ASNR : la nouvelle autorité de sûreté nucléaire en service mais beaucoup reste à faire

  • AFP
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L'Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), désormais seule entité chargée de la sûreté nucléaire en France, est entrée en service le 1er janvier, actant ainsi la fusion contestée de l'IRSN et de l'ASN, mais des "incertitudes" demeurent et la réorganisation reste encore à finaliser.

2e autorité de régulation nucléaire du monde

La coup d'envoi de cette autorité unique marque le clap de fin du système dual né des leçons de la catastrophe de Tchernobyl, qui reposait d'un côté sur l'IRSN, l'expert scientifique de la sûreté, et de l'autre sur l'ASN, le gendarme chargé des décisions sur les centrales.

La réforme créée par la loi du 21 mai 2014 prévoyait l'absorption de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et de ses 1 600 salariés de droit privé par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et ses 500 fonctionnaires, dans l'optique de "fluidifier" les décisions, en vue de la relance d'un programme nucléaire en France.

"Autorité administrative indépendante, l'ASNR assure désormais, au nom de l'État, le contrôle des activités nucléaires civiles en France. Elle exerce également les missions de recherche, d'expertise, de formation et d'information des publics dans les domaines de la sûreté nucléaire et de la radioprotection", a indiqué jeudi l'ASNR dans son premier communiqué.

Basée au siège de l'ex-ASN à Montrouge (Hauts-de-Seine), l'ASNR aura une pile de dossiers cruciaux à gérer, entre la prolongation des centrales, le développement de mini-réacteurs, la construction de nouveaux réacteurs de grande puissance et l'avenir des installations du cycle du combustible. Avec plus de 2 000 collaborateurs, elle représente la deuxième autorité de régulation nucléaire du monde, après la NRC (Nuclear Regulatory Commission) américaine.

L'ASNR « déjà pleinement opérationnelle » selon son président 

Cette fusion, décidée à l'Élysée en février 2023, a été votée en avril au terme d'une bataille parlementaire et d'une vive opposition tant des syndicats que d'associations, inquiets de voir reculer l'information du public sur le nucléaire et la séparation entre expertise et décision.

A la veille du démarrage de l'ASNR, les craintes restaient toujours vives. Dans un communiqué, mardi, l'intersyndicale de l'IRSN a appelé "à la vigilance, plus que jamais compte tenu des incertitudes sur le fonctionnement de l'ASNR au 2 janvier, des inquiétudes sur son règlement intérieur et d'une impasse budgétaire dès février", faute de loi de finances 2025.

Avec la création de cette autorité unique, une période transitoire commence, même si Pierre-Marie Abadie, qui a pris la présidence de l'ASNR le 13 novembre à la fin du mandat de son prédécesseur à l'ASN Bernard Doroszczuk, assure que "l'ASNR est déjà pleinement opérationnelle".

Les services supports (DRH, direction financière, direction informatique) ont été réunis au sein de directions uniques, tandis qu'une partie des activités de l'IRSN rejoint le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et le ministère de la Défense.

Inquiétudes autour du règlement intérieur

Restent les services de cœur de métier qui sont pour l'heure "juxtaposés". "Il y a eu une fusion a minima : on a pris les briques de l'ASN et de l'IRSN et on les a mis côte-à-côte", explique à l'AFP François Jeffroy, représentant CFDT.

Les inquiétudes se cristallisent aussi sur le projet de règlement intérieur, texte crucial régissant le fonctionnement de l'ASNR.

Le CSE de l'IRSN a rendu un avis défavorable sur ce texte le 17 décembre, faute de garanties sur deux demandes clés : le fait que soit "énoncée explicitement dans le règlement intérieur" l'indépendance entre l'expertise et la décision, tout comme le "principe de publication de l'ensemble des avis d'expertise", au nom de l'information du public, rapporte l'intersyndicale.

De son côté, M. Abadie a fait savoir à l'AFP que le projet de règlement "intégrera des remarques" issues des consultations menées fin 2024. Il lui reviendra de le présenter le 16 janvier à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.

M. Abadie, chargé de conduire la réforme, devra aussi présenter d'ici la fin du mois sa feuille de route aux personnels. "Nous n'aurons pas réponse à tout dès le premier jour, mais le cheminement que nous allons faire sera tout aussi important que le point d'arrivée", a-t-il souligné dans une réponse écrite adressée à l'AFP. Les premiers mois, a-t-il dit, seront consacrés à "la construction d'un collectif, autour de valeurs communes, au-delà de nos cultures et de nos histoires".

Commentaires

Metomol
je reste toujours convaincu que cette grosse machine est une erreur qui sera mal maîtrisée, comme la fusion nucléaire! Il est vrai que la rivalité des chefs et la supériorité en compétence technique des ingénieurs de l'IRSN sur ceux de l'ASN n'ont pas favorisé ce rapprochement.Je crains que ce que l'on va gagner en contrôle administratif de plus en plus rigoureux certes, on le perde sur le plan de l'ingéniosité et de la recherche, car c'était là aussi une fonction méconnue de l'IRSN. Durant mes 30 ans de carrière en radioprotection dont 20 en tant qu'inspecteur,j'ai cotoyé et participé à ces deux entités j'ai appris beaucoup de l'IRSN: du fondamental et de l'experimentation, la culture du vecu, j'ai appris seulement de la réglementation et rédigé des textes auprès d e l'ASN dont j'ai fait partie. Les deux étaient parfaitement dans leur rôles , efficaces chacun à leur place. JP Manin Inspecteur retraité de l'IN2P3/CNRS
Abadie
Vos propos semblent excessifs on y sent une expérience mal vécue à titre personnel. Dire que la fusion est mal maîtrisée alors qu'on possède un des plus grands parc nucléaire au monde alors qu'il fonctionne depuis des décennies sans incident majeur, est tout simplement faux. Il y a des problèmes du à une perte de compétences au fil du temps, mais nos centrales sont sûres.
Metomol
Bonjour Abadie, je constate que mes propos ont été mal compris: quand je parlais de fusion mal maîtrisée je parlais bien sûr de celle de l'ASN avec celle de l'IRSN , c'était une image au second degré de la fusion que l'on maîtrise encore mal, voir le programme ITER. mais sans doute cette subtilité vous a échappé; car je l'avais mal exprimée. Je ne parlais donc pas de fission, terme du phénomène physique qui régit le fonctionnement de nos centrales nucléaires qui je vous l'accorde sont les plus sûres au monde du fait de notre culture de sûreté justement. Cette culture reposant sur le binôme expertise technique de l'IRSN et contrôle du gendarme , dont c'est le rôle de l'ASN. Quant à mon expérience je vous rassure elle a été trés bien vécue, sinon je ne serais pas resté à ce poste important durant 20ans , membre de la CIINB, et de la CIREA puis de L'ASN et de l'OPECST.je m'y suis épanoui et ai rencontré des ingénieurs de haut niveau à l'IRSN. les enjeux environnementaux ont été nombreux à cette époque . Quant à l'ASN j'y ai apporté ma contribution dans l'établissement de textes réglementaires sur la radiopropotection, expérience intéresante et utile mais moins technique que de parler de l'interaction de la radioactivité sur l'homme, domaine de prédilection de l'IRSN et du coeur de mon métier. Bien sincèrement.

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