Comment expliquer le retard et le surcoût de l'EPR de Flamanville ?

Cuve EPR

Sur le chantier de l’EPR de Flamanville, la cuve a été installée en janvier 2014. Les tests ont été effectués sur une autre cuve aux mêmes caractéristiques. (©EDF-Alexis Morin)

Le chantier de construction de l'EPR de Flamaville a accumulé les déboires et les retards depuis son lancement en 2007. Des fissures dans le béton aux soudures actuellement en train d'être refaites, en passant par les anomalies sur la cuve, le chantier a accumulé les problèmes techniques.

La mise en service du premier EPR sur le sol français interviendra finalement en 2024, 12 ans après la planification initiale. Ces retards ont fait explosé la facture du chantier, qui se chiffre désormais à 13,2 milliards d'euros, quatre fois le budget initial de 3,3 milliards d'euros.

Les principales raisons des problèmes ayant engendré les délais et coûts supplémentaires de la construction

Parmi les principaux problèmes figurent les soudures mal réalisées, notamment celles des tuyauteries traversant le liner du réacteur et des consoles du pont polaire, ainsi que la non-conformité des soudures du circuit secondaire principal entre 2013 et 2016. Les soudures difficilement accessibles, notamment celles des traversées d’enceinte, ont également contribué aux retards depuis 2018. Par ailleurs, des erreurs dans la conception de la cuve ont nécessité des ajustements coûteux et chronophages.

Les surcoûts de l'EPR sont détaillés dans le rapport Folz, qui les divise en quatre grandes catégories : les variations de volume et les évolutions de périmètre, les impacts réglementaires suite au renforcement des normes de sûreté après l'accident de Fukushima, les délais, et les coûts « tête de série » liés au fait que l'EPR est le premier réacteur de ce type en France.

Le rapport critique également les estimations initiales irréalistes d'EDF et un problème de gouvernance avec l'absence d'un chef de projet bien identifié.

Enfin, une perte généralisée de compétences due à l'écart de temps entre les dernières constructions de réacteurs et le début du chantier de Flamanville a été un facteur significatif des difficultés rencontrées.

Retour sur les déboires de l'EPR de Flamanville, par date

2004 : les débuts

Le feu vert est donné du gouvernement à la construction d'un réacteur nucléaire de 3e génération, dit EPR (réacteur pressurisé européen). EDF l'implante sur le site de Flamanville, où deux réacteurs de 2e génération sont déjà en service. Il doit devenir la vitrine commerciale de la filière nucléaire française.

Mai 2008 : des fissures dans le béton

Le premier béton est coulé en décembre 2007 pour une mise en service prévue pour 2012. Dès l'année suivante l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) fait état de fissures dans le béton de la plateforme et les travaux sont suspendus pendant un mois.

Novembre 2009 : premiers retards en vue

Fin 2009, les travaux commencent à prendre du retard. Le Premier ministre François Fillon visite le chantier aux côtés du nouveau patron d'EDF, Henri Proglio.

Les délais seront "tenus" pour que "le démarrage ait bien lieu en 2012", soutient alors François Fillon. "Nous avons confiance en l'EPR !", ajoute-t-il.

2010 : premier report

En 2010, EDF annonce le premier report en 2014.

Juillet 2011 : « une mesure technique »

Déjà reportée à 2014, la date de mise en service passe à 2016 : EDF a dû "réévaluer les travaux".

En 2011, deux salariés décèdent, tous les deux d'une chute. En avril 2014, trois mois après la pose de la cuve de 425 tonnes du réacteur, Bouygues TP est condamné à 75 000 euros d'amende en correctionnelle pour homicide involontaire d'un soudeur sur le chantier en 2011. La société est relaxée en appel.

Avril 2015 : anomalies détectées sur la cuve et le couvercle

Un défaut de fabrication du fond de la cuve qui contient le cœur du réacteur et de son couvercle est signalé par Areva. Selon l'ASN, qui qualifie l'anomalie de "sérieuse", elle est due à une concentration de carbone plus importante que la norme. Des défauts de soudure sont aussi détectés sur le réacteur.

Le couvercle et le fond de la cuve de l’EPR sont constitués de deux calottes sphériques en acier de 33 cm d’épaisseur et de près de 4,7 m de diamètre. Ils sont fabriqués à partir d’un lingot de forge (par Creusot Forge(1) dans le cas de l’EPR de Flamanville) et subissent des traitements afin d’éliminer les concentrations d’impuretés comme le carbone pouvant affecter la résistance de l’acier.

Areva a effectué en 2014 des essais dits de « résilience » testant la capacité des matériaux à absorber de l’énergie sous l’effet de chocs thermiques et mécaniques(2) en se déformant sans se rompre. A l’issue de ces tests, il a été calculé que la résilience des calottes de la cuve était comprise entre 36 et 64 Joules (J)(3), soit une moyenne de 52 J inférieure à la limite réglementaire (60 J)(4). Areva a également constaté une teneur en carbone dans le couvercle de 0,3% alors qu’un seuil maximal est fixé à 0,22%. 

Des tests complémentaires ont dû être effectués par Areva en liaison avec EDF afin de préciser l’importance de cette anomalie, d’en mesurer les conséquences et de proposer des mesures palliatives : améliorer la résistance de la cuve, remplacer le couvercle, voire faire fonctionner l’EPR en sous-régime, etc. Ces essais pourraient durer plusieurs mois selon l’ASN.

Selon Christophe Cuvilliez, secrétaire de la section CGT de l'EPR interrogé à l'époque, trois scénarios sont alors envisagés : soit Areva parvient à terminer le couvercle qu'elle est train de construire pour Flamanville, soit "on prend le couvercle destiné à un des deux réacteurs EPR en construction à Taïshan en Chine, si les Chinois veulent bien, sinon on refait un nouveau couvercle et on prend trois ans de retard" supplémentaires. 

Entre temps, la mise en service est réévaluée à 2017. Mais dans l'entreprise, "on n'y croit pas beaucoup".

Un an plus tard, Areva annonce que des "anomalies" ont été détectées dans le suivi des fabrications d'équipements au sein de son usine du Creusot (Saône-et-Loire) où a été fabriquée la cuve.

Juin 2015 : problèmes de soupapes

L'IRSN examine des difficultés de fonctionnement sur ses soupapes de sûreté, qui permettent de réguler la pression de l'eau dans le circuit primaire du coeur nucléaire.

En parallèle, François Hollande, qui s'était engagé à fermer la centrale de Fessenheim "à la fin de l'année 2016" est interrogé par Le Parisien sur la date effective de cette fermeture. "En 2016, non, car la construction de l'EPR de Flamanville a pris beaucoup de retard", répond le président de la République.

EDF prévoit désormais une entrée en service fin 2018.

Mars 2016 : une première étape importante franchie

EDF annonce avoir atteint un "premier jalon-clé" dans la construction de la centrale : "Les opérations de montages mécaniques du circuit primaire principal du réacteur EPR de Flamanville sont terminées et ont permis l'installation et l'assemblage des gros composants (les quatre générateurs de vapeur, la cuve, le pressuriseur et les pompes primaires)". Le circuit primaire est l'élément central d'un réacteur nucléaire.

EDF ajoute que les contrôles qualité indiquent que "l'ensemble des opérations de montage répond aux exigences", mais qu'une soudure, sur les 32 réalisées, "doit faire l'objet d'une procédure de reprise pour garantir sa conformité".

La prochaine étape est désormais l'accélération des montages électromécaniques et le lancement des phases d'essais élémentaires, avant des essais d'ensemble initialement prévus en 2017.

Septembre 2016 : des incohérences dans les dossier

Le gendarme du nucléaire annoncé la détection de 20 nouvelles irrégularités sur des équipements, sur la base de l'audit réalisé au Creusot après la découverte en 2015 du problème de la cuve.

Areva "devrait remettre d'ici à fin 2016 la totalité des essais" demandés par l'ASN pour prouver la résistance de la cuve, malgré des taux trop élevés de carbone. Si cette échéance est respectée, l'ASN devrait rendre son avis à la "fin du premier semestre" 2017. En 2015, l'ASN espérait pouvoir rendre cet avis durant l'été 2016.

La cuve de l'EPR est la deuxième barrière contre la radioactivité, après la gaine du combustible.

Le chantier de Flamanville n'en continue pas moins de "tourner à plein régime", selon EDF, qui a encore revu "légèrement" à la hausse ses effectifs. Désormais, l'EPR fait travailler 4 800 personnes (dont 3 900 salariés de sous-traitants d'EDF). En juin, EDF avait annoncé un pic à 4 700.

EDF a relativisé lundi l'importance de 20 anomalies : "Aucune pièce n'est affectée par des problèmes de teneur en carbone", preuve de la résistance des pièces, à part la cuve pour laquelle l'ASN avait annoncé en avril 2015 une "anomalie sérieuse". L'anomalie dans cet équipement-clé d'une centrale nucléaire, qui renferme le combustible, est liée à la présence d'une forte concentration en carbone à certains endroits, qui conduit à des propriétés mécaniques moins bonnes qu'attendu, notamment une moindre résistance. "Les premières analyses effectuées sur deux pièces analogues à celles de Flamanville 3 ont montré, sur l'une d'entre elles, une extension du phénomène de ségrégation carbone au-delà de la mi-épaisseur. Comme prévu dans la démarche initiale validée par l'ASN, les prélèvements de matière et les essais associés seront étendus aux trois quarts de l'épaisseur de la pièce concernée", ont expliqué EDF et Areva.

Janvier 2017 : 2018, « peut-être un peu plus »

La fermeture de la centrale de Fessenheim "sera définitive quand (l'EPR de) Flamanville ouvrira", c'est-à-dire en "2018, peut-être un peu plus parce que Flamanville a pris du retard", déclare sur BFMTV Ségolène Royal, ministre de l'Environnement, de l'Énergie et de la Mer.

Il convient désormais selon elle de comparer le coût du nucléaire à celui des énergies renouvelables, "qui est en train de baisser".

Octobre 2017 : soulagement concernant la cuve

L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a saisi le groupe permanent d'experts pour les équipements sous pression nucléaire (GP-ESPN). L'inquiétude majeure réside dans le couvercle de la cuve, alors que l'aptitude du fond n'est pas totalement remise en cause. Sans des contrôles approfondis et réguliers tout au long du fonctionnement du réacteur, "l'aptitude au service du couvercle actuel de la cuve (...) n'est pas acquise de manière pérenne", pointe le rapport. Il ajoute qu'"EDF n'est actuellement pas en mesure de mettre en oeuvre" les contrôles nécessaires et que, si cette situation n'était pas résolue, l'utilisation du couvercle actuel "ne saurait être envisagée au-delà de quelques années de fonctionnement".

Le feu vert est finalement donné en octobre 2017 par l'ASN. L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a estimé que l'EPR de Flamanville pouvait bien démarrer avec sa cuve initiale sur laquelle des anomalies ont été détectées, mais a demandé à l'exploitant de changer son couvercle d'ici la fin 2024.

Avril 2018 : pas question de s'accommoder des retards

EDF annonce des défauts de soudure et lance une expertise. Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique, répond à une question de Barbara Pompili, alors députée LREM, devant la commission d'enquête parlementaire sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires.

"Si les derniers événements devaient repousser de plusieurs années l'ouverture de Flamanville, vous pensez bien que je ne m'accommoderai pas de cette situation", répond le ministre.

Pourtant, la mise en service est décalée à fin 2019.

Septembre 2018 : l'EPR mis en doute

Fraîchement nommé ministre de la Transition écologique, François de Rugy est interrogé par Le Monde sur la nécessité de construire un nouvel EPR.

"Il faudrait déjà qu'EDF fasse la démonstration que l'EPR fonctionne, ce qui n'est pas encore le cas. Personne n'est capable de garantir sa date de mise en service", répond le ministre.

Juin 2019 : encore un problème de soudures

Il y a un an, EDF avait annoncé des "écarts de qualité" sur des soudures du réacteur nucléaire en construction en Normandie. EDF avait proposé de laisser huit soudures difficilement accessibles en l'état en prouvant avec des essais qu'elles ne posaient pas de problème de sûreté, et de renforcer les contrôles pendant le fonctionnement du réacteur. Ce qui lui aurait permis d'éviter des travaux complexes, potentiellement longs et coûteux. Ces soudures sont situées dans la traversée de l'enceinte de confinement, la grosse structure de béton qui doit retenir les éléments radioactifs en cas d'accident.

L'Autorité de sûreté nucléaire a demandé à EDF la réparation de ces huit soudures défectueuses de l'EPR de Flamanville (Manche), justifiant sa décision par "les nombreux écarts survenus lors de la réalisation" des soudures. L'électricien avait proposé de repousser après la mise en service du réacteur nucléaire. Si cette solution était "techniquement réalisable", reconnaît l'ASN, "le report des opérations de réparation après la mise en service du réacteur soulèverait plusieurs difficultés, notamment au regard de la justification de la sûreté du réacteur durant la période transitoire". "L'ASN considère donc que la réparation des soudures avant la mise en service du réacteur constitue la solution de référence", précise-t-elle donc. "EDF analyse actuellement les conséquences de cette décision sur le planning et le coût de l'EPR de Flamanville", a ajouté EDF alors que la durée du chantier a déjà été rallongée.

Pour traiter ces tuyaux, qui traversent l'enceinte de confinement du réacteur pour conduire la vapeur créée vers un autre bâtiment, EDF envisage comme première hypothèse de les extraire par l'extérieur du bâtiment, ce qui implique de démonter beaucoup d'éléments. La deuxième hypothèse implique d'intervenir par l'espace entre les enceintes, ce qui signifierait "travailler dans un espace confiné" et toucher à "des matériels sensibles sur lesquels on n'a pas le droit à l'erreur". Enfin, troisième possibilité, une "remise à niveau par l'intérieur grâce à un robot inséré dans la tuyauterie".

A l'origine des défauts se trouve le fait que les "exigences (de qualité) n'ont pas été transmises aux deux entreprises, sous-traitants, chargées de réaliser les soudures en usine". "Les anomalies présentes sur les traversées ne sont pas récentes, elles ont été découvertes en juillet 2015, l'ASN n'a été informée qu'en janvier 2017". A l'instruction, "il est apparu que nous étions face à une défaillance industrielle globale de la chaîne de conception, de fabrication et de contrôle de ces huit soudures".

"Nous allons avoir du retard à cause de la reprise de ces soudures", avait confirmé mardi le patron d'EDF lors d'une conférence. "On est clairement dans la phase de réapprentissage (de construction de réacteurs, NDLR) mais il ne faut pas non plus noircir le tableau".

"Il appartient à EDF de tirer toutes les conséquences de cette recommandation et rapidement", a déclaré la secrétaire d'Etat à la Transition écologique Brune Poirson. "Nous avions anticipé des scénarios potentiellement pessimistes et nous maintenons le cap qui est de fermer nos quatre centrales à charbon d'ici la fin du quinquennat et un des réacteurs de Fessenheim en 2020, a-t-elle ajouté, alors que l'Etat contrôle l'électricien.

Septembre 2019 : un audit commandé

En juillet 2019, EDF annonce que la mise en service du réacteur "ne peut être envisagée avant fin 2022" car il faut réparer huit soudures. Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire annonce sur LCI et RTL qu'il a demandé un audit.

"Toutes ces dérives sont inacceptables", déclare-t-il. "Elles ne sont pas à la hauteur de ce que EDF représente et de l'expertise française en la matière."

Janvier 2022 : EDF doit « tirer des leçons »

EDF vient d'annoncer que la date de chargement du combustible est décalée "au second trimestre 2023".

Le gouvernement veillera à ce qu'EDF "tire les leçons des différents retards", assure le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal à l'issue du Conseil des ministres. Il y sera "vigilant", avec l'objectif d'"améliorer le processus industriel", soutient-il.

Mai 2023 : le report du remplacement de couvercle accepté

L'autorité de sûreté nucléaire (ASN) a accepté qu'EDF reporte à 2025 le remplacement du couvercle défectueux de la cuve du réacteur. Il s'agit d'une pièce cruciale, puisqu'elle recouvre la cuve qui contient le combustible nucléaire. L'ASN a expliqué que "le remplacement du couvercle de la cuve avant la mise en service du réacteur conduirait à reporter celle-ci d'environ un an". Jusqu'ici, l'autorité de sûreté avait fixé au 31 décembre 2024 la date limite pour remplacer le couvercle, ce qui aurait contraint EDF à arrêter son EPR seulement quelques mois après son démarrage, prévu au 1er trimestre de l'année prochaine.

La date limite pour remplacer le couvercle avait été arrêtée par l'ASN en 2018, mais à l'époque, il était prévu que le réacteur démarre à l'automne 2019. Entretemps, le calendrier a dérapé: "des aléas survenus depuis ont conduit à ce que la mise en service du réacteur soit désormais envisagée au cours du premier trimestre de l'année 2024", rappelle l'ASN.

L'ASN a ainsi accepté d'attendre un premier cycle complet de fonctionnement de l'EPR, soit entre "15 et 18 mois" avant de changer la pièce, comme en avait fait la demande le constructeur nucléaire Framatome.

Le remplacement du couvercle de la cuve, qui présente des "anomalies de fabrication", devra donc être adossé à une première visite de maintenance globale prévue courant 2025.

"La fabrication du couvercle de remplacement est en cours chez Framatome" pour une livraison "prévue pour la fin de l'été 2024", a précisé l'ASN.

Décembre 2023 : un dernier retard

Un délai supplémentaire de six mois entraînant un surcoût de 500 millions d'euros est annoncé. Il est dû à la nécessaire révision de procédures de traitement de quelque 150 soudures "complexes", au sein du circuit secondaire principal du réacteur,

7 mai 2024 : Autorisation de l'ASN

Au terme d'un long et difficile chantier, le sésame de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est finalement tombé le 7 mai, à 17h18.

"Il y en a qui ont versé une petite larme", d'autres "ont sauté de joie", on s'est même "un peu embrassés", a raconté Grégory Heinfling, directeur d'exploitation de Flamanville 3, où 800 personnes travailleront désormais dont 200 sous-traitants.

"C'était un grand moment d'émotion et en même temps, on savait que derrière on aurait encore du travail et qu'il fallait qu'on reste concentrés".

La suite s'annonce en effet chargée avec une succession d'essais et paliers à passer, sous la surveillance du gendarme du nucléaire.

Les premiers mégawatts du 57ème réacteur nucléaire français seront injectés sur le réseau courant 2024.

Des désagréments à relativiser ?

Les retards, difficultés, et surcoûts peuvent être considérés dans le contexte plus large de la production d'énergie en grande quantité à faible émission de CO2. 

Une construction complexe, sûre et durable

Nous traitons ici de systèmes extrêmement complexes qui doivent être sécurisés et conformes aux normes strictes européennes et françaises. Il est impératif que ces projets soient menés à bien avec la plus grande rigueur, pour les 60 années à venir et au-delà.

Il est attendu certaines économies d'échelles et des baisses de coûts du fait d'une simplification pour la nouvelle génération d'EPR2.

En outre, travailler dans ce secteur, malgré les critiques fréquentes à l'encontre du nucléaire, demande un engagement notable.

Une aubaine pour l'emploi local

"Clairement, c'est plutôt une bonne nouvelle, commercialement. C'est une aubaine de pouvoir travailler ici, encore plus si le chantier prend du retard", confirme Cyril Laniepce, 33 ans, gérant de l'hôtel-restaurant de la Falaise, tout proche du chantier où travaillent 2 800 personnes.

"Un retard comme ça, faut pas s'en plaindre. Ici on n'a pas le droit. Quand on est à 300 km, on peut peut-être penser que c'est ça qui fait monter la facture d'électricité mais ici ça nous offre un confort de vie incroyable", explique de son côté le restaurateur soulignant les infrastructures sportives et culturelles nombreuses pour une zone rurale.

Et les autres projets d'EPR dans le monde ?

Le réacteur nucléaire EPR a été construit, avec plus ou moins de difficultés, en Chine, en Finlande et en France. Londres a approuvé la construction pour sa centrale de Sizewell.

EDF prévoit d'en livrer 6 à Jaitapur en Inde, mais devra aussi répondre à la relance d'un programme nucléaire en France avec une commande de 6 voire 14 réacteurs, pour une mise en service attendue au mieux en 2035-2037. Il discute aussi avec des pays européens comme la Pologne. 

La centrale de Taishan, près de Hong Kong, a été le premier site en service en décembre 2018, mais son réacteur numéro 1 a été longtemps à l'arrêt. Les délais avaient étés multipliés par deux et les budgets dépassés de 60%.

En Finlande, l'autorité de sûreté nucléaire a autorisé fin décembre 2021 le démarrage du réacteur nucléaire EPR d'Olkiluoto 3, après 12 ans de retard sur le chantier. Il a également été mis à l'arrêt à plusieurs reprises depuis.

Le début de production d'électricité par le premier réacteur britannique est à présent prévu mi-2027 au lieu de fin 2025 comme annoncé initialement, avec des coûts rehaussés.

La République Tchèque a annoncé en juillet 2024 choisir le concurrent d'EDF, le sud-coréen KHNP, pour la construction de deux unités nucléaires.

EDF a pour autant bon espoir de vendre de nouveau l'EPR à l'étranger, tablant sur la volonté des pays d'améliorer leur bilan climatique et notamment de moins dépendre du charbon. EDF travaille sur une nouvelle version de l'EPR, l'EPR2, censé être plus simple à construire, bénéficiant d'un effet de série (construction par paires), de préfabrication en usine, et "totalement conçu de façon numérisée".

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