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Les SUV pourraient progressivement laisser leur place à des voitures plus aérodynamiques et moins gourmandes en énergie, mais leur domination mondiale risque de durer encore un moment, selon des experts interrogés par l'AFP au salon de Munich.
Lors de cette manifestation phare du secteur automobile, devenu salon de la "mobilité", plusieurs constructeurs proposent jusqu' à la fin de la semaine leur vision des voitures de demain, basses, effilées et équipées d'énormes roues. L'Audi Grandsphere, longue, lumineuse, devrait par exemple inspirer la prochaine grande berline de la marque aux anneaux, selon sa direction. Chez Hyundai, le concept Prophecy, très bas et rétro, doit inspirer la future grande électrique de la marque coréenne, la Ioniq 6.
Le marché mondial est pourtant dominé par les SUV et autres crossovers hauts sur roues : presque toutes les marques s'y sont mises et ils ont atteint une part de marché record de 46% du marché européen en juillet, selon le cabinet JATO Dynamics.
Érigés en symbole de l'absurdité automobile par les écologistes, qui manifestent près du salon de Munich, ces tout-terrains urbains sont gourmands en énergie et en place, avec leur silhouette large et dépassant parfois 1,8 mètre de hauteur. Dans un rapport dénonçant fin 2020 "l'impact écrasant des SUV sur le climat", l'ONG environnementale WWF estimait qu'ils étaient devenus "la deuxième source de hausse des émissions de gaz à effet de serre en France de 2008 à 2018, juste derrière le secteur aérien".
"Les SUV ne vont pas disparaître : ils offrent une haute position de conduite, quatre roues motrices et permettent de loger les batteries sous le plancher", souligne Thomas Burckle, chef du design de Hyundai en Europe. "Mais ils vont s'alléger. La hausse du prix de l'essence poussera encore plus les motorisations électriques et à hydrogène, et ceux-ci s'allégeront".
Les SUV, « c'est psychologique »
"Il y a toujours eu un design dominant à chaque période de l'histoire de l'automobile", explique Kevin Rice, le directeur créatif de l'agence italienne Pininfarina, citant les berlines des années 60 et les compactes des années 80 et 90. "À chaque fois, on changé de style suite à des avancées techniques, sauf pour les SUV, où c'est psychologique. Ils se sont imposés à travers le monde dans les années 2010 avec leur position de conduite et leur look de durs, qui donnent un sentiment de sécurité, notamment face aux camions", souligne cet ancien de BMW et Mazda. "Mais il y a déjà un mouvement vers des SUV au look plus sportif, un peu plus bas, avec un capot moins long".
"L'aérodynamisme est essentiel pour baisser les émissions de CO2 d'une voiture thermique, et augmenter l'autonomie d'une voiture électrique", souligne chez Renault Laurens van den Acker. Le directeur du design du Losange cite en exemple sa nouvelle compacte électrique, la Mégane E-Tech. "Elle est plus haute qu'une berline, et plus basse qu'un SUV. On a essayé de tout faire pour la rendre la plus fine et la plus basse possible, malgré le skateboard (châssis intégrant les batteries) qui est en dessous".
Pininfarina, qui a conçu de nombreuses Ferrari, Peugeot, mais aussi plusieurs SUV asiatiques, a dévoilé en juillet la Teorema, un concept virtuel radical avec ses 5,40 mètres de longueur pour juste 1,40 mètre de hauteur. Comme la Prophecy de Hyundai, avec son ambiance de salon sur roues, le concept de Pininfarina vise d'abord le confort des passagers et du conducteur, qui peut laisser la main à l'ordinateur.
Dans ce projet, un châssis électrique compressé au maximum a permis de concevoir un espace modulable, où les sièges s'inclinent ou se tournent les uns vers les autres. "On veut que les trajets, notamment les plus longs, deviennent un vrai plaisir pour les gens, un moment de partage", souligne Kevin Rice. "D'autres types de voitures vont apparaître, poussés par la technologie", conclut M. van den Acker chez Renault, "mais la mode des SUV va continuer".