Les offres d'électricité « verte » décryptées par l'Ademe

parue le
Eolien

L’Ademe souligne que le développement de la production électrique d’origine renouvelable a jusqu’ici dépendu des subventions publiques. (©photo)

Les consommateurs français souscrivant aujourd’hui une offre d’électricité dite « verte » envoient un signal au marché et aux fournisseurs mais ne contribuent « pas significativement au développement de nouvelles installations EnR », juge l’Ademe dans un avis publié le 3 décembre(1)

« Standard » ou « premium » : deux types d’offre « verte »

Sur le réseau, il est impossible de discerner l’origine de l’électricité (produite en France à 71,6% à partir du parc nucléaire en 2017). Des fournisseurs d’électricité proposent toutefois des offres d’électricité « verte » (c’est-à-dire produite à partir de sources renouvelables) avec un succès croissant : la demande « a plus que doublé en 3 ans, passant de 9,7 TWh entre avril 2013 et mars 2014 à 22,6 TWh entre avril 2017 et mars 2017 » selon l’Ademe (la consommation électrique en France métropolitaine a atteint 482 TWh en 2017).

Initié au niveau européen, un outil de « traçabilité de l’origine de l’électricité » a été déployé en France en 2011(2) pour certifier ces offres d'électricité verte : les garanties d’origine (GO). Dans ce cadre, une installation EnR ne bénéficiant pas d’un mécanisme de soutien public en France se voit attribuer une GO par MWh produit. Un fournisseur d’électricité a pour sa part pour obligation légale d’acheter un volume de GO (au sein de l'Union européenne(3)) équivalant à la consommation de ses clients en offre « verte ».

Le terme d’offre d’électricité « verte » est employé pour désigner deux types d’offres différentes :

  • dans le cadre d’une offre verte « standard », le fournisseur achète de l’électricité sur le marché et des GO de façon indépendante ;

  • dans le cas d’une offre verte « premium », le fournisseur achète de l’électricité et des GO directement auprès des producteurs EnR en signant avec eux des contrats d’achat. L’Ademe mentionne dans sa publication 3 fournisseurs proposant une offre d’électricité verte « premium » en France (Enercoop, Ilek et Energie d’ici(4)) auxquels s’ajoute ekWateur.

Dans le cadre de son offre « petits producteurs indépendants », ekWateur rachète par exemple de l’électricité renouvelable et les GO associées auprès d’une quarantaine de producteurs (via un agrégateur), indique le président du fournisseur Julien Tchernia.


En 2017, 18 fournisseurs d’électricité en France proposaient une offre d’électricité « verte » selon l’Ademe. (©Connaissance des Énergies, d’après Ademe)

Les recommandations de l’Ademe

Le développement des énergies renouvelables dans la production électrique française(5) s’explique « jusqu’à aujourd’hui par les subventions octroyées par l’État » (via des appels d’offres et des tarifs d’achat garantis ou un complément de rémunération), souligne l’Ademe. Le montant total de ces subventions est estimé à 4,5 milliards d’euros en 2017.

La rémunération des producteurs via le dispositif des GO, « estimée entre 0,15 et 3,6 €/MWh », est quant à elle jugée « insuffisante pour déclencher le développement de nouvelles capacités EnR ». Même les offres d’électricité verte « premium » ne contribuent pour l'instant pas significativement à ce développement selon l’Ademe, bien qu’elles apportent une meilleure visibilité aux producteurs (grâce aux contrats d’achat de long terme conclus avec les fournisseurs).

À l’heure actuelle, les GO proviennent « quasi exclusivement des centrales hydroélectriques amorties » puisque les producteurs EnR disposant d’une subvention publique ne sont pas intégrés dans le dispositif. La loi n°2017-227 du 24 février 2017(6) prévoit que les GO dont ces producteurs EnR subventionnés ne peuvent pas bénéficier soient délivrés à l’État qui pourra les vendre via un système d’enchères(7). Une procédure qui reste encore à mettre en œuvre (les enchères doivent être organisées par Powernext, gestionnaire du registre des GO, « a priori en 2019 » selon un expert de l'Ademe). Cette évolution ne permet pas de relier les producteurs EnR subventionnés aux GO, déplore Julien Tchernia qui regrette également que les plus petits producteurs EnR soient exclus du dispositif des GO (les acteurs sont contraints de « produire au moins 1 MWh par mois » pour obtenir des GO).

L’Ademe appelle à mettre en place « un référentiel précis permettant de normaliser les allégations environnementales » des fournisseurs pour aider le consommateur à mieux comprendre les différentes offres d’électricité verte. L’Agence reconnait que ces offres constituent d’ores et déjà « un signal donné par le consom’acteur au marché, au monde politique et aux fournisseurs » de l’intérêt pour la transition énergétique.

L’Ademe appelle à plus long terme à imposer que toutes les offres d’électricité verte impliquent l’achat direct d’électricité auprès de producteurs EnR (« premium »). Afin de rehausser le prix des GO(8), l’Agence recommande de renforcer les contraintes temporelles du dispositif, en imposant progressivement « un équilibre consommation d’électricité/achat de GO à la semaine, au jour, voire à l’heure » (le prix des GO augmentant aux heures de forte consommation)(9). La mise en place d’un label est suggérée « pour préfigurer certaines de ces évolutions ».

Sources / Notes

  1. Avis de l'Ademe sur les offres d'électricité verte, décembre 2018.
  2. Créé en France par l’ordonnance n°2011-1105 du 14 septembre 2011 transposant les directives européennes 2009/28/CE et 2009/30/CE.
  3. Les GO sont achetés de gré à gré auprès de producteurs EnR au sein de l’Union européenne et dans les pays ayant un accord avec l’UE, principalement la Norvège et la Suisse.
  4. Ces trois fournisseurs étaient à ce titre qualifiés de « vraiment verts » dans le guide de Greenpeace mis en ligne en septembre 2018.
  5. Hors hydraulique, filière renouvelable « historique ».
  6. Loi n°2017-227 du 24 février 2017.
  7. Les revenus associés sont censés alimenter le Compte d’Affectation Spéciale (CAS) Transition Énergétique dans le budget de l’État.
  8. Le projet de loi de finances 2018 envisageait des recettes de 17 millions d’euros cette année, à comparer avec les 4,5 milliards d’euros de soutien aux EnR électriques.
  9. La loi de février 2017 va dans ce sens, prévoyant un équilibre mensuel et non plus annuel pour créer une tension sur les prix des GO. Cet équilibre mensuel GO/consommation doit entrer en vigueur le 1er janvier 2021.

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