Pour rappel, le cours moyen du baril de Brent a augmenté de 48% entre 2016 (moyenne annuelle de 43,5 $) et 2019 (64,3 $). (©ConocoPhillips)
Les prix du pétrole font l'objet d'une attention particulière en ce début d’année, sur fond de tensions au Moyen-Orient. Rappels sur l'évolution de ces prix en 2019.
64,4 $ par baril de Brent en 2019
En 2019, le cours moyen du baril de Brent a atteint 64,34 $(1), ce qui correspond à une baisse de 9,4% par rapport à son niveau de 2018 (71,05 $). Outre-Atlantique, le prix du baril de West Texas Intermediate (WTI) a également baissé en moyenne de 7 $ en 2019 (atteignant en moyenne 59 $ sur l’année) selon l’EIA américaine (Energy Information Administration).
L’effet de la hausse de la production américaine de pétrole – tirant les prix vers le bas – n’a été que partiellement compensé par les annonces de l’OPEP+ (accord du 7 décembre 2019) et les sanctions américaines contre l’Iran et le Venezuela qui ont réduit les exportations de brut de ces pays.
En 2019, la production de pétrole brut des pays de l’OPEP aurait baissé de 2,2 millions de barils par jour (Mb/j) pour atteindre en moyenne 29,8 Mb/j (contre 32,0 Mb/j en 2018) tandis que celle des États-Unis a atteint un niveau record selon les dernières estimations de l’EIA (près de 12,3 Mb/j de pétrole brut et 19,6 Mb/j en incluant les autres hydrocarbures liquides).
En dépit des nombreuses tensions en 2019 ayant affecté les marchés pétroliers(2), les cours du brut ont connu des variations « limitées » selon l’EIA : l’écart entre le point bas atteint début janvier (55 $ par baril pour le Brent) et le point haut fin avril (75 $/b) se limite à 20 $/b, ce qui constitue le plus « faible » écart depuis 2003 (les prix du WTI ont oscillé entre 47 $ et 66 $).
L’EIA rappelle toutefois que les cours du Brent et du WTI ont connu le 16 septembre 2019 leur plus importante hausse quotidienne depuis 2008 (avec des hausses respectives de 9$/b et 8$/b), suite aux attaques contre des installations pétrolières en Arabie saoudite. Les prix sont revenus au niveau d’avant les attaques dès la fin du mois de septembre 2019, avec la remontée de la production saoudienne.
En décembre 2019, le cours moyen du baril de Brent est remonté à 67,1 $, contre 59,7 $ au mois d'octobre 2019. (©Connaissance des Énergies, d'après EIA)
États-Unis et tensions au Moyen-Orient
Les cours du pétrole ont augmenté début 2020, « reflétant une augmentation des risques géopolitiques » selon l’EIA américaine : le cours du baril de Brent a dépassé 70 $ le 6 janvier « en raison des risques de déstabilisation » dans le Golfe mais « les effets limités de la réaction iranienne, à savoir le tir de missiles sans victimes dans la nuit du 7 au 8 contre deux bases abritant des soldats américains en Irak, ont depuis fait reculer les prix », constate IFP Énergies nouvelles dans son tableau de bord pétrolier du 13 janvier.
Les informations venues des États-Unis – « discours d’apaisement » de Donald Trump suite à la riposte iranienne, hausse des stocks pétroliers et maintien de la production de pétrole brut (12,9 Mb/j depuis novembre) – ont favorisé ce mouvement baissier, précise IFP Énergies nouvelles. Selon les projections de l’EIA, la production américaine de brut pourrait s’élever en moyenne à 13,3 Mb/j en 2020, malgré la baisse du nombre de « rigs » actifs (engins de forage) dans le pays(3).
Au Moyen-Orient, IFP Énergies nouvelles indique que la production iranienne de pétrole et de liquides de gaz naturel a été réduite à 3,4 Mb/j en 2019 (contre 4,7 Mb/j en 2017(4)). Un ajustement « très favorable pour l’OPEP puisqu’il permet d’atténuer l’effort à consentir par les autres pays membres afin de limiter les excédents sur le marché pétrolier ». L’Irak, « pays important pour l’équilibre pétrolier mondial » (avec une production avoisinant 5 Mb/j selon IFP Énergies nouvelles), est par ailleurs en proie à des mouvements sociaux et politiques (affectant parfois des installations pétrolières mais « sans conséquences importantes à ce jour sur l’offre pétrolière ») et fait l’objet d’une attention particulière.
Rappelons qu’aux inquiétudes d’ordre géopolitique s’ajoutent toujours de nombreuses incertitudes économiques (croissance mondiale de 2,5% en 2020 selon les prévisions de la Banque mondiale, différends commerciaux, accumulation de la dette, etc.).
Rappels des engagements des producteurs de pétrole réunis au sein de l'OPEP+ en vigueur depuis janvier 2020. (©Connaissance des Énergies)
Le point sur les nouveaux engagements de l'OPEP+ suite à la réunion de décembre 2019
L’OPEP et ses 10 partenaires producteurs de pétrole ont annoncé le 6 décembre à Vienne un renforcement de leurs baisses de production, afin de soutenir les cours du pétrole.
Pour rappel, les différents pays regroupés au sein de l’« OPEP+ » avaient convenu en décembre 2018 de réduire globalement leur production de 1,2 million de barils par jour (Mb/j) par rapport au niveau de production d’octobre 2018. Cet effort, pesant pour deux tiers sur les pays membres de l’OPEP et pour un tiers sur les pays partenaires (au premier rang desquels la Russie), avait été prolongé en juillet 2019.
Le 6 décembre, il a été décidé lors de la 7e réunion ministérielle de l’OPEP+ de réduire de 503 000 barils par jour (b/j) supplémentaires l’offre de pétrole de ce groupe de producteurs, afin de soutenir les cours. L’Arabie saoudite doit à elle seule compter pour environ un tiers de ces nouvelles coupes de production (- 167 000 b/j), suivie par la Russie (- 70 000 b/j) et les Émirats arabes unis (- 60 000 b/j).
Au total, la baisse de production sur laquelle communique l’OPEP+ devrait, à partir du 1er janvier 2020, s’élever à 1,7 Mb/j (par rapport à octobre 2018). Si les différents producteurs respectent leurs quotas de production, le ministre saoudien de l'Énergie, Abdel Aziz ben Salmane, a en outre annoncé l’ambition de son pays d’apporter une « réduction volontaire additionnelle » de 400 000 b/j, ce qui porterait la baisse de réduction de l’OPEP+ à 2,1 Mb/j. L’Arabie saoudite a un intérêt particulier à soutenir les cours du pétrole dans le contexte de l’entrée de son géant national Saudi Aramco à la Bourse de Riyad le 11 décembre.
Bjarne Schieldrop, analyste matières premières chez SEB(1), note toutefois que la baisse de l'offre sur les marchés pétroliers provient jusqu'ici essentiellement de « réductions involontaires au Mexique, en Libye, en Iran et au Venezuela », plutôt que des engagements de l'OPEP+. Il rappelle par ailleurs que « de nombreux pays de l’OPEP+ ne sont pas en mesure de produire aujourd’hui autant que leur plafond le permet »(2).
Le point sur les nouveaux engagements des producteurs de pétrole réunis au sein de l'OPEP+. (©Connaissance des Énergies)
Les cours du pétrole et la « menace » américaine
Suite au nouvel accord de l’OPEP+, le baril de Brent s'est apprécié de 1,6% le 6 décembre, pour atteindre 64,39 $ (+ 1,3% pour le WTI à New York). Selon Bjarne Schieldrop, les cours pourraient avoisiner 70$ par baril en 2020. Il rappelle toutefois que le prix d’équilibre recherché par l’Arabie saoudite est plus proche de 85 $ par baril, tandis qu’un cours de 65 à 70 $ par baril satisfait de nombreux membres de l’OPEP+.
Dans le même temps, rappelons que la production de pétrole brut des États-Unis a atteint un niveau record de 12,2 Mb/j au 3e trimestre 2019 (contre 11 Mb/j en 2018). Selon les dernières projections de l’EIA américaine, cette production pourrait s’élever en moyenne à 13,3 Mb/j en 2020, malgré la baisse du nombre de « rigs » actifs (engins de forage) dans le pays. L’Agence internationale de l'énergie (AIE) estime pour sa part que les États-Unis pourraient, malgré un ralentissement de la croissance de leur production pétrolière, compter pour 85% de la hausse de l’offre mondiale de pétrole d’ici à 2030.
Face à cette « menace » américaine, l’OPEP+ - l’Arabie saoudite en premier lieu - est-elle « condamnée » à contenir toujours davantage sa production pétrolière pour maintenir les cours à un niveau jugé satisfaisant ? Aucune durée n’a été annoncée pour les nouveaux quotas de production. Les prochaines réunions de l’OPEP+ sont prévues les 6 mars et 10 juin 2020.
Le point de l'EIA sur la production américaine de pétrole brut
Mi-novembre, l’EIA américaine (Energy Information Administration) a révisé à la hausse – par rapport au mois précédent – ses prévisions relatives à la production américaine de pétrole brut en 2019 et 2020.
Chaque mois, l’EIA actualise ses grandes données et prévisions relatives à l’énergie, en particulier sur la production de pétrole brut aux États-Unis(5). Dans son dernier Short-Term Energy Outlook publié mi-novembre 2019(6), l'Agence indique que la production américaine de brut a atteint 12,2 millions de barils par jour (Mb/j) au 3e trimestre 2019, contre 11 Mb/j en moyenne en 2018.
Selon les dernières projections de l’EIA, cette production pourrait atteindre en moyenne 12,3 Mb/j sur l’ensemble de l’année 2019 et s’élever à 13,3 Mb/j en 2020. La prévision pour 2020 est supérieure de 119 000 barils par jour, par rapport aux projections publiées par l’EIA en octobre 2019, suite à « une révision à la hausse de la production passée, un niveau de production initiale plus élevé retenu pour les nouveaux puits dans le Bassin permien au Texas et une prévision légèrement plus élevée pour les prix du brut entre novembre 2019 et janvier 2020 ».
La croissance de la production américaine de pétrole brut est principalement tirée par le Bassin permien, d’où provient l’essentiel de la production de pétrole dit « de schiste » : la production de ce seul bassin pourrait augmenter de 915 000 barils par jour en 2019 par rapport à 2018, puis de 809 000 barils par jour supplémentaires en 2020(7).
L’EIA indique certes que la croissance de la production américaine de pétrole brut va ralentir, compte tenu de la baisse du nombre de « rigs » actifs (engins de forage) dans le pays(8). Mais l’Agence souligne dans le même temps les progrès d’efficacité au niveau de ces rigs qui « compensent en partie » leur plus faible nombre.
Pour rappel, l’Agence internationale de l'énergie (AIE) estime elle aussi que la croissance de la production américaine de pétrole va ralentir par rapport au rythme « effréné » des dernières années. Selon ses prévisions, les États-Unis pourraient toutefois compter pour 85% de la hausse de la production mondiale de pétrole d’ici à 2030. À l'horizon 2025, la production américaine d’hydrocarbures de schiste pourrait dépasser la production russe de pétrole et de gaz selon l’AIE.
La hausse de la production américaine de pétrole devrait se poursuivre même si elle est amenée à « notablement ralentir » dans les 14 prochains mois selon l'EIA. (©Connaissance des Énergies, d’après EIA)