Réserves et Production d'uranium naturel

Mine d'uranium à ciel ouvert

Mine d'uranium à ciel ouvert en Australie (©photo)

Définition des ressources et réserves

L’uranium naturel est un métal de couleur gris argenté présent partout dans l’écorce terrestre. On en trouve en particulier dans des gisements granitiques ou sédimentaires à des teneurs moyennes d'environ 0,2% à 2%.

Il convient de distinguer les ressources des réserves en uranium naturel : les ressources regroupent la totalité des quantités de minerais identifiées dans le sol, tandis que les réserves désignent la part de ces ressources dont l’exploitation économique est assurée dans les conditions actuelles. Les réserves sont ainsi assimilées aux ressources que l’on qualifie de « raisonnablement assurées » (RRA), c'est-à-dire la part techniquement « recouvrables » à un coût d’extraction satisfaisant. Les changements de prix, l’évolution des infrastructures, les technologies, les décisions politiques peuvent faire baisser ou augmenter les évaluations des réserves d’uranium naturel disponibles dans le monde.

À ces réserves s’ajoutent des ressources spéculatives supplémentaires, dont il ne sera pas fait mention dans cette fiche.

Exploitation : les grandes données

On trouve de l’uranium partout dans la croûte terrestre, dans des proportions variables, et également dans l’eau de mer.

PPM et teneur en uranium

Le terme "ppm" signifie "parties par million" et est une unité de mesure de concentration. Les ppm permettent de quantifier précisément des concentrations très faibles, ce qui est utile pour des substances comme l'uranium où même de petites quantités peuvent être significatives. Une valeur de 1 ppm signifie qu'il y a une partie de la substance en question pour un million de parties du mélange ou de la solution totale.

Pour convertir des parties par million (ppm) en pourcentage (%), on utilise la relation suivante :

1 ppm = 1 / 1 000000 ​× 100% = 0,0001%

Ainsi, pour convertir une valeur en ppm en pourcentage, on divise la valeur en ppm par 10,000. Par exemple, la conversion pour 100 ppm donne 0.01 % (100 / 1,000,000 × 100).

Concentration en uranium

Les roches sont toujours qualifiées de « minerais » lorsqu’elles possèdent une concentration en uranium supérieure à 1 000 ppm (soit 0,1%). Des roches ayant des concentrations en uranium inférieures à 0,1% peuvent également être qualifiées de « minerais » à condition que l’uranium puisse y être facilement séparé des autres éléments et soit économiquement recouvrable.

Proportion d’uranium sur Terre par type de minerai
Type de mineraiTeneur en Uranium
Minerai de qualité très élevée (Canada) - 20% U200 000 ppm U
Minerai de qualité élevée - 2% U20 000 ppm U
Minerai de basse qualité - 0.1% U1 000 ppm U
Minerai de très basse qualité (Namibie) - 0.01% U100 ppm U
Granit3-5 ppm U
Roche sédimentaire2-3 ppm U
Croûte terrestre continental2.8 ppm U
Eau de mer0,003 ppm U

Réserves d’uranium naturel dans le monde

Les réserves doivent être estimées au regard d’un coût d’extraction. Par exemple, les réserves raisonnablement assurées, récupérables à moins de 260 $/kg d’uranium sont estimées à 8,07 millions de tonnes en 2019(1). Les RRA augmentent à mesure que le prix d'extraction monte aussi (en 2011, les RRA récupérables à moins de 130 $/kg d’uranium étaient estimées à 5,3 millions de tonnes).

La quantité mondiale d’uranium naturel nécessaire pour produire de l’électricité en exploitant la fission de l’uranium 235 (réacteurs de 1e à 3e générations) est estimée à 65 900 tonnes en 2014. Les RRA permettraient de soutenir cette consommation au rythme actuel durant plus de 100 ans. Au-delà, l’exploitation devra se porter sur des ressources aux coûts d’extraction supérieurs (voire dans les millions de tonnes d’uranium contenus dans les phosphates et les quantités encore plus importantes contenues dans l’eau des océans, toutefois dans d’infimes proportions). 

Répartition des réserves exploitables d’uranium par pays en 2022 (en %) : 

  • 29,2% Australie
  • 9,5% Russie
  • 8,7% Canada
  • 8,3% Kazakhstan
  • 7,4% Namibie
  • 6,7% Niger
  • 4,1% Afrique du Sud
  • 3,3% Inde
  • 2,8% Chine
  • 2,1% Ukraine
  • 17,9% Reste du monde

Source : Institut fédéral de géosciences et de ressources naturelles (BGR).

Les recherches des géologues permettent de savoir que d’importants gisements d’uranium restent à exploiter en Australie et au Canada. D’autres pays politiquement instables possèdent également d’importants gisements mais l’exploitation y est faible.

Exploitation des gisements d'uranium naturel dans le monde

Production d'uranium par pays en 2022 - World Nuclear Association
PaysProduction (tonnes U)
Kazakhstan21 227
Canada7 351
Namibie5 613
Australie4 553
Ouzbékistan3 300
Russie2 508
Niger2 020
Chine1 700
Inde600
Afrique du Su200
Ukraine100
USA75
Pakistan45
Brésil43
Iran20
France0
Total monde49,355

RRA à un coût d’extraction de 130$/kg d’uranium dans les pays possédant plus d’1% des réserves mondiales en 2009, source World Nuclear Association

RRA à un coût d’extraction de 130$/kg d’uranium dans les pays possédant plus d’1% des réserves mondiales en 2009. En 2011, la part du Niger s'est élevée à 8%. (d'après données World Nuclear Association)

La répartition géographique des RRA d’uranium naturel dans le monde est relativement plus équilibrée que celle des réserves d’hydrocarbures (près de 48% des réserves prouvées de pétrole et plus de 43% de celles de gaz se trouvent au Moyen-Orient)(3). Ce constat doit toutefois être relativisé par la découverte de nouveaux gisements d’hydrocarbures non conventionnels.

Réserves d’uranium naturel en France

Les réserves en uranium de la France sont très faibles (< 0,5%), avec des coûts d’extraction très élevés.

Plus aucun uranium n'est extrait en France depuis 2015.

Mines d'uranium et groupes exploitants

10 compagnies se partagent 94% du marché de l'extraction de l'uranium dans le monde. Parmi elles, les trois plus importants producteurs d’uranium sont Kazatomprom (Kazakhstan), Orano (France) et Cameco (Canada). Toutes ces grandes compagnies sont nées des pays possédant les réserves en uranium naturel les plus importantes, à l’exception d’Orano (ex Areva).

Le groupe Orano s’est développé dans cette activité minière pour répondre à la forte demande du parc nucléaire français, composé de 58 réacteurs nucléaires. Notons que l’Australie, pays disposant des plus grandes réserves mondiales en uranium naturel, et le Kazakhstan, premier producteur mondial (36,5% de la production mondiale en 2012, 43% en 2022), ne possède pas de centrale nucléaire en activité.

Dix plus grands groupes producteurs d'uranium - World Nuclear Association
EntreprisePays d'origineTonnes U% de la production mondiale
KazatompromKazakhstan11 37323 %
CamecoCanada5 67512 %
OranoFrance5 51911 %
CGNChine4 62710 %
Uranium OneCanada4 4549 %
NavoiOuzbékistan3 3007 %
CNNCChine3 2477 %
BHPAustralie/UK2 8136 %
ARMZRussie2 5085 %
General Atomics/QuasarUSA1 7404 %
Other4 0986 %

Notons l'essor des compagnies chinois et kazakhs au cours des dix dernières années.

Plus grandes mines d'uranium exploitées dans le monde
MinePaysPrincipal propriétaireProduction (tonnes U)% de la production mondiale
Cigar LakeCanadaCameco/Orano6 92814 %
HusabNamibieSwakop Uranium (CGN)3 3587 %
Inkai, sites 1-3KazakhstanKazatomprom/Cameco3 2017 %
Olympic DamAustralieBHP Billiton2 8136 %
Karatau Budenovskoye 2KazakhstanUranium One/Kazatomprom2 5605 %
RössingNamibieCNNC2 2555 %
SOMAIRNigerOrano2 0204 %
Four MileAustralieQuasar1 7403 %
Central MynkudukKazakhstanOrtalyk1 6503 %
South Inkai 4KazakhstanUranium One/Kazatomprom1 6003 %

Usages et stocks

Depuis la fin des années 1980, la production des mines d’uranium couvre uniquement 50 à 60 % de la consommation totale des réacteurs. Le complément d’offre est essentiellement issu de la mobilisation des stocks en uranium. S’y ajoutent d’autres stocks de matières militaires (Etats-Unis et ex-URSS) et, enfin les matières issues du recyclage via le traitement des combustibles usés.

Aujourd’hui, la production d’uranium naturel est encore inférieure à la demande : de l'ordre de 74% en 2022. Un pic à 98% avait été atteint en 2015.

Projections

Les ressources mondiales d’uranium commencent à être estimées dans les années 1950, alors que les États-Unis mettent en place le programme « Atoms for Peace » et que l’AIEA est créée. L’OCDE publie en 1965 un Livre rouge nommé « Évaluation des ressources mondiales d’uranium et de thorium ». Depuis lors, l’OCDE publie tous les deux ans une version mise à jour des réserves estimées grâce aux informations communiquées par une cinquantaine de pays, dont quasiment tous les producteurs significatifs d’uranium. 

L’exploitation des réserves d’uranium naturel dépend avant tout du développement de la production d’énergie nucléaire. Celle-ci dépend elle-même principalement des orientations politiques et économiques (part de la production d’énergie nucléaire dans le mix électrique) ainsi que de la croissance démographique (hausse de la demande d’électricité).

En 2005, la World Nuclear Association (WNA) a posé l’hypothèse d’un doublement de la puissance installée du parc nucléaire mondial d’ici à 2030 (de 370 GWe à 740 GWe). Dans ce scénario, le parc nucléaire mondial serait toujours essentiellement constitué de réacteurs à eau, dont certains seraient remplacés par des réacteurs de 3e génération. La consommation annuelle d’uranium naturel atteindrait alors, selon la WNA, 159 000 tonnes d’uranium en 2035, soit plus du double de la consommation actuelle. Cette hausse de la consommation nécessiterait l’exploitation de nouvelles mines d’uranium.

L'accident de Fukushima Daiichi a toutefois freiné le développement de l'énergie nucléaire dans le monde. Au 18 avril 2014, la puissance installée du parc nucléaire mondial atteint 372,8 GW.

Le développement des Réacteurs à Neutrons Rapides (RNR, 4e génération) pourrait bouleverser la notion même de réserves d’uranium. Ces réacteurs utilisent en effet directement l’isotope U238 dit « fertile », qui est plus de 100 fois plus abondant que l’uranium 235. Dans cette hypothèse, la question des réserves d’uranium naturel ne se poserait plus dans les mêmes termes. En particulier, les RNR pourraient utiliser comme combustible, pendant des millénaires, les milliers de tonnes d’uranium « appauvri » en uranium 235 provenant des réacteurs de 1e à 3e génération, actuellement considérés et stockés comme des déchets.

Également au centre des recherches actuelles, le thorium est l’autre métal « fertile » pouvant alimenter des réacteurs nucléaires à neutrons rapides (réacteurs à sels fondus). Ses réserves sont 3 à 4 plus abondantes dans l’écorce terrestre que celles d’uranium. Son exploitation future dans des réacteurs à sels fondus pourrait elle aussi avoir un impact sur l’exploitation des RRA d’uranium naturel.

Il existe de nombreux isotopes de l'uranium mais l’uranium naturel présent dans l’écorce terrestre n’est constitué que de trois isotopes : l'uranium 238, le plus lourd atome naturel et le plus abondant (99,28%), l'uranium 235 (0,71%) ainsi que des traces d’uranium 234 (0,006%).

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