Nucléaire : la Finlande met en service son EPR tandis que l'Allemagne arrête ses derniers réacteurs

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Après des années de retard, la Finlande a mis dimanche en service commercial son nouveau réacteur nucléaire EPR de conception française, quelques heures seulement après la sortie effective de l'atome civil de l'Allemagne avec l'arrêt de ses dernières centrales.

Au terme de 18 ans d'un chantier qui a viré au feuilleton interminable, le réacteur nucléaire d'Olkiluoto 3, sur la côte sud-ouest finlandaise, a terminé sa phase d'essais de production et est désormais pleinement opérationnel, a annoncé son exploitant, TVO. Construit par le groupe français Areva avec l'allemand Siemens, il devient ainsi le réacteur nucléaire le plus puissant en opération en Europe.

"Les essais sont terminés et la production d'électricité régulière a commencé", a indiqué TVO qui a démarré l'exploitation commerciale dans la nuit de samedi à dimanche. En comptant les deux anciens réacteurs 1 et 2 existants, "environ 30% de l'électricité finlandaise est maintenant produite à Olkiluoto", a-t-il ajouté.

Dimanche vers 09h30 GMT, plus de la moitié de l'électricité finlandaise venait de l'atome. La construction du réacteur de 1 600 mégawatts, qui a lui seul fournit environ 14% de la production d'électricité finlandaise, avait débuté en 2005.

Il avait déjà été démarré fin décembre 2021 et atteint pour la première fois sa pleine puissance électrique de 1 600 mégawatts le 30 septembre. Des essais, eux-mêmes marqués par des retards, se poursuivaient depuis plusieurs mois.

Lancé en 1992 comme le nec plus ultra de la technologie nucléaire française, le réacteur pressurisé européen (EPR) a été conçu pour relancer l'énergie nucléaire en Europe, au lendemain de la catastrophe de Tchernobyl de 1986. Le nouveau modèle est présenté comme offrant à la fois une puissance plus élevée et une meilleur sécurité, mais sa construction s'avère un casse-tête, et pas uniquement en Finlande.

Débâcle pour Areva

En France, la construction de l'EPR de Flamanville, entamée en 2007, a elle aussi été affectée par des retards massifs, dus notamment à des anomalies dans le couvercle en acier et la cuve du réacteur. L'EPR a aussi été retenu pour une centrale à deux réacteurs à Hinkley Point, dans le sud-ouest de l'Angleterre. La production d'électricité est actuellement planifiée pour mi-2027, au lieu de 2025 au départ.

Deux réacteurs EPR ont déjà été mis en service en Chine, faisant d'Olkiluoto le troisième en opération dans le monde. Les énormes surcoûts du chantier finlandais entamé en 2005 ont été une des principales cause du démantèlement industriel d'Areva, plombé par des pertes de plusieurs milliards d'euros. Une structure subsiste, dont la tâche essentielle est de boucler le chantier d'Olkiluoto, mais l'essentiel du groupe est passé dans le giron d'EDF.

Malgré ce fiasco à Olkiluoto, le soutien au nucléaire civil a progressé ces dernières années en Finlande, stimulé par les préoccupations climatiques et les tensions énergétiques mondiales. Selon un sondage paru en mai, 60% des Finlandais y sont désormais favorables, un record. Coïncidence de calendrier, l'entrée en service commercial de l'EPR finlandais intervient au moment même où l'Allemagne a mis à l'arrêt ses trois derniers réacteurs.

Les centrales d'Isar 2 (sud-est), Neckarwestheim (sud-ouest) et Emsland (nord-ouest) ont été déconnectées du réseau électrique avant minuit (22h00 GMT), comme prévu. Leur arrêt marque l'aboutissement de plus de 20 ans d'abandon progressif de l'énergie atomique dans le pays, malgré les controverses et la récente crise énergétique en Europe.

Cette stratégie de renoncement à l'atome, perçu comme dangereux par de larges pans de la population, déconcerte nombre de partenaires de l'Allemagne, comme la France, qui estiment que le nucléaire a un rôle à jouer pour décarboner la production d'électricité. La crise énergétique déclenchée par la guerre en Ukraine a relancé le nucléaire, à l'excellent bilan carbone, comme alternative aux énergies fossiles, dont le gaz russe.

Commentaires

JPVEROLLET
Décidément la petite Finlande vole au secours de l'Europe hésitante et brouillonne en renforçant sa défense en rejoignant l'OTAN, et en compensant la défaillance allemande en remplaçant largement la fermeture politique de ses dernières centrales atomiques grâce à son EPR tardif mais très opportun. Tant pis pour les marchands de charbon vert! Du coup, que vont-ils encore inventer comme green washing?
Serge Rochain
@JPVEROLLET Non la petite Finlande s'est faite rouler dans la farine comme les français avec une machine hors de prix qui les a déjà ruiné comme la France et sans qu'ils s'en rendent compte, comme les français ! Un Prix de production du KWh 2 à 4 fois plus élevé que celui des renouvealbles malgré les récentes augmentation des matieres premieres : https://www.pv-magazine.fr/2023/04/14/le-cout-moyen-de-lenergie-solaire-augmente-pour-la-premiere-fois-cette-annee/ Quant à l'Allemagne elle est sur le bon chemin et fidele à ses objectifs qui n'ont rien d'hésitants : zero nucléaire et zero charbon en 2035. Jamais l'Allemagne n"émettait autant de CO2 que lorsqu'elle avait ses 16 réacteurs nucléaires en service. Depuis 2002 leurs nucléraires, charbons et emission de CO2 n'ont fait que baisser et le renouvelable qui ne représentait moins de 10% de leur électricité est à 48% aujourd'hui, remplaçant tant le nucléaire que le fossile.Tout cela se voit dans les statistiques officielles, pas dans les fakes qui se colportent au bistrot du coin : https://www.cleanenergywire.org/factsheets/germanys-energy-consumption-and-power-mix-charts Et le rete du monde ne s'y trompe pas ; Le nucléaire qui représentait encore 9,9% de l'électricité mondiale en 2021 ne représentait déjà plus que 9,2% en 2022 et la pente est aussi inéluctable que tétue !
Gaspard
Et vous vous rendez compte, si au lieu de fermer ses centrales nucléaires, l'Allemagne avait d'abord fermé ses centrales à charbon... ? A 9h, aujourd'hui : intensité carbone de la production électrique : France : 53gCO2/kWh (34% de renouvelables), Allemagne : 409gCO2/kWh (62% de renouvelables). Quant à la sortie du charbon en 2035, elle se fera (si elle se fait) au profit... du gaz...
Serge Rochain
Mais mon cher Gaspard, l'Alleamgne fait les deux depuis plus de 15 ans et avec une vitesse sensiblement égale mais comme le charbon etait près de deux fois plus producteur que le nucléaire, ce dernier se trouve à zéro bien plus tot ! C'est toute la stratégie de l'QAlleamgne que vous ne comprennez pas, ce qui ne vous empèche pas de prédir l'avenir énergétique de l'Alleamgne qui développe également le biogaz dont vous ignore tout. Un petit conseil cherchez l'information dans les sites officiels pas au bar du coin : https://www.cleanenergywire.org/factsheets/germanys-energy-consumption-and-power-mix-charts
Daphné
M. Rochain, pourquoi dans vos graphs on note une remontée sensible de la conso de lignite, de charbon et de gaz dès 2020 en Allemagne, avant la guerre en Ukraine? Et puis , la conso d'électricité n'est qu'une faible partie de la conso. globale d'énergie, de l'ordre de 28%. A part ça, l'Allemagne veut tendre vers l'autonomie énergétique avec ses 31000 éoliennes dont 1500 en mer et elle a raison. Mais par quoi va-t-elle remplacer le lignite et le charbon dans 10 ans? Il semble que dans ce pays il y ait aussi des NIMBY surtout pour les éoliennes terrestres... Il est vrai que de grands progrès dans la rentabilité des EnR . On arrive à des rendemets de plus de 30% avec les nouvelles cellules PV renforcées. Les recherches et technologies de pointe , les nanomatériaux, les matériaux bidimentionnels feront avancer les choses tout naturellement sans insultes.
Rochain Serge
Non, en 2020 il y avait eu une baisse importante au contaire de la production de charbon et lignite, ce n'est qu'en 2021 puis 2022 que l'Alleamgne a remis en marche d'anciennes centrales arrétées car ils sont venus à notre secours des l'hiver 2021/2022 car notre parc nucléaire était defficient pour faire face aux périodes froides comme à partir du 20 décembre 2021 où nous importions d'Allemagne essentiellement (qui avait remis ses centrales en marche dans un accord avec la France) en permanence l'équivalent de la production de 12 réacteurs nucléaires. Puis nous avons retrouvé la même situation dès le début décembre 2022. Il est probable, à moins que l'hiver prochain ne soit particuliermeent clément, que nous nous retrouvions dans la même situations car nous avons toujours une grande partie du parc nucléaire inopérant ce qui n'est pas un problème pour la période chaude jusqu'à novembre en général..Actuellement nous avons 26 réacteurs à l'arret, ce qui n'est pas anormal pour l'été, mais nous en avons eu autant à l'arret tout l'hiver et c'était beaucoup plus ennuyeux.
Marc Diedisheim
Zer6 nucléaire, c'est sûr. Zéro charbon en 2035. Peut-être. Mais pourquoi aucune mention du gaz ? RV est pris pour 2035. Bien cordialement.
Serge Rochain
Il n'est pas non plus fait mention de la bioénergie, de la géothermie, de l'haydraulique.... .... pourquoi ne vous en étonnez vous pas ? Il est fait mention surtout de zero fossile, ce détail vous a sans doute échappé, comme le fait que biogaz et gaz fossile sont les mêmes mais que l'un est carbon neitre et l'autre carboné ... Si à n'importe quel propos on devait surtout s'étendre sur tout ce qui n'est pas le propos je vous laisse imaginer la clarté des échanges Par ailleurs, la perfidi des remarques, qui ne sont toujours que des propos à coté du sujet, est une constante chez vous
mutin
Il va falloir que ça tienne 60 ans !
Serge Rochain
Et ça, ce n'est pas gagné. Nos anciens devaient tenir 40 ans et ils ont toutes les peines du monde avec toujours 21 réacteurs au bord de la route, et pas toujours les mêmes .... un redémarre, un autre tombe en carafe... voir nuclear monitor
Louis Monnard
L' Abandon de filières industrielles, a fait de nombreuses victimes dans les branches Energie, Transport, BTP, Santé. Le réveil est pénible, les formations- clavier, ne suffisent plus, la Chine est un rude compétiteur. De plus ,il va falloir rendre cohérents Administration et Ingénieries, l'I.A. montre ses limites de concept.
Rochain Serge
L'IA n'a rien a voir la-dedans, c'est quelque chose dont on parle beaucoup en ce moment et qui ressort périodiquement. Vous savez dans la profession informatique on en parlait déjà il y a 30 ans. On ventais des logiciels d'IA qui faisaient de meilleurs diagnostics que les médecins quand on leur donnait les symptomes dont il fallait diagnostiquer ce qu'etait la ou les maladies qui les provoquaient. Cetains voyaient déjà les medecins au chômage.... moi j'ai préféré garder le mien ! L'IA c'est surtout un concept très méconnu mais que chacun croit avoir bien compris et en parle en expert pour faire de la mousse, et ce sont ceux qui en parlent le plus qui en sont les plus grands ignorants.

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