
Le complément de rémunération vise à mieux intégrer les énergies renouvelables au marché électrique. (©EDF-Philippe Eranian)
Le complément de rémunération (CR) est un dispositif de soutien public à la production électrique de certaines installations renouvelables. Prévu par l’article 104 de la loi de transition énergétique adoptée en France en juillet 2015 (et inscrit dans les articles L. 314-18 à L. 314-27 du Code de l'énergie)(1), il répond aux exigences européennes concernant l’encadrement des aides d’État et remplace en partie le système des obligations d'achat.
Comment ça marche ?
Le complément de rémunération a fait l’objet de plusieurs décrets d’applications publiés fin mai 2016 au Journal Officiel(2). Notons qu’un dispositif de soutien similaire existe en Allemagne et au Royaume-Uni.
Une prime versée par EDF OA
Concrètement, les producteurs d’énergie d'origine renouvelable doivent vendre leur électricité - directement ou par l'intermédiaire d'un opérateur dit « agrégateur » - sur le marché de gros(3) (et non pas à EDF ou une ELD comme dans le cas des tarifs d’achat) et reçoivent une prime « ex post » en complément de cette vente.
Cette prime est calculée comme la différence entre un tarif « de référence » fixé chaque année par filière (assimilable aux tarifs d’achat) et le prix de marché. Cela permet ainsi d’atteindre un niveau de prix déterminé. Proportionnelle au volume d’électricité vendue, la prime vise ainsi à sécuriser l’entrée sur le marché des exploitants d’énergies renouvelables en leur assurant un niveau de rentabilité « normale ».
Schématiquement, si un producteur vend 1 GWh (1 000 MWh) d'électricité sur le marché de gros au prix de 50 €/MWh, et que le tarif « de référence » de son contrat en complément de rémunération est de 60 €/MWh, alors il reçoit une prime de 10 000 € (10 €/MWh x 1 000 MWh).
Ce complément de rémunération ou « prime énergie » est versé par EDF Obligation d'Achat (EDF OA), seul opérateur à gérer ce type de contrat. Le coût de ce dispositif est financé via l'accise sur l'électricité et donc répercuté sur la facture des consommateurs.
Source : CRE - Graphique : Selectra
Ou bien une sur-rémunération à reverser à EDF OA
Le mécanisme de compensation prévoit que les producteurs reversent de l'argent à l'État via EDF OA lorsque les prix du marché sont plus élevés que le prix de rachat garanti par l'État.
Lors de la crise des prix de l'énergie en 2022 et 2023, avec la flambée des prix du MWh sur les marchés de gros, l'État a pu récupérer une partie des profits réalisés par les énergies renouvelables (compensant en partie le coût très important du bouclier tarifaire).
Soutien des EnR en hexagone - Source : CRE - Graphique : Selectra
Quelles énergies sont concernées - et à quel tarif ?
Le tarif de référence est fixé selon le type d’installations par la puissance publique dans le cadre d’un arrêté tarifaire ou par le producteur dans le cadre d’une procédure de mise en concurrence.
Pour les nouveaux contrats, le complément de rémunération ne s’applique plus qu'à quelques filières renouvelables :
- l'éolien terrestre (avec des éoliennes ne dépassant pas 3 MW de puissance unitaire et au sein de parcs limités à 6 turbines, soit 18 MW) ;
- l'hydroélectricité pour des installations de moins de 1 MW ;
- le biogaz issu du traitement des eaux usées et provenant d'installations d'une puissance comprise entre 500 kW et 12 MW (à des fins de production d'électricité).
Précisons que le solaire peut également bénéficier d'un complément de rémunération, mais uniquement dans le cadre d'un appel d'offres avec une mise en concurrence (contrairement aux filières mentionnées précédemment en « guichet ouvert »).

Montant des compléments de rémunération
Filière | Arrêtés | Durée des contrats | Fourchette de tarifs |
---|---|---|---|
Eolien terrestre(4) | 29 décembre 2022 modifiant l'arrêté du 6 mai 2017 | 20 ans | 72 à 76 €/MWh |
Hydraulique(5) | 22 mai 2024 | 20 ans | 80 à 166 €/MWh |
Biogaz pour production d'électricité(6) | 13 décembre 2016 (modifié en 2023) | 20 ans | 62 à 151 €/MWh |
Dans le cadre des CR, des coefficients L et K sont des paramètres qui permettent d'ajuster le montant de la rémunération supplémentaire versée aux producteurs d'énergie renouvelable pour l'adapter aux coûts réels et à leur évolution(7).
Précisions concernant l'éolien terrestre
Le complément de rémunération de l'éolien terrestre concerne les parcs dont les aérogénérateurs ne dépassent pas 3 MW de puissance unitaire et sont limités à 6 unités.
Diamètre du plus grand rotor de l'installation | Pour les premiers MWh produits annuellement (P) | Pour les MWh produits au-delà du plafond P |
---|---|---|
80 mètres et moins | 74 €/MWh | 40 €/MWh |
Entre 80 et 100 mètres | 72 à 74 €/MWh (interpolation linéaire) | 40 €/MWh |
100 mètres et plus | 72 €/MWh | 40 €/MWh |
Précisions concernant l'hydroélectricité
Le complément de rémunération pour l'hydraulique concerne la production d'électricité à partir de l'eau de lacs, cours d'eau et de récupération des pluies de moins de 1 MW.
Puissance | Pour le turbinage des débits minimaux | Pour les installations de haute chute | Pour les installations de basse chute |
---|---|---|---|
< 500 kW | 98 €/MWh | 151 €/MWh | 166 €/MWh |
> 500 kW et < 1 MW | 80 €/MWh | 145 €/MWh | 151 €/MWh |
Heures à prix négatifs : un avantage du complément de rémunération sur l'obligation d'achat
Dans une note de novembre 2024(8), la Commission de régulation de l'énergie (CRE) souligne que « les installations sous CR ont une double incitation à s’arrêter lors des heures à prix négatifs: 1) elles ne touchent pas de CR lors de ces heures et subissent donc les pertes liées à la commercialisation d’électricité à prix négatifs ; 2) elles perçoivent une compensation au-delà d’un certain nombre d’heures à prix négatifs dans l’année (« prime pour prix négatif ») ».
Au contraire, les producteurs « sous obligation d’achat (OA) sont insensibles aux prix de marché et produisent à tout prix alors que leur coût d’arrêt est en général nul ou très faible », y déplore la CRE.
Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2025, une réforme du Sénat votée en janvier 2025 prévoit qu'EDF OA et les ELD puissent demander aux producteurs d'électricité en OA (pour les installations d'au moins 10 MW) d'arrêter ou de limiter leur production lors de ces épisodes de prix négatifs, de plus en plus fréquents. En 2024, ces heures à prix négatifs auraient coûté près de 30 millions d'euros à l'État. L'objectif de cette réforme est de réduire ce coût à 5 M€ en 2025.