Centrale solaire de Sandringham au Canada. (©Invenergy)
Il existe « un consensus politique croissant » pour réduire à zéro les émissions nettes de CO2 dans le monde à l’horizon 2050 mais les énormes changements nécessaires à l’atteinte de cette ambition sont « mal compris », souligne l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dans son rapport « Net Zero by 2050 » publié le 18 mai(1). Elle y esquisse un « chemin étroit » pour emprunter cette voie.
Des engagements éloignés des objectifs fixés
Les différents pays ayant fixé un objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 comptent pour près de 70% des émissions mondiales à l’heure actuelle, indique l’AIE en préambule. Mais « la plupart de ces engagements ne sont pas soutenus par des politiques et des mesures de court terme », met en garde l’AIE(2).
L’AIE envisage une croissance économique importante au cours de la prochaine décennie(3) et conserve dans son scénario « Net Zero » l’objectif d’un accès universel à l’énergie « propre » à l’horizon 2030, en « apportant l’électricité aux près de 785 millions de personnes qui n’y ont pas accès actuellement et des solutions de cuisson propre aux 2,6 milliards de personnes qui en sont dépourvues » (pour un coût estimé à près de 40 milliards de dollars par an).
Une révolution énergétique
Dans son scénario « Net Zero », l’AIE envisage que « la consommation mondiale d’énergie soit environ 8% plus faible en 2050 qu’aujourd’hui, tout en satisfaisant les besoins d’une économie deux fois plus importante et d’une population de 2 milliards de personnes supplémentaires ».
L'AIE imagine un système énergétique reposant en 2050 aux deux tiers sur les énergies renouvelables (éolien, solaire, bioénergies, géothermie, hydroélectricité), tandis que la part des énergies fossiles chuterait à « un peu plus d’un cinquième » (contre près de 80% à l’heure actuelle). La part du nucléaire augmenterait quant à elle de près de 5% en 2020 à environ 11% en 2050. Cette révolution envisagée par l’AIE profiterait en premier lieu au solaire qui deviendrait, dans le scénario de l'AIE, la principale source d’énergie en 2050, satisfaisant alors près d'un cinquième des besoins énergétiques mondiaux(3).
Dans le scénario « Net Zero » de l’AIE, la consommation de pétrole chuterait de 75% entre 2020 (près de 90 millions de barils par jour) et 2050 (24 Mb/j), celle de gaz naturel de 55% et celle de charbon de 90%. Point très commenté lors de la présentation du rapport « il n’y aurait plus de nouveaux champs pétroliers et gaziers dont le développement serait approuvé » au-delà des projets déjà engagés en 2021.
Précisons que le scénario « Net Zero » de l’AIE s’appuie, d’ici à 2030, sur des technologies actuellement disponibles. En revanche, elle mise sur des technologies « au stade de la démonstration ou du prototype » pour contribuer pour moitié à la réduction des émissions de CO2 à l’horizon 2050 (batteries « avancées, électrolyseurs pour produire de l’hydrogène, capture directe de CO2 dans l’air et stockage)
Une forte électrification du système énergétique
Le vecteur électrique compterait pour près de la moitié de la consommation mondiale d’énergie à l’horizon 2050 (contre près d’un cinquième à l’heure actuelle), « jouant un rôle central dans les différents secteurs, des transports aux bâtiments et à l’industrie ». D’ici à 2030, l’électrification du système énergétique devrait entre autres faire plus que tripler les investissements annuels dans les réseaux électriques (820 milliards de dollars par an en 2030(5)).
La production mondiale d’électricité devrait être multipliée par 2,5 d’ici à 2050. À cet horizon, près de 90% de la production reposerait sur les énergies renouvelables dans le scénario « Net Zero » de l'AIE, le nucléaire fournissant un complément de production pilotable. Les défis associés à cette très forte croissance des filières renouvelables seraient nombreux (variabilité de la production et besoins de métaux rares notamment), souligne l'AIE.