Près de 83% de la production éolienne française provient d’installations implantées sur des terres agricoles. (©EDF-Bruno Conty)
A l’occasion du Salon de l’agriculture qui se termine dimanche, le développement des énergies renouvelables dans les exploitations agricoles a été évoqué à de nombreuses reprises. L’Ademe a consacré à ce sujet une étude dont la synthèse a été mise en ligne le 22 février dernier(1). Ce qu’il faut en retenir.
Agriculture et énergies renouvelables : état des lieux
En matière d’énergies renouvelables, la contribution « directe » (ex : production de biocarburants et de biogaz) et « indirecte » (ex : mise à disposition de terres agricoles pour l’installation d’éoliennes) de l’agriculture « a été chiffrée à 20% de la production nationale en 2015 » (4,6 Mtep sur les 23 Mtep d’énergie renouvelable produits en France cette année-là), selon les dernières données de l’Ademe.
Plus de 50 000 exploitations agricoles sont ainsi impliquées directement ou indirectement dans la production d’énergie renouvelable en France, principalement sous forme de biocarburants. Environ 45% de la production agricole d’énergie renouvelable provient des grandes régions Grand-Est, Hauts de France et Centre-Val de Loire qui disposent d’importantes filières de « grandes cultures » dont les surfaces planes constituent notamment « les espaces les plus propices pour l’installation d’éoliennes (topographie, accessibilité, environnement) ».
En matière d’emprise au sol, les biocarburants de 1re génération mobilisent naturellement la plus grande partie des terres agricoles contribuant à la production d’énergie renouvelable (environ 769 000 hectares de grandes cultures). Si la production éolienne en France provient à 83% d’installations implantées sur des terres agricoles selon l’Ademe, ces dernières correspondraient à des surfaces « négligeables » pour l’activité du secteur (583 hectares en incluant les chemins d’accès aux éoliennes selon les estimations de l’Ademe).
La contribution à la production d’énergie renouvelable aurait apporté au total un chiffre d’affaires de près de 1,4 milliard d’euros(2) au secteur agricole en 2015, soit l’équivalent d’environ 2% de son chiffre d’affaires total annuel(3). L’Ademe rappelle que les énergies renouvelables peuvent générer « un impact économique significatif pour les agriculteurs engagés dans ces projets », en leur fournissant un complément de revenu ou en faisant baisser leurs charges grâce à l’économie de combustible (en cas d’autoconsommation).
Précisons que la consommation d’énergie du secteur agricole a atteint 4,5 Mtep en 2015. Celle-ci reste très dépendante des énergies fossiles (notamment du fioul consommé par les engins agricoles) et ne repose qu’à 4% sur les énergies renouvelables.
Perspectives de développement et défis pour la filière
Dans son analyse prospective, l’Ademe estime que la contribution de l’agriculture à la production d’énergie renouvelable « pourrait être multipliée par 2 entre 2015 et 2030 et par 3 entre 2015 et 2050 », atteignant près de 15,8 Mtep à cet horizon (dans le scénario médian de l’Ademe). Dans ce scénario, la part d’énergie renouvelable produite en France « dans le périmètre agricole » atteindrait 23% en 2050(4) (contre 20% en 2015).
La plus grande partie de cette contribution serait liée à la mise à disposition de terres agricoles pour l’installation d’éoliennes et à l’injection de biogaz sur les réseaux gaziers selon les hypothèses de l’Ademe. L’agence envisage par ailleurs « une diminution de la part agricole de production de biocarburants de 1re génération » pouvant générer des conflits sur l’usage des sols, parallèlement au développement de biocarburants de 2e génération (biomasse forestière, déchets).
L’Ademe confirme dans son scénario prospectif « le rôle stratégique de l’agriculture dans le développement des EnR en France », ces dernières contribuant à l’équilibre économique des exploitations. A l’horizon 2050, « l’équivalent de 280 000 exploitations agricoles » pourraient contribuer à la production d'énergie renouvelable en France selon les estimations de l’agence.
Parmi les freins au développement des énergies renouvelables dans ce secteur figurent encore la lourdeur des démarches administratives (l’Ademe recommande l’instauration d’un guichet unique pour les aides aux agriculteurs) et la difficulté d’accès au financement (l’agence préconise des programmes de financement dédiés aux renouvelables dans le secteur agricole, relayés par des banques(5)).
Dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, rappelons enfin que l’agriculture est un secteur clé pour atteindre l’objectif de « neutralité carbone » de la France à l’horizon 2050. Il est en effet à l’origine d’un cinquième des émissions françaises de gaz à effet de serre et constitue la première source d’émission de méthane et de protoxyde d’azote (les deux principaux gaz contribuant au réchauffement après le CO2).
D’ici à 2050, la production éolienne provenant de terres agricoles pourrait quasiment être multipliée par 5 selon l'Ademe. (©Connaissance des Énergies d’après Ademe)