Exploitation de pétrole dans le Dakota du Nord. (©Hess Corporation)
Les États-Unis sont devenus les premiers producteurs de pétrole brut et de gaz naturel au monde en s’appuyant sur leurs hydrocarbures non conventionnels. Ils devraient connaître une deuxième année de baisse de leur production en 2021 selon les dernières prévisions de l’EIA américaine(1).
Pétrole brut et gaz naturel : les prévisions pour 2021
L’EIA estime que la production de pétrole brut des États-Unis pourrait s’élever à 11,1 millions de barils par jour (Mb/j) en 2021, soit une baisse d’environ 200 000 barils par jour par rapport à 2020 (11,3 Mb/j) et de plus d’un million de barils par jour par rapport à 2019 (12,2 Mb/j)(2). Cette baisse résulte « d’un déclin de l’activité de forage lié aux faibles prix du pétrole », précise l’EIA.
La production américaine de pétrole brut pourrait être relativement stable en 2021 selon les prévisions de l’EIA, au-dessus du niveau du 2e semestre 2020 mais bien en deçà de celui du début de l’année 2020 (avant que la crise du Covid-19 n’affecte durablement l’économie américaine). Au niveau mondial, la production de pétrole brut est attendue en hausse d’environ 1 Mb/j en 2021 (prévision de l’Agence internationale de l’énergie(3)), après avoir connu une baisse record de 6,6 Mb/j en 2020.
« La projection est un art difficile, en particulier dans une période aussi troublée et incertaine du fait de la pandémie de Covid 19 mais ces projections sont raisonnables sur la base des estimations/projections actuelles en matière de croissance économique et de prix du pétrole », estime Francis Perrin(4), directeur de recherche à l’IRIS. L’EIA envisage par la suite une remontée de la production américaine de pétrole brut en 2022, à hauteur de 11,5 Mb/j (avec un prix du baril de WTI proche de 50 $).
La production américaine de gaz naturel, qui avait battu des records en 2018 et 2019, a quant à elle chuté de 2% en 2020 dans le contexte de la crise sanitaire. Et elle pourrait à nouveau baisser de 2% en 2021 selon l’EIA (à un niveau moyen de 95,9 milliards de pieds cubes par jour). L’EIA prévoit un rebond de 2% en 2022, avec une remontée de la production à 97,6 milliards de pieds cubes par jour.
Les prévisions de l'EIA américaine sur la production de pétrole brut et de gaz naturel des États-Unis au cours des 2 prochaines années. (©Connaissance des Énergies, d'après EIA)
Stratégie de l’OPEP+ : quel impact sur la production américaine ?
La production pétrolière américaine « dépend de dynamiques internes aux États-Unis mais aussi, évidemment, du niveau des prix du pétrole » et ces cours du brut sont entre autres impactés par les décisions de l’OPEP+ (23 pays, incluant les membres de l’OPEP et 10 autres producteurs dont la Russie), rappelle Francis Perrin.
Or, ces pays « restent très prudents » : début janvier 2021, seuls la Russie et le Kazakhstan ont été autorisés à très faiblement remonter leur niveau de production aux mois de février et mars 2021 (voir le détail des plafonds de production par pays de l'OPEP+) et l’Arabie saoudite a par ailleurs annoncé baisser de façon unilatérale son quota de production de 1 Mb/j, réendossant ainsi un rôle de « swing producer » pour soutenir les cours du pétrole.
Une augmentation de la production et des exportations de l'Iran en cas d'accord avec les États-Unis sur le programme nucléaire iranien pourrait également peser sur les cours du pétrole, souligne Francis Perrin : « l'OPEP+ aura un rôle à jouer dans ce scénario puisque l'Iran est actuellement l'un des trois pays (avec la Libye et le Venezuela) sur les 23 qui ne sont pas engagés dans les réductions de production prévues par l'accord du 12 avril 2020 ».
Joe Biden Président : quel poids des premières annonces ?
La politique énergétique du nouveau Président américain « devrait, en limitant l'exploration et l'exploitation de nouveaux champs pétroliers, freiner la production pétrolière américaine et contribuer à rééquilibrer l'offre et la demande en augmentant les prix », indique IFP Énergies nouvelles dans son Tableau de bord du 25 janvier(5). Joe Biden a d’ailleurs annoncé dès le 27 janvier un moratoire sur l'octroi de nouvelles concessions pour des forages pétroliers et gaziers sur les terres et les eaux fédérales (qui comptaient pour 22% de la production totale de pétrole et 12% de la production de gaz naturel des États-Unis en 2019, selon l’EIA).
Cette mesure n'affecte toutefois pas les puits déjà forés et les permis existants. De plus, « les compagnies pétrolières avaient accumulé un stock important de permis non encore utilisés et elles ont donc une bonne marge de manœuvre à court terme », constate Francis Perrin. La politique de l’administration Biden ne devrait ainsi « pas avoir d'impact significatif sur la production d'hydrocarbures aux États-Unis en 2021 », des conséquences étant attendues à plus long terme. Mais « il convient, pour être plus précis sur ce sujet, d'attendre les résultats du réexamen du programme fédéral d'attribution des permis que le DOI va entreprendre », avertit Francis Perrin.
Les acteurs du schiste américain, dont l'état financier fait l'objet de nombreuses incertitudes, seront encore scrutés de près cette année. Dans ses prévisions sur le secteur pétrolier présentées début janvier 2021, la Federal Reserve Bank of Dallas mentionne que les entreprises concernées déclaraient, dans son dernier sondage (réalisé en mars 2020), avoir besoin d’un prix du baril de WTI compris entre 46 $ et 52 $ pour que de nouveaux forages soient rentables(5) (« breakeven price »). Au 29 janvier, le cours du WTI avoisine 53 $ par baril.