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Le géant pétrolier Royal Dutch Shell ne paie pas d'impôts sur une grande partie des dividendes aux Pays-Bas depuis une dizaine d'années avec l'accord des autorités, en versant certains dividendes via un paradis fiscal, a rapporté samedi le journal de référence Trouw.
Depuis 2005, Shell a versé à ses actionnaires environ 45 milliards d'euros via Jersey, paradis fiscal des îles Anglo-Normandes, ce qui représente un manque à gagner de près de 7,5 milliards d'euros pour l'État néerlandais, d'après les estimations du Centre pour recherche sur les entreprises multinationales (Somo) cité par le journal.
Un an plus tôt, en 2004, la major pétrolière avait lancé son projet de fusion entre ses deux branches néerlandaise Royal Dutch Petroleum et britannique Shell Transport and Trading. Et "pour éviter que les anciens actionnaires britanniques paient une taxe néerlandaise sur le dividende et ne votent ainsi contre la fusion, Shell a émis deux sortes d'actions": les actions A soumises à l'impôt néerlandais et les actions B dont les actionnaires reçoivent le dividende sans taxe via Jersey.
Un contournement approuvé par les autorités fiscales néerlandaises en 2004 qui a donc facilité la fusion du groupe l'année suivante, d'après le quotidien. Réagissant auprès de la radio-télévision publique NOS, le géant pétrolier a affirmé samedi que ce mécanisme était totalement conforme à la législation fiscale.
Dans une lettre à la présidente de la chambre basse du Parlement publiée sur Twitter, Jesse Klaver, leader du parti écologiste de gauche GroenLinks, a réclamé samedi une enquête parlementaire sur la relation entre le gouvernement et Shell, s'interrogeant sur le respect de la loi et sur le rôle des politiques dans cette affaire. "Il semble que le service des impôts collabore à une évasion fiscale pour rendre une fusion possible. C'est inouï", a-t-il réagi auprès de Trouw.
La coalition quadripartite du Premier ministre libéral Mark Rutte prévoit de supprimer l'impôt sur les dividendes à partir de 2020, affirmant que cela contribuera à rendre les Pays-Bas plus attractifs pour les investisseurs étrangers. Ce projet du gouvernement a plusieurs fois fait bondir l'opposition à la chambre basse du Parlement, notamment parce que la mesure ne figurait dans aucun programme des partis de la coalition pendant la campagne électorale en 2017.
Par le passé, les Pays-Bas ont été considérés comme un paradis fiscal, mais le gouvernement s'est engagé à tenter d'attirer des investisseurs réels plutôt que des sociétés "boîtes aux lettres" notamment en supprimant l'impôt sur les dividendes.