, les zones rurales - ont beaucoup de retard à rattraper.

"Le développement, la réduction de la pauvreté, passent inéluctablement par la route de la disponibilité de l'énergie électrique", estime Jean-Claude Houssou, ministre de l'Energie du Bénin, qui participait à un atelier de l'AIE consacré à l'Afrique à Paris cette semaine.

Cet ancien cadre d'EDF en France veut doubler en cinq ans le taux d'accès à l'électricité dans les campagnes béninoises, encore très bas (7 à 8%). "C'est la sécurité qui s'améliore parce la lumière arrive... C'est également les enfants qui peuvent avoir de la lumière pour apprendre. Mais aussi les dispensaires ruraux qui peuvent stocker des vaccins ou des médicaments", explique-t-il à l'AFP.

« J'ai failli mourir »

Une réalité que connaît bien Ngalula Sandrine Mubenga. "J'ai failli mourir parce qu'il n'y avait pas d'électricité dans l'endroit où je vivais au Congo, dans la petite ville de Kikwit. Pendant trois jours j'étais entre la vie et la mort tout simplement parce qu'il n'y avait pas d'électricité pour faire l'opération", raconte-t-elle.

Aujourd'hui professeure en génie électrique aux Etats-Unis, elle a fondé la société SMIN Power Group, qui installe des petits systèmes solaires notamment en RD Congo. Une parmi de nombreuses entreprises qui ont fleuri sur ce créneau.

Si l'électrification peut passer par l'extension du réseau classique, cette solution rencontre des limites techniques et financières dans les zones rurales.

Ces dernières bénéficient ainsi de plus en plus de solutions "hors réseau" (ou "off-grid" en anglais), qui peuvent aller d'un mini-système autonome à l'échelle d'un village (avec une petite production thermique, hydraulique ou souvent solaire) à un petit kit solaire individuel couplé à une batterie pour alimenter un foyer.

Elle peuvent ainsi se substituer aux groupes électrogènes au diesel voire aux bougies et lampes à pétrole encore fréquemment utilisées faute de mieux.

En ville, ces solutions peuvent aussi venir en complément de l'alimentation électrique classique pour pallier les coupures de courant, qui peuvent être fréquentes. "Un réseau électrique conventionnel peut coexister avec des micro-réseaux et des mini-réseaux", souligne Ngalula Sandrine Mubenga.

« Un marché »

"Ces solutions off-grid restent plus chères (à utiliser) qu'une solution connectée mais, quand on est dans une zone rurale, le coût de construction des infrastructures de transport d'électricité est pharaonique", souligne Laurent Morel, du cabinet PwC. "Il y a la place pour un marché", juge-t-il.

Ce marché a vu naître des start-ups florissantes comme la britannique Bboxx ou Baobab+, fondée par un Français, qui proposent des kits solaires avec une électricité prépayée - ce qui permet des paiements journaliers à faibles montants pour les foyers ruraux pauvres.

Les grands groupes ne sont pas en reste. EDF a par exemple pris à l'automne une participation de 50% dans Bboxx au Togo tandis qu'Engie vient d'inaugurer un "mini réseau" dans un village en Zambie.

"On voit qu'il y a de grand acteurs, ce qui n'était pas forcément le cas avant, qui viennent se positionner", remarque Laurent Morel.

Restent des défis et d'abord le financement pour les mini- réseaux, pour lesquels l'aide de bailleurs de fonds comme la Banque mondiale ou la Banque africaine de développement (BAD) est souvent essentielle. "La population de l'Afrique représente presque 20% de la planète mais sa part dans les investissements mondiaux dans l'énergie est de seulement 5%", regrette Fatih Birol.

Autre gros enjeux: éviter que le continent ne se transforme en "cimetière" de panneaux solaires abandonnés, faute de réparation adéquate et de solution d'après-vie. Laurent Morel prône ainsi une "logique de vision complète et circulaire de la filière", avec la formation de techniciens sur place.

Commentaires

Pierre-Ernest
Si je me fie aux déclarations bien senties de quelques hommes d'État Africains, l'alimentation solaire de l'Afrique n'est pas exactement le genre de projets auxquels ils adhèrent le plus. Je veux dire par là que les hommes d'État qui ont le courage de ne pas trop compter sur les subsides promis à l'occasion de la COP 21 ont décidé de passer par les énergies fossiles pour leur développement et de le dire. Saurions-nous leur en vouloir ?
Victor Mbumba
Je suis d'accord avec le Dr Ngalula Sandrine Mubenga, qu' il y a vraiment un défi énorme en Afrique dans le secteur d'électricité sur tout dans mon pays la Rep. Dem. du Congo où 11 % seulement de la population est connectée au réseau. C'est aussi vraiment regrettable de voir ce pays toujours dans obscurité. Je crois que c'est une manque de bonne volonté et mauvaise gérance. Dieu a beni ce beau pays avec une grande rivier pour nous servir comme source d'energy et croissance économique. Il faut seulement lire sur la capacité de barrage d'Inga sur google pour savoir ce manque de bonnes volonté. Et je n' arrive pas a comprendre pourquoi le Grand Inga pendant que Inga I et Inga II ne sont pas encore utilisés dans leurs maximum capacité.
Emmanuel Grenier
Le solaire est très intéressant, mais cher. Il peut jouer un rôle d'appoint, mais il nécessite de gros besoins de stockage, pour l'instant surtout assuré par les batteries. Il ne pourra servir le développement de l'Afrique que s'il est associé à l'hydroélectricité. Victor a raison de souligner que la réalisation du Grand Inga est une urgence. Cela pourrait servir le Congo mais aussi les voisins. Et c'est une énergie décarbonée, compatible avec la COP 21. Vu la situation africaine, les dirigeants ont raison de privilégier le développement sur le solaire. Mais ils feraient mieux de préférer l'hydro au charbon !
Ngarmig Nig Dj…
Bien plus que les choix technologiques, notamment pour ce qui est du solaire off-grid qui importe, il s’agit de commencer à travailler sur la mise aux normes des équipements qui entrent dans la construction des centrales solaires notamment car nos contextes sont assez particuliers pour qu’on se préoccupe de l’optimisation des investissements qui vont engloutir l’essentiel de nos ressources pour des économies déjà peu resilientes aux chocs exogènes et même endogènes.

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